« Bishnoïs » : différence entre les versions

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Les '''Bishnoïs''' ({{lang-hi|बिश्नोई}}), ou ''Vishnoï'' (de ''bish'', « vingt » et ''noï'', « neuf » en rajasthani, une forme dialectale de l'[[hindi]]), sont les membres d'une communauté [[vishnouisme|vishnouïte]] surtout présente dans l'État du [[Rajasthan]], majoritairement dans les régions de [[Jodhpur]] et de [[Bîkâner]], et dans une moindre mesure dans l'État voisin de l'[[Haryana]] en [[Inde]]. Elle a été créée par le [[guru (maître spirituel)|guru]] [[Jambeshwar Bhagavan]], appelé communément ''Jambaji'' ([[1451]]-[[1536]]).
 
Les Bishnoïs sont des [[hindouisme|hindous]] [[vishnouisme|vaishnav]] qui suivent vingt-neuf principes édictés par leur gourou (d'où leur nom). Ils se caractérisent par leur [[végétarisme]], leur respect strict de toute forme de vie (non-violence, ''[[ahimsâ]]''), leur protection des animaux et des arbres, leur tenue vestimentaire particulière<ref name=gdr/>. On les définit souvent comme ayant une forte conscience [[écologie|écologique]]. Les Bishnoïs vivaient paisiblement dans des villages isolés loin des centres de peuplement, mais depuis une dizaine d'années, ils sont de plus en plus nombreux à vivre en ville. Ils seraient environ {{formatnum:700000}} dans l'ouest de l'Inde. Ce sont les rares hindous à enterrer leurs morts, du fait du bois vert (venant d'un arbre vivant, non mort) qu'il faudrait couper pour la [[crémation]]<ref>[[Irène Frain]], ''La Forêt des vingt-neuf'', [[Michel Lafon]], 2011 455 pages {{ISBN|9782749913605}}.</ref> (les [[sadhu]]s [[vaishnava|vishnouites]], eux non plus, ne sont pas brûlés après leur mort, mais enterrés, généralement en position assise ; le site où ils sont enterrés devient un endroit sacré<ref name=lhi>''L'Hindouisme, une introduction'', Dharam Vir Singh, éditions ''Surabhi Prakash''</ref>).
 
La gazelle indienne, ou ''chinkara'' (''[[Gazella bennettii]]''), est particulièrement vénérée par les Bishnoïs, leur maître [[Jambeshwar Bhagavan]] ayant déclaré qu'il se réincarnerait indéfiniment en ''chinkara'' après sa mort (dans la même région vivait la [[sadhu|sadhvi]] [[Karni Mata]], qui selon ses dévots se manifeste en [[rat]]s blancs avec le reste de sa famille). La présence de la ''chinkara'' signale souvent un village ou un temple proche de la communauté, où on la trouve communément déambulant en toute confiance entre les maisons. Il arrive souvent encore de nos jours que les femmes bishnoïes allaitent les faons orphelins de cette espèce ou de l'[[antilope cervicapre]] qui est également un animal caractéristique du [[désert du Thar]], où vivent de nombreux membres de la communauté bishnoïe.
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*''Shahad'' 6 : ''utpatti hindu, jarna jogi, kirya brahmin, dil darvesa, un mun mulla, akal misalmani'', « On peut prendre naissance en tant que Hindou : et être un [[yogi]] par l'endurance, être un [[brahmane]] par des œuvres pures, sacrées, être un [[derviche]] ([[sadhu|ascète]]) par le cœur pur, être un [[mollah]] par la retenue du moi et par des pensées religieuses, et être un vrai [[musulman]] par l'intellect et en suivant les enseignements du [[prophète]]. » (ce verset signifie que notre statut vient de nos actes que l'on choisit, et non de la [[caste]]/[[famille]] dans laquelle nous avons pris naissance) <ref name="Bishnoi Online Shabad, Read Bishnoi Shabad, Enjoy listening bishnoi Shabad online"/>
 
*''Shahad'' 9 : ''jîva upper jor karije, antikal hoysi bharu'', « si tu exprimes ta force en molestant les animaux, la fin de ta vie sera douloureuse ».
 
*''Shahad'' 10 : ''re binhi gunhe jîv kyon maro'', « pourquoi est-ce que tu tues les animaux qui sont innocents ? ».
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[[Fichier:बिश्नोई मन्दिर मुक्तिधाम मुकाम-नोखा, बिकानेर, राजस्थान 2014-02-08 23-08.jpeg|vignette|Temple bishnoi ''Muktidhâm mukâm-nokha'', [[Bikaner]], [[Rajasthan]].]]
Ces préceptes (''niyam'') édictés par '''Jambhéji''' en [[1485]] sont les fondements, les pratiques et les fins de cette branche (''sampradaya'') de l'[[hindouisme]]. Suivre avec fidélité ces 29 commandements permet à l'adepte du bishnoïsme de se libérer définitivement du cycle des naissances (''samsâra'') et des morts en atteignant le ''Moshka'', s'il y a Grâce de la part du Seigneur [[Vishnou]].
 
Les 29 commandements ont donné naissance au nom bishnoï : « bish », comme vingt, en [[hindi]], et « noï », neuf.
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# Ne jamais se livrer aux inutiles et excessives discussions, débats, disputes, controverses.
# [[Jeûne|Jeûner]] lors de la [[nouvelle lune]] (''amavas'').
# Réciter les noms saints de [[Vishnou]] avec adoration (pratique du [[Bhakti yoga]], afin d'éliminer les ''ajar'').
# Être compatissant envers tous les êtres vivants (''dayā bhūteṣu'').
# Ne pas détruire les arbres verts (c'est-à-dire non morts).
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# Ne pas consommer du [[tabac]] et ses dérivés.
# Ne pas consommer ni vendre du [[cannabis]].
# Ne pas boire ni vendre de [[boisson alcoolisée]].
# [[Végétarisme|Ne pas manger de viande ou d'autres aliments non-végétariens]] (afin d'épargner, sauver les animaux innocents et parce que tuer pour le plaisir est un péché : c'est le « [[végétarisme]] indien », excluant la zoophagie (viande bovine, de poissons{{etc.}}) et la consommation d'[[Œuf (cuisine)|œuf]]s : manger de la viande est considéré comme le « premier des [[terrorisme]]s »<ref>http://www.bishnoism.com/bishnoi_bhajan/bhajan2.php</ref>).
# Ne pas utiliser de vêtements teints avec la couleur [[bleu|bleue]] issue des végétaux (en Inde antique, cette couleur était obtenue grâce à un arbre sauvage, l'[[indigo]], et c'est aussi la couleur symbolique de la mort et du ''[[Tamas (sanskrit)|tamas]]'', – l'un des trois gunas).
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[[Image:Cenotaph of Khejarli.jpg|right|250px|vignette|[[Cénotaphe]] de Khejarli, en l'hommage aux Bishnoïs assassinés (Kherjali).]]
 
La confrontation entre le reste de la société indienne et la communauté bishnoïe a parfois pris une tournure dramatique.
 
Les Bishnoïs entretiennent ainsi le souvenir du massacre de 1730, lorsque le [[mahârâja]] Ajit Singh de [[Jodhpur]] envoya des coupeurs de bois (ses soldats) dans les villages aux alentours, pour couper les gros arbres, notamment les ''khejri'', parmi les plus fameux arbres du [[désert]] : il avait besoin de bois pour alimenter ses fours à chaux dans le cadre d'un vaste chantier de rénovation de son palais.
 
Ses hommes se rendirent sur les terres bishnoïes pour abattre des arbres : les Bishnoïs sortirent de leur village, et leur demandèrent de ne pas couper les arbres, expliquant que c'était contraire à leurs préceptes religieux<ref name=gdr/>.
 
Le maharadja confirma son ordre et les soldats se mirent à couper ; et une femme de la communauté, ''Amrita Dévi'', ainsi que ses filles et d'autres femmes, s'interposèrent pour leur interdire cet abattage, entourant chacune un arbre de leurs bras<ref name=gdr/>.
 
Puis hommes, vieillards, jeunes suivirent l'exemple des femmes. Tous prirent un arbre à bras le corps ; et les soldats coupèrent, mutilèrent, sans distinction, les arbres et les Bishnoïs<ref name=gdr/>. 363 personnes furent ainsi massacrées pour avoir tenté de protéger les arbres.<ref>op. cit. {{Harvsp|Le Floc'h&Aronson|2013|p=286}}.</ref> .
 
Le roi de [[Jodhpur]], ayant appris l'étendue du massacre, honora le courage des Bishnoïs en ordonnant que les zones qu'ils habitaient deviennent sacrées et qu'en ces lieux nul étranger à leur religion ne manque de respect à leurs 29 commandements, mais y obéisse sans tergiverser en ne tuant ni animaux ni arbres (dans les villes saintes de l'[[hindouisme]] et du [[jaïnisme]], et dans les forêts sacrées ou bois où vivent des communautés de [[sadhu]]s (ascètes, ermites), il est interdit à quiconque de chasser, de blesser ou d'assassiner des créatures, animaux, arbres<ref name="lhi" />).
 
Les Bishnoïs enregistrent leur généalogie et cette sorte d'état-civil leur a permis de constituer la liste nominative de toutes les victimes du massacre (noms, lignées, liens de parenté, villages d'origine).
 
Cet épisode de l'histoire indienne inspira peut-être au {{s-|XX}} l'action du [[Mouvement Chipko]]<ref>{{lien web |titre=Amrita devi |url=https://www.youtube.com/watch?v=v0d2m0O6ZOM |format=vidéo |site=[[YouTube]] |consulté le=25-08-2020}}.</ref>, groupes de villageois opposés à l'exploitation commerciale des forêts. En réalité, déraciner les plantes et abattre des arbres sont également des fautes (contraires à l'[[ahiṃsā]]) chez les [[jaïn]]s et d'autres [[hindouisme|hindous]] ; de plus, de nombreux types d'arbres et de végétaux ([[Figuier des banians|banyan]], [[Basilic (plante)|tulsi]]) sont sacrés et vénérés par de très nombreux hindous. [[Friedrich Nietzsche|Nietzsche]] rappelle dans son cours ''Le Service divin des Grecs'' que vénérer des arbres ([[dendrolâtrie]]) est une pratique ''commune à l'ensemble de l'humanité'' lors de la [[préhistoire]] et pendant l'[[antiquité]], les arbres étant les « premiers [[temple]]s (…) où logeaient l'esprit des [[divinité]]s »<ref>''Le Service divin des Grecs : antiquités du culte religieux des Grecs, cours de trois heures hebdomadaires, hiver 1875-76'' par Friedrich Nietzsche ; traduction, introduction et notes d’[[Emmanuel Cattin]], Paris : l’Herne, cop.1992, {{ISBN|2851976001}} ; [Le culte des arbres est] {{citation|un élément pré-germanique, pré-slave, pré-grec – la religion à laquelle les tribus nomades indo-européennes se heurtèrent : et c’est pourquoi on le trouve partout. [Ce culte peut prendre trois niveaux, selon les peuples adorateurs :] incarnation réelle, lieu visité par les dieux, lien idéal – [qui] passent facilement l’un dans l’autre. Pour l’Hélène, le Latin, (…) l’Indien, le Germain, les premiers temples ont été des arbres où logeaient l’esprit des divinités, où il avait commerce avec eux et révélait sa volonté par des présages et des oracles.}}.</ref>.
 
Des bishnoïs sont toujours tués aujourd'hui, car ils n'hésitent pas à s'interposer physiquement pour sauver une vie animale menacée par des chasseurs ou des braconniers.