Bushinengue

peuples descendants d'esclaves africains emmenés au Suriname pour travailler dans les plantations
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Les Bushinengués (de Bushi Nenge en sranan, dérivé de Bos Negers en néerlandais et Bush Negroes en anglais, littéralement « nègres de brousse » en français[1]) et leurs sous-groupes, également appelés Marrons ou Noirs Marrons ou Nègres Marrons, sont l'ensemble des peuples descendants d'esclaves Africains emmenés au Suriname pour travailler dans les plantations. Les Bushinengués sont nés des grands mouvements de marronnage. Dès le XVIIe siècle, ils prirent la fuite et négocièrent très tôt les conditions de leur liberté. Certains restèrent au Suriname mais d'autres vinrent en Guyane pour travailler en tant que piroguiers pour les orpailleurs, principalement les Saramacas, réputés pour leur technique de conduite de pirogues sur les fleuves Oyapock et Approuague, sans moteur à l'époque. D'autres, chassés par les autres Bushinengués, se réfugient en Guyane, ce sont les Alukus (ou Bonis), qui se trouvent essentiellement dans la région de Papaichton - Maripasoula. Vivants dans la forêt, ils ont reconstitué une culture propre, issue de leurs diverses origines ethniques africaines. Ils se sont adaptés à la vie amazonienne en partie grâce aux Amérindiens avec qui ils ont eu des contacts rapprochés.

Si les Alukus sont français et vivent quasiment tous en Guyane depuis longtemps, les Saramacas sont aussi présents en Guyane depuis de très nombreuses années, mais la très grande majorité d'entre eux se trouve encore au Suriname. En Guyane, ils sont surtout sur la bande littorale, jusqu'à la frontière brésilienne. Quant aux Ndjuka, certains se sont installés très tôt le long du Maroni, fleuve frontière avec le Suriname, dans la région de Grand-Santi. Beaucoup ont traversé la frontière lors de la guerre civile qui secoua le Suriname dans les années 1980.

Démographie

Les six sous-groupes de Bushinengués
Ethnie Population totale
(2014)[2]
au Suriname en Guyane Langue
Alukus (ou Bonis) 10 800 10 800 Aluku
Saramaca 82 500 57 500 25 000 Saramaka
Paramacas 10 300 5 400 4 900 Paramaca
Djukas 82 500 56 000 26 500 Ndjuka
Kwintis 950 950 Kwinti
Matawais 6 800 6 800 Matawai
Total des Bushinengués 193 850 126 650 67 200

La population totale bushinenguée est estimée à environ 194 000 en 2014, dont 127 000 au Suriname et 67 000 en Guyane. Ainsi, les Bushinengués représentent 23 % de la population du Suriname et 26 % de la population de Guyane.

Langues

Ils parlent différentes langues en fonction des dates de marronnages : les Saramakas, ou Saamakas, parlent le saamaka, qui se différencie beaucoup des autres langues du marronnage du fait d'un lexique très différent (présence notamment de mots venant du portugais et de l'akan d'Afrique de l'ouest. Leur langue est un créole à base lexicale portugaise pour le saamaca et le matawaï, et de créole à base lexicale anglaise pour les langues aluku, ndjuka et paamaka qui s'est créolisée et a reçu les apports de langues amérindiennes et européennes. Les Paamakas, les Ndyukas et les Bonis parlent chacun des langues très proches regroupées sous le terme de nege-tongo ou de bushi-tongo. Enfin, les esclaves qui ne se sont pas enfuis sont à l'origine de la création du sranan, qui est une des langues officielles du Suriname[3].

Société

Ils vivent principalement de chasse, pêche et de culture sur abattis. Certains commencent à avoir des activités d'entrepreneurs en orpaillage (et non plus seulement d'ouvriers) et de vente d'objets aux touristes. Leur société est centrée autour de la famille et du Gran-Man, chef spirituel et religieux, qui peut être une femme, détenant les pouvoirs de juge, sage, et conciliateur. Les villages et les écarts bushinengue du côté français sont représentés par un capitaine ou un Gran Man auprès de l'Administration. L'abolition de l'esclavage a mis fin à leur traque, mais l'orpaillage a généré une exploitation d'hommes sous-payés et menacés qui fait penser à une nouvelle forme d'esclavage. Le RMI (revenu minimum d'insertion)/ RSA apporte parfois un appoint non négligeable, mais comme les Amérindiens, ils sont assez peu représentés par les élus départementaux et régionaux... Cependant, la Guyane française a élu Lénaïck Adam, bushinengue, en 2017.

Bibliographie

Littérature orale

  • Napi Tutu : l'enfant, la flûte et le diable, conte aluku, CRDP de Guyane, 2003.
  • Les leçons d'Ananshi l'araignée, conte bushinengué, SCEREN-CRDP de Guyane, 2007.

Études

  • Jules Brunetti, La Guyane française. Souvenirs et impressions de voyage (1840), Len Pod, 2017.
  • Willem F. Van Lier, Notes sur la vie spirituelle et sociale des Djuka (Noirs réfugiés Auca) au Surinam, trad., Universiteit Leiden, 1939 [1]
  • Diane Vernon, Les représentations du corps chez les Noirs Marrons Ndjuka du Surinam et de la Guyane française, ORSTOM, 1992 [2]
  • Michel Bindault, Lexique français-bushi-nenge et bushi-nenge-français, Grand-Santi, 1993.
  • Richard Price, Les premiers temps : la conception de l'histoire des Marrons saramaka, trad., Seuil, 1994.
  • Desmo Betian, Wemo Betain, Anya Cockle, Parlons saramaka, L'Harmattan, 2000.
  • Laurence Goury, Le ndyuka : une langue créole du Surinam et de Guyane française, L'Harmattan, 2003.
  • Laurence Goury, Grammaire du nengee : introduction aux langues aluku, ndyuka et pamaka, IRD, 2003.
  • Marie-Pascale Mallé, « Les maisons des Noirs marrons de Guyane », In Situ. Revue des patrimoines, no 5,‎ (ISSN 1630-7305, DOI 10.4000/insitu.2373, lire en ligne, consulté le )
  • Élisabeth Godon, Les enfants du fleuve. Les écoles du fleuve en Guyane française : le parcours d'une psy, L'Harmattan, 2008.
  • Jean Moomou, « Entre vivants et morts chez les Bushinenge du Surinam et de la Guyane française : ancestralisation, ancestralité, ancestrolâtrie », apud Serge Mam Lam Fouck, et Isabelle Hidair (dir.), La question du patrimoine en Guyane française, Guyane, Ibis Rouge, 2011, p. 415-437.

Références

  1. « Ethnologie et patrimoine dans les Dom-Tom » [PDF], sur culture.gouv.fr,
  2. (en) « The Maroon Population Explosion: Suriname and Guyane » [PDF], sur booksandjournals.brillonline.com
  3. Odile Renault-Lescure et Laurence Goury, Langues de Guyane, Vents d'ailleurs, (ISBN 9782911412479, 2911412478 et 9782709916790, OCLC 652428905, lire en ligne)

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes