« Hérésie » : différence entre les versions

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L’Église ne veut rien dire si on ne précise pas son nom.
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[[Fichier:GustafVasakyrkan RightAltargroup1.jpg|vignette|redresse=1.2|''Les Écritures triomphant sur l'Hérésie'', dans l'{{Lien|langue=en|trad=Gustaf Vasa Church|fr=Église Gustaf Vasa|texte=église Gustaf Vasa}} de [[Stockholm]].]]
 
Dans l’[[Antiquité]], le terme '''haíresis''' (en [[grec ancien]] : {{grec ancien|αἵρεσις|haíresis}}) désigne une école de pensée philosophique librement choisie. Au cours des [[concile]]s, l''''hérésie''' s'oppose progressivement à l'« [[orthodoxie]] » pour indiquer les [[doctrine]]s formulées par les baptisés qui s'opposent ou remettent en cause les [[dogmes de l'Église catholique|dogmes]] de l'[[Église catholique]]. Elle acquiert ainsi une valeur péjorative entre les II{{eIIe}}<ref>Ainsi chez [[Justin de Naplouse|Justin]] ; Bernard Pouderon (dir.) et Enrico Norelli (dir.), ''Histoire de la littérature grecque chrétienne des origines à 451, vol. II : De Paul de Tarse à Irénée de Lyon, Paris'', Les Belles Lettres, coll. « L'Âne d'Or », 2016, {{p. |575-590}} ; Alain Le Boulluec, ''La Notion d'hérésie dans la littérature grecque : IIe{{sp-IIIe siècle|II|-|III}}. Vol. 1. De Justin à Irénée'', Institut d'études augustiniennes, 1985.</ref> et VI{{eVIe}}<ref>Isidore de Séville, ''Etymologies'', VII, 3. </ref> siècles et se fait condamnation de tous dogmes contraires aux opinions et pratiques [[catholique]]s au [[Moyen Âge]]. L'hérésiologie devient un champ d'étude et un genre littéraire<ref>Aline Pourkier, « L'hérésiologie aux premiers siècles du christianisme, nouveau genre littéraire », ''Collection de l'Institut des Sciences et Techniques de l'Antiquité'', 2007, pp{{p. |389-398}}.</ref>. Dans le langage courant, le mot « hérésie » en vient à désigner une opinion qui heurte les usages et ce qui est admis ou tenu pour acquis dans les domaines de la pensée, de la connaissance, de la religion. Ainsi, [[Hilaire Belloc]] a pu proposer une définition qui englobe sa dimension religieuse et scientifique et s'étend à son usage séculier : {{quote|L'hérésie est la dislocation d'un système complet et autosuffisant par l'introduction d'une nouvelle négation d'une partie essentielle de celui-ci<ref>Hilaire Belloc, ''The great heresies'', 1987, Trinity Communications, {{p.}} 10. « Heresy is the dislocation of some complete and self-supporting scheme by the introduction of a novel denial of essential part therein. »</ref>.}}
 
Dans l'[[histoire du christianisme]], l'hérésie est distincte du [[schisme]], qui est un rejet de l'autorité ecclésiale, de l'[[Apostasie dans le christianisme|apostasie]], qui est le reniement de sa propre [[foi]], et du [[blasphème]], qui est une parole ou un acte insultant envers [[Dieu]]. L'hérésie se produit à l'intérieur de la foi, de manière réfléchie et persistante, se présentant soit comme une innovation soit comme un retour à une prétendue pureté originelle de la [[Révélation]]<ref>[[Marie-Dominique Chenu]], « Orthodoxie et hérésie. Le point de vue du théologien », ''Annales. EconomiesÉconomies, sociétés, civilisations.'', 18ᵉ année, {{n°}}1, 1963. {{pp.}} 79,80.</ref>.
 
== Étymologie et sémantique ==
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Le mot finit par désigner une « secte religieuse » ou une « dissidence » dans le [[christianisme primitif]]<ref>[[Dictionnaire grec-français d'Anatole Bailly|Dictionnaire Grec - Français]], [[Anatole Bailly]], Hachette, 1950, ''s.v.'', {{p.|47-48}}. Henri-Irénée Marrou, ''L'Église de l'Antiquité tardive, 303-604'', Paris, 1985.</ref>. Dans le monde antique, où la religion est plus rituelle que dogmatique, l’''haíresis'' n’a pas l’aspect dramatique qu'elle devait revêtir dans le [[christianisme]]. En effet, l’[[Antiquité]] [[Polythéisme|polythéiste]] sépare le [[mythe]] de la [[philosophie]]. Le [[monothéisme]] en revanche introduit la [[théologie]], étude [[scolastique]] du divin qui englobe et transcende tous les domaines du savoir, soumet la philosophie et édicte des « vérités révélées » sur [[Dieu]] : les [[dogme]]s.
 
La théologie classique n'oublie pas le sens premier du terme<ref>Ainsi chez [[Jérôme de Stridon]] puis chez [[Thomas d'Aquin]], ''Summa theologica'', II, question 11, article 1, « ''haeresis graece ab electione dicitur'' » formule que l'on retrouve dans le ''[[Decretum Gratiani]]''</ref> mais y intègre au {{s|XII|e}} le schisme<ref>[[Raymond de Peñafort]], ''Summma de penitentia'', I, 5, « ''De Hereticis et fautoribus eorum et ordinatis ab eis'' »</ref>, la désobéissance aux décrétales du pape ([[Henri de Suse]]) et [[Martin V]] l'usure<ref> Marie-Dominique Chenu « Orthodoxie et hérésie. Le point de vue du théologien », ''Annales. Économies, sociétés, civilisations'', 18ᵉ{{18e}} année, N. {{n°|1}}, 1963. pp{{p. |75-80}}</ref>.
 
À partir du {{s|XII|e}}, tout en gardant son caractère de stigmatisation ecclésiale, le terme se charge de sens nouveau pour désigner une tromperie, une ruse, une duplicité parfois sans lien avec le champ religieux<ref>Comme l'atteste l'usage qu'en fait [[Conon de Béthune]] ; ''Chanson'', « L’autrier avint en cel autre païs », IV, texte établi par Axel Gabriel Wallensköld, Paris, Champion, 1921.</ref>. Il désigne également, à la même période, un crime révoltant<ref>[[Guernes de Pont-Sainte-Maxence]], ''La vie de saint Thomas Becket, poème historique du XIIe siècle{{s-|XII}} (1172-1174)'', 5656, Genève, Slatkine Reprints, 1969 ; « Cele grant heresie dedenz le saint mustier. »</ref>. Spécifiquement, il peut désigner une cohabitation genrée inappropriée et contraire aux lois de l'Église<ref>Frédéric Godefroy, ''Lexique de l'ancien français'', 1901, entrée « Hérésie », {{p.}} 461 ; ''[[Aiol|Aiol et Mirabel]]'', v. 187, {{s|XIII|e}}.</ref>.
 
== Dans le monothéisme ==
Les dogmes ne revêtent pas la même importance dans toutes les religions, ce qui explique différentes attitudes par rapport à ce qui est qualifié d'hérésie.
Certains auteurs estiment que la notion est trop intimement liée au contexte historique et religieux des premiers siècles du christianisme qui l'ont produites pour être transposée utilement à l'étude des dissidences et hétérodoxies des autres monothéismes<ref>Alain Le Boulluec, « Hérésie », dans R. Azria et D. Hervieu-Léger, ''Dictionnaire critique des faits religieux'', 2010.</ref>. Depuis les grands conciles œcuméniques des IV{{e}} et s2-|IV|V{{e}} siècles, l'Église aurait "fabriqué l'hérésie" afin de mieux asseoir son autorité, imposer son image de corps unique, enseigner une voie unique de salut et réussir ainsi à façonner le pouvoir et la société<ref>Parmi les auteurs soutenant cette thèse, citons Malcolm Lambert ''Medieval Heresy: Popular Movements from the Gregorian Reform to the Reformation '', B. Blackwell, 1992 ; Biller, Peter and Anne Hamilton (eds), ''Heresy and Literacy, 1000–1530'', Cambridge University Press, 1994.</ref>.
À la différence du christianisme, judaïsme et islam ne possèdent pas d'instrument de coercition centralisé ni de magistère dogmatique unique et identifié<ref>Mathieu Terrier, « L'hérésie: un concept transposable ? », ''Archives de sciences sociales des religions'', {{63e}} Année, No. 184 2018, pp{{p. |143-156}}.</ref>.
 
== Judaïsme ==
{{article détaillé|Responsa (judaïsme)|Herem|Minim|Karaïsme}}
[[Fichier:Shabbatai4.jpg|vignette|Le châtiment d'anciens [[sabbatéens]] à [[Salonique]], ''[[Jewish Encyclopedia]]''.]]
La littérature talmudique ne possède pas de notions similaires et de termes pour désigner les hétérodoxies comparables aux hérésies telles qu'elles ont été décrites dans le monde chrétien. Le judaïsme, n'ayant jamais connu d'orthodoxie au sens strict, les déviances aux normes rabbiniques ou aux treize principes de foi de [[Maïmonide]] ne sont pas équivalentes à des hérésies. Toutefois, après la destruction du [[Temple de Jérusalem|Temple]] ([[70]]), le mouvement [[pharisien]]/[[Tannaïm|tannaïte]] se donne peu à peu comme exclusif et majoritaire. Dans la littérature rabbinique, ses opposants sont alors désignés par divers termes techniques et notamment par celui de ''min''<ref name="Mimouni_Min">[[Simon Claude Mimouni]], ''Les Chrétiens d'origine juive dans l'Antiquité'', Paris, Albin Michel, 2004, § « La question du ''min'' », {{p.}} 60-71.</ref> et « il paraît donc possible de traduire ''min'' par hérétique, du moins pour le sens qu'il paraît avoir pris dès le {{s|I|}} de notre ère<ref name="Mimouni_Min"/>. » Le terme [[minim]] désigne à différentes périodes de l'ère rabbinique les divers groupes qui, tout en demeurant partie intégrante du [[judaïsme]] du point de vue de la [[halakha]], soulèvent des questions doctrinales pour le [[judaïsme rabbinique]]. Il ressort d'un certain nombre de restrictions édictées par les [[tannaim]] à l'encontre des minimes qu'elles visent dans un premier temps les judéo-chrétiens<ref>Simon Claude Mimouni, « La Birkat Ha-Minim : une prière juive contre les judéo-chrétiens », ''Revue des sciences religieuses'', 1997, 71-3, {{pp.}} 275-298.</ref>. Ces règlements montrent comment les rabbins ont tenté de combattre des doctrines qu'ils estimaient extérieures au judaïsme sans jamais rejeter la [[Identité juive|judéité]] de ceux qui les faisaient siennes<ref>M. Simon, ''Verus Israel. Étude sur les relations entre Chrétiens et Juifs dans l’empirel’Empire romain (135-425)'', Paris, 1983, {{p.}} 279-280 ; Lawrence H. Schiffman, « La réponse de la halakha à l'ascension du christianisme », ''Pardès'', 2003, {{n°}} 35, {{pp.}}13 à 30.</ref>. Cependant, comme le remarque Adiel Schremer, dans l'Antiquité, l'identité juive est bien une question de naissance et de fidélité à l'alliance mosaïque qu'un examen des doctrines et des pratiques<ref> {{en}} Adiel Schremer, « Thinking about Belonging in Early Rabbinic Literature: Proselytes, Apostates, and ‘Children of Israel,’ or : Does is Make Sense to Speak of Early Rabbinic Orthodoxy ? », ''Journal for the Study of Judaism'', 43, 2012, pp{{p. |249–275}}. </ref>.
 
== Christianisme ==
Les différentes autorités chrétiennes qui ont élaboré la norme religieuse ont conceptualisé l'hérésie. Cependant elle s'impose de l'Antiquité à l'époque moderne comme un concept extrêmement versatile et ambivalent. Dans le [[Nouveau Testament]], les formes ''hairesos'' ou ''hairéseis'' sont utilisées soit pour désigner le [[christianisme]] naissant comme « secte » ou « école juive »<ref>[[Actes des Apôtres]], [https://theotex.org/ntgf/actes/actes_24_gf.html XXIV, 5], « ''Ναζωραίων αἱρέσεω'' ».</ref> soit pour mettre en garde contre une dissension<ref>[[Paul de Tarse]], [[Épître aux Galates]], [https://theotex.org/ntgf/galates/galates_5_gf.html V, 20].</ref>. Au {{s-|I}}, ils demeurent des proches synonymes de ''schisma'' qui indique l'idée d'une scission, du risque d'un [[schisme]]. Lors de la période [[patristique]]<ref>[[Tertullien]], ''Traité de la prescription contre les hérétiques'', traduction d'[[Antoine-Eugène Genoud]], Paris, 1842 ; Jacques Fantino, ''La théologie d’Irénée. Lecture des Écritures en réponse à l’exégèse gnostique. Une approche trinitaire'', Cerf, Paris, 1994.</ref> et surtout à la faveur du règne de [[Constantin Ier (empereur romain)|Constantin]], les termes ''haeresis'' et ''haereticus'' deviennent sans conteste la condamnation de doctrinedoctrines erronéeerronées et de leurs partisans, d'permettant de stigmatiser une opinion hétérodoxe qui éloigne de la foi hétérodoxe[[wikt:canonique|canonique]]<ref>[[Eusèbe de Césarée]], (''[[Histoire ecclésiastique]] '', IV, 22) en donne une première généalogie.</ref>. AÀ la fin du {{s-|IV}} et après les grands conciles le terme devient équivalent d'[[hétérodoxie]]. Discours d'exclusion des dissidences, la réflexion sur l'hérésie est aussi l'occasion pour l'EgliseÉglise de définir des lignes de conduites et d'affirmer son unité<ref>[[Monique Zerner]], « Hérésies », dans ''Dictionnaire raisonné de l'Occident médiéval'', dir. [[Jacques Le Goff]], [[Jean-Claude Schmitt]], Paris, Fayard, 1998, {{p. |464-482}}.
</ref>.
 
À partir du {{s-|XI}}, l'extension progressive du domaine de l'hérésie à de nombreuses formes d'activités répréhensibles comme l'usure, la sorcellerie ou la rébellion politique a fini par lui conférer le statut de crime globalisant<ref>Monique Zerner (dir.), ''Inventer l’hérésie ? Discours polémiques et pouvoirs avant l’Inquisition'', Nice, 1998 ; Uwe Brunn, ''Des contestataires aux « Cathares ». Discours de réforme et propagande antihérétique dans les pays du Rhin et de la Meuse avant l’Inquisition'', Paris, Institut d’études augustiniennes, « Collection des études augustiniennes, série Moyen Âge et Temps modernes, 41 », 2006. ; Martine Ostorero, « Des papes face à la sorcellerie démoniaque (1409-1459): une dilatation du champ de l'hérésie ? » dans ''Aux marges de l'hérésie. Inventions, formes et usages'', 2018, {{p. |153-185}}.</ref>.
 
Cependant, comme l'a montré [[Walter Bauer]], les premières manifestations du christianisme correspondent à ce qui est qualifié d'hérétique à partir du deuxième siècle. Historiquement, l'hérésie est donc antérieure à l'orthodoxie<ref>Walter Bauer, ''Orthodoxie et hérésie aux débuts du christianisme'', Paris, Éditions du Cerf, coll. « Patrimoines – Christianisme », 2009, traduction de l'ouvrage de 1934, ''Rechtgläubigkeit und Ketzerei im ältesten Christentum''.</ref>.
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Le christianisme s'illustre en de multiples théologies et pratiques hétérodoxes, que ce soit dans le domaine [[christologique]] ([[docétisme]], [[arianisme]], [[nestorianisme]], [[monophysisme]]), [[cosmologique]] ([[gnose]], [[macédonianisme]], [[manichéisme (religion)|manichéisme]], et plus tard [[bogomilisme]], [[catharisme]]), ecclésial ([[marcionisme]], [[montanisme]], [[donatisme]]) ou disciplinaire ([[quiétisme]]).
 
Herbert Grundmann, parmi d'autres, distingue les hérésies populaires, qui ont parfois donné naissance à une Église dissidente (cathares), et les hérésies savantes, fondées sur les recherches théologiques, philosophiques ou scientifiques plus isolées ([[Pierre Abélard]]), non sans que des ponts puissent exister entre elles ([[Jan Hus]])<ref>{{Article |prénom1=Jean |nom1=Jolivet |titre=Hérésies et sociétés dans l'Europe pré-industrielle (XIe{{sp-XVIIIe siècles|XI|-|XVIII|s}}). Communications et débats du Colloque de Royaumont (27-30 mai 1962) présentés par Jacques Le Goff |périodique=[[Revue de l'histoire des religions]] |volume=178 |numéro=1 |date=1970 |lire en ligne=https://www.persee.fr/doc/rhr_0035-1423_1970_num_178_1_10308 |consulté le=2021-10-10 |pages=96–97 }}</ref>.
 
=== Premier millénaire ===
[[Fichier:Constantine burning Arian books.jpg|vignette|230px|L'empereur [[Constantin Ier (empereur romain)|Constantin {{Ier}}]] brûlant les livres ariens, manuscrit (v. 825), Bibliothèque capitulaire de [[Vercelli]]. Le texte indique : {{citation|''Sinodus Niceni u[bi?] [f?]ui[t?] numerus / s[an]c[t]o[rum] patr[um]. CCCXVIII. et omnes / subscrip/seru/n/t. Constantinus imp(erator). Heretici / Arriani / damnati''.}}]]
Le terme « hérésie » a pris une valeur péjorative et s'affirme avec force dans les controverses théologiques où s'illustrent [[Justin de Naplouse]] et [[Irénée de Lyon]] qui ont écrit « contre les hérésies » dès le {{s-|II}}. Ces apologistes, comme [[Méliton de Sardes]]<ref>Eusèbe de Césarée, ''[[Histoire ecclésiastique]]'', IV, 26, 7-11. </ref>ou Justin <ref>Justin de Naplouse, ''Apologie'', 12, 1.</ref> développent l'idée d'un appel au pouvoir pour défendre la vraie foi contre l'hérésie. Ils sont suivis au {{s-|III}} par [[Hippolyte de Rome]], sans lequel certaines hérésies seraient restées inconnues, mais dont l'ouvrage est ambigu, car celle qu'il réfute le plus violemment est celle de [[Calixte Ier]], représentant de ce que l'on devait appeler plus tard la [[Grande Église]]. Au {{s-|IV}}, les [[Empereur romain|empereurs romains]] prennent des mesures contre les hétérodoxes ou hérétiques, afin de limiter les querelles entre chrétiens. {{quote|L'intervention du pouvoir politique dans la mise en place de l'Eglise permet le triomphe de ce qui n'était encore qu'une tendance au sein du christianisme. De cette intervention, naissent les hérésies. Auparavant, ce ne sont que sectes disputant sur un pied d'égalité, le poids de la structure épiscopale étant d'autant moins déterminant qu'elle est divisée. Désormais, le gouvernement, selon les circonstances, choisit parmi les points de vue opposés ou impose son opinion<ref>Yvon Thebert, « À propos du "triomphe du Christianisme" », ''Dialogues d'histoire ancienne'', vol. 14, 1988. pp. 299.</ref>.}}
 
{{article détaillé|Premier concile de Nicée|Christianisme nicéen}}
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{{article détaillé|Édit de Thessalonique|Premier concile de Constantinople}}
Ce symbole est complété en 381, lors du [[premier concile de Constantinople]] convoqué par [[Théodose Ier]], empereur de l'empireEmpire romain d'Orient, par une précision sur la nature du [[Saint-Esprit]] qui rejette le [[macédonianisme|pneumatomachisme]]. Un [[Édit de Thessalonique|décret]] exige de tous les sujets de Constantinople qu'ils souscrivent à la croyance en la Trinité du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Cet édit définit l'orthodoxie chrétienne et met fin à un grand et vif débat sur la nature de Dieu ; toutes les autres conceptions sont désormais déclarées hérétiques (« ''haeretici dogmatis<ref>[[Code théodosien]], 16.1.2.</ref>'' »)<ref>{{en}} Charles Freeman, ''AD 381: Heretics, Pagans and the Christian State'', Pimilco, 2009.</ref>. Si ces conciles ont un rôle de normalisation de la [[foi chrétienne]], ils changent aussi le visage de la chrétienté en légitimant la centralisation du pouvoir ecclésiastique organisé par le pouvoir impérial. Quiconque professe une théologie hérétique pèche contre l’unité de l’Église et devient passible d’anathème ou d'[[excommunication]]<ref>[[Raoul Vaneigem]], ''La Résistance au christianisme. Les hérésies des origines au {{s-|XVIII}}'', 1993.</ref>. Dans la pratique, la lutte contre les hérésies revêt plusieurs formes, rarement violentes, du moins au début. Les plus communes sont la [[catéchèse]], la [[prédication]] notamment au cours des [[messe]]s, et souvent l'argumentation et la « disputation »<ref>[[Hans Conzelmann]], ''Grundriss der Theologie des Neuen Testaments'', « 38 : Orthodoxie und Häresie », Chr. Kaiser Verlag, München, 1967, {{p. |330-331}}.</ref>.
 
L'hérésiologie trouve sa synthèse au début du {{s-|V}} chez [[Épiphane de Salamine]] et son généalogique ''[[Panarion]]'', « remèdes contre le poison de l’hérésie » et chez [[Théodoret de Cyr]], plus dogmatique, et son ''Histoire des hérésies'' (''Haereticarum fabularum compendium'')<ref>Helen Sillett , « Orthodoxy and heresy in Theodoret of Cyrus' Compendium of heresies », Collection de l'École française de Rome, 270, {{p. |261-273}} </ref>.
 
Sous la [[dynastie théodosienne]], l'hérésie est combattue au nom d'une orthodoxie impériale qui revendique l'[[Auctoritas principis|autorité]] et veut maintenir le consensus religieux. Elle se définit et est condamnée dans un corpus juridique et théorique qui l'affilie au crime (''scelus'') et au [[sacrilège]] (''sacrilegium'')<ref>[[Charles Pietri ]], ''Roma christiana. Recherches sur l'Église de Rome, son organisation, sa politique, son idéologie, de Miltiade à Sixte III'', Paris-Rome, Bibliothèque des Écoles françaises d'Athènes et de Rome, 1976; ''Ibidem'', « L’hérésie et l’hérétique selon l’Église Romaine », ''Augustinianum'' 25 (3), 1985.</ref>. C'est sur cette tradition que s'appuie le pouvoir carolingien pour condamner et réprimer les dissidences religieuses qui sont pour les pouvoirs publics autant de crime de lèse-majesté<ref>{{de}} Nicole Zeddies, ''Religio et sacrilegium. Studien zur Inkriminierung von Magie, Häresie und Heidentum'', Frankfurt am Main, Lang, 2003 ; Geneviève Bührer-Thierry (dir.), ''Exclure de la communauté chrétienne : sens et pratiques sociales de l'anathème et de l'excommunication (IVe{{sp-XIIe siècle|IV|-|XII}})'', Brepols, 2015.</ref>.
 
Avec le [[pélagianisme]], théorisé par [[Julien d'Éclane]] et dénoncé dès le début du {{s-|V|e}} par [[Augustin d'Hippone]]<ref>Peter Brown, ''La Vie de saint Augustin'', (1967), Le Seuil, 2001.</ref>, l'[[Empire romain d'Occident|Occident]] connaît sa première doctrine jugée comme hérétique par les grands conciles œcuméniques, doctrine qui devait connaître une grande fortune tout au long du Moyen Âge<ref>Winrich Löhr, ''Pélage et le pélagianisme'', Publications de l’École Pratique des Hautes Études, 2021.</ref>. Cependant, au Haut Moyen Âge, exception faite du mouvement [[Adoptianisme|adoptianiste]] de la péninsule ibérique contrôlée par les Omeyyades et d'un [[Élipand]] de Tolède<ref>{{en}} John C. Cavadini, ‘’The Last Christology of the West : Adoptionism in Spain and Gaul, 785–820’’, Philadelphia: University of Pennsylvania Press, 1993.</ref>, de l'hérésie félicienne de [[Félix d'Urgell]] et du saxon [[Gottschalk d'Orbais]], partisan d'une prédestination totale, les hérétiques identifiés et reconnus comme tels sont très rares dans les sources.
 
=== De l'an mil au {{s-|XIII}} ===
En Occident, les {{s2|XI|XII|}} sont une période de vigilance accrue à l'égard de l'hérésie, marquée par des combats plus violents, plus centralisés et par prolifération de traités antihérétiques<ref>Dominique Iogna-Prat, ''Ordonner et exclure : Cluny et la société chrétienne face à l'hérésie, au judaïsme et à l'islam, 1000-1150'', Paris, Aubier, 2000.</ref>. Dans « une société persécutrice », selon la formule de l'historien Robert Moore, l'erreur doctrinale est de plus en plus criminalisée et taxée d'hérésie<ref>{{en}} R. I. Moore, ''The Formation of a Persecuting Society: Authority and Deviance in Western Europe 950–1250'', 2{{e2e}} edition, Blackwell, 2007.</ref>.
 
{{article détaillé|Hérésies du XIe siècle en Occident}}
La [[réforme grégorienne]], en mettant l'accent sur la supériorité du spirituel par rapport au temporel, suscite dans de nombreuses régions un [[anticléricalisme]] virulent qui favorise la recrudescence des hérésies, les laïcs étant notamment sensibles aux discours dénonçant l'enrichissement du clergé à leur détriment, l'indignité morale des clercs ou l'insuffisance de leur zèle pastoral<ref>{{ouvrage|auteur=Jean-Marie Mayeur, Marc Venard, Luce Pietri, André Vauchez|titre=Histoire du christianisme|éditeur=Fleurus|date=1193|passage=461}}</ref>. Ainsi, les adversaires désignés comme hérétiques étaient le plus souvent animés par le désir de réformer en profondeur l'institution ecclésiastique, de la ramener à ses valeurs premières, au premier rang desquelles la pauvreté, en vue du salut. C'est ainsi le cas des mouvements [[Mouvement vaudois|vaudois]] ou [[dolcinien]]. Après le {{s|XIV|e}}, les mouvements religieux prônant la pauvreté volontaire devaient systématiquement être condamnés pour hérésie, étant perçus comme une menace à l'ordre social<ref>Tadeusz Manteuffel, ''Naissance d'une hérésie, les adeptes de la pauvreté volontaire au Moyen Âge'', École pratique des Hautes Études, Paris, 1970.</ref>.
 
Au {{s-|XI}}, les dissidences religieuses sont empreintes d'un refus de la matérialité (procréation, Incarnation, nourriture carnée), de l'inégalité matérielle et de pratique considérées comme idolâtres. Elles témoignent d'une même anxiété et d'une quête de pureté matérielle et ecclésiale face aux troubles du temps, aux transformations de la société médiévale et à l'affirmation, parfois brutale, de la féodalité<ref>Hilário Franco Júnior, « Les « abeilles hérétiques » et le puritanisme millénariste médiéval », ''Le Moyen AgeÂge'', vol. cxi, {{ |1}}, 2005, pp{{p. |71-93}}.</ref>.
 
[[Fichier:Robert le Pieux - Grandes Chroniques de France - BNF Fr2609 f144v.jpg|vignette|230px|[[Robert II de France|Robert le Pieux]] à l’office dans la [[cathédrale Sainte-Croix d'Orléans|cathédrale d’Orléans]]. [[Robinet Testard]], ''[[Grandes Chroniques de France]]'', v. 1471.]]
Au-delà, les hérétiques sont ceux qui prétendent pouvoir parvenir à la connaissance de la vérité religieuse de leur propre chef sans une soumission fidèle aux enseignements de l'Écriture ou de l'autorité ecclésiale. Cependant l'Église les qualifie d'hérétiques, en référence à la littérature hérésiologique des premiers siècles, qui visait des systèmes d'un tout autre ordre<ref> [[Jean-Louis Biget]], « Contestations et hérésies (XIe{{sp-XVe siècles|XI|-|XV|s}}) », dans [[Alain Tallon]] et Catherine Vincent (dir.), ''Histoire du christianisme en France'', « Histoire », Armand Colin, Paris, 2014, {{p.}} 115-138.</ref>. Ainsi l'[[hérésie d'Orléans]] en [[1022]] implique l'élite cléricale orléanaise<ref>{{Chapitre|id=BAUT|langue=fr|prénom1=Robert-Henri|nom1=Bautier|lien auteur1=Robert-Henri Bautier|directeur1=oui|titre chapitre=L'hérésie d'Orléans et le mouvement intellectuel au début du {{s-|XI|e}}. Documents et hypothèses|titre ouvrage = Actes du {{95e|congrès}} national des sociétés savantes. Reims 1970. Section philologie et histoire jusqu'à 1610|tome=I : enseignement et vie intellectuelle|lieu=Paris|année=1975|passage =63-88 |résumé=https://www.persee.fr/doc/bsnaf_0081-1181_1972_num_1970_1_7982}}. </ref>. Ils sont brûlés comme hérétiques sur ordre de [[Robert II de France|Robert le Pieux]], ce qui en fait le premier [[bûcher]] de la [[chrétienté]] médiévale. Tant par la sévérité du châtiment que par la qualité intellectuelle des accusés, l'affaire d'Orléans, procès d'une « hérésie savante », est un cas singulier au sein du « [[Hérésies du XIe siècle en Occident|printemps des hérésies]] »<ref>{{Article |langue=fr |prénom1=Richard |nom1=Landes |titre=La vie apostolique en Aquitaine en l'an mil. Paix de Dieu, culte des reliques, et communautés hérétiques |périodique=Annales Économies, Sociétés, Civilisations |volume=46 |numéro=3 |date=1991 |doi=10.3406/ahess.1991.278965 |lire en ligne=http://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1991_num_46_3_278965 |pages=579}}</ref> que semble constituer le {{XIe siècle}}.
 
Du milieu du {{s-|XI|e}} jusqu'à la deuxième décennie du {{s-|XII|e}}, période marquée par un grand nombre de réformes d'inspiration apostolique, on ne compte que peu de manifestations proprement hérétiques en Occident, ce qui a conduit à penser à un véritable « vide » hérétique<ref>Christine Thouzellier, ''Hérésie et hérétiques : Vaudois, Cathares, Patarins, Albigeois'', Rome, 1969 ; Guy Lobrichon, « Le culte des saints, le rire des hérétiques, le triomphe des savants », dans ''Les reliques. Objets, cultes, symboles'', sous la direction d'Edina Bozóky et Anne-Marie Helvétius, Brepols, 1999. </ref>. C'est à la faveur de ces réformes multiples que naît le mouvement de la [[Pataria]] au sein du clergé milanais avant de s'étendre au petit peuple urbain italien puis français et néerlandais. Ce mouvement diffus qui refuse les sacrements délivrés par des clercs corrompus ou indignes, glisse progressivement vers l'hérésie avant de s'affirmer comme une hétérodoxie majeure avec [[Pierre de Bruys]], [[Henri de Lausanne]] et [[Arnaud de Brescia]]. Ces contestations du clergé s'accompagnent souvent d'une remise en cause ecclésiologique, d'une négation de certains sacrements, à commencer par le baptême des enfants et d'une affirmation de la seule autorité de l'Evangile. Chez Brescia, la condamnation des possessions terrestres du clergé devait marquer par son évangélisme radical les mouvements des Pauvres lombards et des [[Mouvement vaudois|Pauvres de Lyon]]. Dès le milieu du {{s-|XII|e}}, Bonn et Cologne, puis Liège sont les foyers d'un mouvement hérétique radical, connu dans l'historiographie sous le nom d'hérétiques rhénans, qui reprennent les thèmes du siècle en prônant pauvreté volontaire, refus des biens matériels, mépris des sacrements et de la hiérarchie ecclésiale. Dans le même temps, les sources font état de constitution d'hétérodoxies dualistes ou néomanichéennes, plus structurées, du Milanais jusqu'au Languedoc, qui devaient donner naissance au mouvement albigeois<ref>Christine Thouzelier, ''Hérésie et hérétiques: Vaudois, Cathares, Patarins, Albigeois'', Rome, Edizioni di Storia Letteratura, 1969.</ref>. Durant le dernier quart du siècle, c'est l'hérésie développée par [[Pierre Valdès]] à Lyon qui inquiète très sérieusement la curie romaine. En 1184, le pape [[Lucius III]] réunit conjointement avec l'empereur un [[concile de Vérone|concile]] qui condamne les hérésies nouvelles - « Cathares et Patarins et ceux qui se considèrent Humbles ou Pauvres de Lyon<ref> Concile de Verone. Decretale ''Ad abolendam diversarum haeresium pravitatem'' du {{date|4 novembre 1184}}, dans Giovanni Gönnet, ''Enchriridion fontium valdensium'', Torre Pellice, 1958, pp{{p. |50-53}}.</ref> » - et toutes formes de prédications n'ayant pas été reconnues par l'autorité romaine. Une [[Inquisition médiévale|inquisition]] d'une grande rigueur mais circonscrite à la législation des évêques et confiée au bras séculier est instituée par la bulle ''[[Ad abolendam]]''<ref>Christine Thouzellier « L'''inquisitio'' et saint Dominique », ''Annales du Midi'', 1968 ; {{en}} Edward Peters, ''Heresy and Authority in Medieval Europe'', University of Pennsylvania Press, 2011.</ref>. C'est dans le Languedoc que la papauté, en la personne d'[[Innocent III]], décide d'organiser une intervention militaire d'ampleur contre l'hérésie en 1209.
 
=== La lutte contre l'hérésie aux {{s2|XIII|XIV|e}} ===
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[[Fichier:Burning-of-a-heretic--_Sassetta--Melburn_museum.jpg|vignette|droite|redresse=1|''Le Bûcher d'un hérétique'', par [[Sassetta (peintre)|Sassetta]] (1430-1432), [[National Gallery of Victoria]], [[Melbourne]].]]
Au début du {{s|XIV|e}}, toute la chrétienté est ébranlée par un profond débat sur la pauvreté de l'Église. Suscité par la querelle des spirituels chez les [[Ordre des Frères mineurs|franciscains]], il provoque un déchirement en leur sein même, l'ordre des Frères mineurs se divisant entre conventuels et spirituels. Le conflit s'accentue après [[1274]] lors de la reconnaissance de l'ordre, face à l'hostilité de la papauté envers les spirituels et leur pratique intransigeante de la [[pauvreté évangélique]] et leur refus de toute forme de propriété. Du courant des spirituels émerge le mouvement dissident des [[Fraticelles]] très influencés par le millénarisme de [[Joachim de Flore]] et susceptibles de contester l'autorité d'une hiérarchie accusée d'être indigne de l'idéal évangélique<ref>Malcolm D. Lambert, ''Franciscan Poverty. The Doctrine of the Absolute Poverty of Christ and the Apostles in the Franciscan Order, 1210-1323'', Londres, 1961</ref>. Ils sont poursuivis et déclarés hérétiques dès 1311 par la bulle ''Cum inter nonnullos'' qui rejette comme hérétiques les thèses affirmant que le Christ et ses apôtres n'ont jamais rien possédé, ni en propre ni en commun. Les bulles du {{date|30 décembre 1317}} et du {{date|23 janvier 1318}}, confirment leur excommunication. Benoît XII renouvèle la condamnation des Fraticelles en 1336. Désormais persécutés, ils se maintiennent cependant à Naples, en Sicile et en Arménie jusqu'au dernier quart du XVe siècle{{s-|XV}}.
 
Tout au long du {{s|XIV|e}}, les autorités politiques et religieuses sont conscientes de la vigueur des hérésies anciennes et nouvelles nées d'une forte intériorité du sentiment religieux<ref>Jean-Marie Mayeur, André Vauchez, Luce Pietri, Marc Venard, ''Un temps d'épreuves (1274-1449)'', ''Histoire du christianisme'', t.6, 1990.</ref>. Ainsi dans le monde anglais la persistance d'un [[Lollards|lollardisme ]] tardif et l'émergence du [[John Wyclif|wycliffisme]] impose une répression suivie et systématique<ref>Ian Forrest, ''The Detection of Heresy in late Medieval England'', Oxford University Press, 2005.</ref>.
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Au {{s|XVI|e}}, avec le déploiement d'une l'Inquisition d'État en [[Inquisition espagnole|Espagne]] et à [[Inquisition romaine|Rome]], l'essor de la [[Réforme protestante|Réforme]] et le succès du principe « ''[[cujus regio, ejus religio]]'' », les dynamiques de la dissidence sont considérablement modifiées.
 
Dans le royaume de France, la répression de l'hérésie devient pour bonne part l'affaire du pouvoir temporel, qui s'y exerce avec une ardeur [[Gallicanisme|gallicane]]<ref>{{en}} William Monter, ''Judging the French Reformation - Heresy trials by sixteenth century Parlements'', Harvard University Press, 1999.</ref>. L'[[édit de Compiègne]] (1557) est sans appel pour la plupart des manifestations d'hérésie, passibles de peine de mort et même d'exécutions sommaires<ref>Alain Tallon, « Inquisition romaine et monarchie française au XVIe siècle{{s-|XVI}} », ''Inquisition et pouvoir'', 2002, Aix-en-Provence, France. {{p. |311-323}}. </ref>.
 
=== Époque contemporaine ===
 
Le décret ''[[Unitatis Redintegratio]]'' du [[concile Vatican II]] sur l'[[œcuménisme]] opère un changement de forme important. Les termes {{citation|hérétiques}} ou {{citation|schismatiques}} ne doivent plus être utilisés, au profit de {{citation|frères séparés}}. L'Église reconnaît que les fautes responsables des scissions au cours de l'histoire ont pu être commises par des catholiques. Elle considère que le [[mouvement œcuménique]] est inspiré par l'[[Esprit Saint]]<ref>{{article|url=https://dial.uclouvain.be/pr/boreal/fr/object/boreal%3A162854|titre=Les décrets Unitatis redintegratio et Orientalium Ecclesiarum|sous-titre=Quels enjeux pour aujourd'hui?|auteur=Joseph FAMERÉE Famerée|année=2015|périodique=Revue théologique de Louvain|id=Famerée 2015}}, {{p. |5}}</ref>.
 
En 1992, le ''[[Catéchisme de l'Église catholique]]'' définit l'hérésie comme « la négation obstinée, après la réception du [[baptême]], d’une vérité qui doit être crue de foi divine et catholique, ou le doute obstiné sur cette vérité »<ref>[http://www.vatican.va/archive/FRA0013/_P77.HTM Catéchisme de l'Église catholique, {{n°|2089}}] ; ''Code de droit canonique'', III, 751, 1983.</ref>.
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== Islam ==
{{article détaillé|Division du monde dans l'islam}}
Contrairement au christianisme, l'islam n'a jamais eu une seule autorité d'enseignement dogmatique servant de référence à la majorité des croyants. Les concepts d'orthodoxie, d'hétérodoxie et d'hérésie, qui sont apparus dans le monde chrétien, ne s'appliquent que partiellement et de manière très relative à l'Islam. Il existe une doctrine que l'on peut qualifier de majoritaire, le [[sunnisme]], qui prétend être la " conception correcte " en matière de religion et qui condamne les autres doctrines comme étant infidèles (''[[kufr]]''), déviantes (''[[zandaqa]]'') ou novatrices (''[[bidʻah]]''). Cependant, les différentes tendances minoritaires n'ont pas toutes été assimilées ou rejetées et ont pu définir leur propre personnalité<ref>Mathieu Terrier, « Hérésie [islam] », ''Dictionnaire des faits religieux'', sous la direction de Régine Azria, Danièle Hervieu-Léger et Dominique Iogna-Prat PUF, 2019, {{p. |511-516}}, {{p. |504-518}}</ref>.
 
Le mot [[arabe]] proche de la notion d'hérésie est ''bidâa'', c'est-à-dire « innovation ». Un [[hadith]] jugé authentique met en garde les [[musulman]]s contre toute forme d'« innovation ». Toutefois, cette notion diffère selon les écoles, mais de façon générale, la signification de ''bidâa'' tend vers le superflu, vers ce qui n'existait pas au temps du [[Mahomet|Prophète]].
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Dans l'islam, des savants ont été condamnés pour hérésie, comme [[Averroès]], exposé et humilié à [[Cordoue]], puis exilé.
 
== BibliographieVoir aussi ==
=== Bibliographie ===
* [[Jean-Louis Biget]], ''Hérésie et inquisition dans le midi de la France'', Paris : Picard (Les médiévistes français), 2007.
* Ephrem Boularand, ''L'hérésie d'Arius et la « foi » de Nicée'', Paris, Letouzey et Ané, 1972.
* [[Alain Le Boulluec]], ''La Notion d'hérésie dans la littérature grecque'', 2 tomes, Paris, Études augustiniennes, 1985.
* {{en}} Caterina Bruschi et Peter Biller, ''Texts and the Repression of Medieval Heresy'', York, Medieval Press, 2003.
* [[Marie-Dominique Chenu]], « Orthodoxie et hérésie. Le point de vue du théologien », ''Annales. Économies, sociétés, civilisations.'', 18ᵉ{{18e}} année, {{n°}} 1, 1963. {{pp.}} 75-80.
* Susanna Elm, Éric Rebillard, Antonella Romano, ''Orthodoxie, christianisme, histoire'', École française de Rome, 2000.
* {{it}} Barbara Garofani, ''Le eresie medievali'', Roma, Carocci editore, 2008, 145 p.
* Pierre de Meuse, ''Histoire des hérésies'', Trajectoire, 2010.
* [[Robert I. Moore]], ''Hérétiques. Résistances et répression dans l'Occident médiéval'', trad. par Julien Théry, Paris, Belin, [2012] 2017.
* Julien Théry, [https://www.academia.edu/499340/_Les_h%C3%A9r%C3%A9sies_du_XIIe_au_d%C3%A9but_du_XIVe_si%C3%A8cle_dans_Structures_et_dynamiques_de_la_vie_religieuse_en_Occident_1179-1449_ed._Marie-Madeleine_de_Cevins_Jean-Michel_Matz_Rennes_PUR_2010_p._373-386 « Les hérésies, du XII{{eXIIe}} au début du XIV{{eXIVe}} s. », dans ''Structures et dynamiques de la vie religieuse en Occident (1179-1449)'', dir. Marie-Madeleine de Cevins, Jean-Michel Matz, Rennes : PUR, 2010, {{p.}}373-386, lire en ligne]
* {{Article|auteur=Huguette Taviani|titre=Naissance d'une hérésie en Italie du Nord au {{s-|XI}}|périodique=Annales. Économies, Sociétés, Civilisations|volume=29ᵉ année|numéro=5|date=1974|pages=1224-1252|lire en ligne=https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1974_num_29_5_293550}}
* [[André Vauchez (historien)|André Vauchez]], * « L’historiographie des hérésies médiévales », dans ''L’Ogre historien. Autour de Jacques Le Goff'' (sous la dir. de J. Revel et J.-C. Schmitt), Paris, 1998, {{p. |243-258}}.
* André Vauchez, ''Les Hérétiques au Moyen Âge. Suppôts de Satan ou chrétiens dissidents ?'', CNRS, 2014.
* André Vauchez, ''Le Moyen Âge des hérétiques'' dans ''Les collections de l’Histoire'', janvier-{{date-|mars 2005}}.
* [[Monique Zerner]] (dir.), ''Inventer l'hérésie ? Discours polémiques et pouvoirs avant l'Inquisition''. Actes de la table ronde tenue en janvier 1996 (Séminaires de l'Université de Nice de 1993 à 1995), Centre d'Études médiévales de Nice, Brepols, 1998.
 
== Notes et références ==
{{Références}}
 
== Voir aussi ==
{{Autres projets|wiktionary = hérésie}}
 
=== Articles connexes ===
{{Autres projets|wiktionary = hérésie}}
* [[Apostasie]]
* [[Arianisme]]
Ligne 167 ⟶ 163 :
* [[Schisme]]
* [[Secte]]
 
* [[Confessions du christianisme]]
* [[Christianisme non confessionnel]]
 
=== Liens externes ===
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== Notes et références ==
{{références nombreuses|taille=30}}
 
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