Charles Camproux
Charles Camproux, (de son nom complet, Charles Alphonse Félix Camproux) né à Marseille le et mort à Castelnau-le-Lez le [1], est un écrivain, poète et universitaire qui compte parmi les figures les plus importantes du mouvement occitaniste contemporain.
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Professeur d'université (), occitaniste, éditeur, poète, romaniste, philologue |
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occitan |
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Jean-Marie Petit (beau-père) |
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Biographie
modifierCharles Camproux naît à Marseille le , dans le quartier populaire de la Belle de Mai[2]. Fils d'ouvrier, le jeune Camproux perd son père mort au combat en 1917[2]. Charles Camproux connait dès lors une enfance difficile, entre pauvreté et petite délinquance. Les Salésiens de Don Bosco[2] proposent à sa mère de l'éduquer. Camproux fait toute sa scolarité dans l'institut qui lui inculque la foi catholique qu'il gardera toute sa vie[3] et lui permet ensuite de faire des études de Lettres à l'université de Montpellier. Il donne des cours et surveille des études en échange de leurs aides (à Don Bosco) quand il est étudiant.
Il épouse une provençale originaire de Gaujac dans le Gard. Il aura avec Yvonne Camproux, sa femme, trois filles : Odette Camproux-Petit née avant guerre puis, Brigitte Camproux-Chazet (décédée) et Martine Camproux-Soustelle, toutes deux nées après guerre.
Devenu professeur, son premier poste d'enseignement est Saint-Chély-d'Apcher sur l'Aubrac, dont il gardait un très bon souvenir, puis Mende proche du Gévaudan[4] de ses origines, dont le patois devient le corpus de sa thèse en Sorbonne. Après un poste à Narbonne[2], il est nommé au lycée Henri-IV de Béziers où il se lie d'amitié avec Marcel Barral, agrégé de grammaire comme lui, occitaniste, avec qui il écrit "Les contes et légendes du Languedoc". Ce sera une longue amitié indéfectible. Les familles Camproux et Barral resteront unies.
Dès les années 1920, il s'engage dans un occitanisme politique au côté de Paul Ricard et de Jòrgi Reboul[3], fondateur d'un groupe provençal "Le Calen" de Marseille. En 1934, il crée avec Léon Cordes, Roger Barthe, Marcel Barral et quelques autres la revue Occitania qui paraîtra jusqu'en 1939[5] et devient l'organe principal des occitanistes. Camproux participe avec ses amis à la Societat d'Estudis Occitans qui aborde les questions philologiques et adopte les thèses linguistiques élaborées par Louis Alibert. Il est agrégé de grammaire en 1937[6].
Pendant la Seconde Guerre mondiale, il est fait prisonnier par les Allemands à Époye[2], et d'abord placé comme ouvrier agricole dans le sud de l'Allemagne ; à la suite d'une tentative d'évasion il est placé dans un stalag, où il crée une Université de camp pour laquelle il donne des conférences sur Frédéric Mistral et les Troubadours[4]. Ayant appris remarquablement vite l'allemand, il est choisi pour s'évader à nouveau et parvient à s'échapper, en partie grâce à un fonctionnaire allemand lecteur d'Occitania[2]. Il traverse la France occupée, franchit la ligne de démarcation et rejoint son poste à Béziers, encore en zone libre, où il peut reprendre son travail d'enseignant. Il s'engage dans la Résistance[4], devient chef de section pour l'Hérault. Il participe ainsi ou organise des sabotages des infrastructures allemandes. Aidé par un cousin de sa femme, qui travaille pour la police à Montpellier et qui lui transmet les noms des juifs qui doivent être arrêtés dans les 48 heures, il organise tout un réseau pour les prévenir, les mettre à l'abri et les faire passer en Espagne. Son apport dans la Résistance héraultaise est considéré comme primordial[2].
À la Libération, il sera nommé "préfet intérimaire" par Leclerc, en attendant la reprise administrative. Il remplira cette mission le temps nécessaire à la préfecture, et restera ensuite très discret toute sa vie sur ses exploits dans la Résistance. Camproux était un homme plein d'énergie, d'humour et de très grand courage. Il écrira, durant ces années sombres, "les poèmes de la Résistance" qui seront édités à l'après-guerre.
En 1954, chargé de cours à la faculté des Lettres de Montpellier, il soutient une thèse d'état sous la direction d'Albert Dauzat à la Sorbonne sur la syntaxe occitane à partir de l'étude des parlers populaires du Gévaudan. Avec Robert Lafont et Marcel Barral, il fonde en 1966 à Montpellier, le Centre d'études occitanes. En 1972, il devient titulaire de la chaire de "Langue et littérature occitanes" à la faculté des lettres de Montpellier (Université Paul-Valéry Montpellier 3)[7].
Il a défendu la culture occitane de 1946 jusqu'en 1974 tant dans la presse qu'à la radio. De 1956 jusqu'en 1968, il a publié des articles de critique littéraire dans Les Lettres françaises. Il a régulièrement participé aux universités d'été du Centre d'Études Occitanes. Atteint par une maladie très invalidante, Camproux est contraint de cesser ses activités d'enseignement et de recherche. Très entouré par sa femme et ses filles, il vit un certain temps chez l'une d'elles à Clapiers puis se retire dans une maison de retraite aux environs de Montpellier avec sa femme qui le soutiendra jusqu'à la fin, comme elle l'a fait toute sa vie.
Camproux était un être solaire et toute son œuvre en rend compte. Méditerranéen dans l'âme, marseillais, son rapport à la mer était infiniment profond. Comme pour Camus, elle est l'espace où l'on prend des forces. Son poème sur la Méditerranée est somptueux dans son écriture, hors du temps, en lien bien sûr avec la poésie grecque d'Homère. C'est un poème-hymne à l'espace infiniment bleu, où il est une sorte de nageur-poète, dans la sensation même du plongeur ébloui. La mer était aussi le pays sans fin de l'enfance retrouvée. Auteur contemporain, d'une très grande culture, Camproux avait un sens inné de l'écriture poétique. L'occitan, ou plutôt le provençal, lui permettait de s'exprimer dans une langue qui le rattachait à la vie et au paysage sans barrière et sans cliché. Son expérience poétique renouait certes avec une tradition, mais découvrait aussi une nouvelle expression de soi, un nouvel ancrage dans le monde qui était lui complètement de son temps. C'est un grand poète occitan.
Il adorait la mer et y passait ces vacances, en famille, à Palavas, où il avait acquis un appartement dans un immeuble tout bleu en front de mer; et c'était un nageur accompli. Sa poésie est extrêmement musicale, colorée, vivante. Le Bestiaire est un petit bijoux. Sans doute avait-il pris à la poésie des Troubadours, une simplicité des mots et des sons, qui donnait un ton et un rythme à la fois radical et chantant, heureux aussi, rayonnant, drôle, car Camproux était un homme très rieur, chaleureux, charmant, marseillais, blagueur, enthousiaste et amoureux de la vie. Toute son œuvre lyrique, traduite par lui-même, serait, est, à rééditer.
Publications
modifier- Poemas sens poesia, 1942
- Poemas de Resistencia, 1943-1944.
- Bestiari, poèmas (Institut d'Estudis Occitans, 1947) La chouette
- (avec Marcel Barral) Contes et légendes du Languedoc (Fernand Nathan, 1951) (contes traduits et adaptés de l'occitan)
- Histoire de la littérature occitane (Payot, 1953) lire en ligne sur Gallica
- "Une voix étouffée, Victor Gelu" (Les Lettres françaises, 1956)
- "La langue et le style des écrivains. Claude Simon, L'Herbe" (Les Lettres françaises, 7-13 mai 1959)
- Le « joy d'amor » des troubadours. Jeu et joie d'amour. (Causse & Castelnau, 1965)[8]
- Études sur Peire Cardenal : Présence de Pèire Cardenal (Annales de l'I.E.O., 1970) ; Vocabulaire courtois chez P. Cardenal (Annales de l'I.E.O., 1963) ; Cardenal et Rutebeuf, poètes satiriques (Revue des Langues Romanes, 1971) ; La mentalité 'spirituelle' chez Pèire Cardenal (Cahiers de Fanjeaux, 1975)
- Òbra poëtica occitana, (Institut d'études occitanes, 1983)
- Auteur d'articles dans l'Encyclopædia Universalis [9]
- Livre d'artiste : " Tres poèmas en Occitan - Trois poèmes en Occitan", Charles Camproux, Marcel Barral, Léon Cordes, peintures originales de Jacquie Barral, 2017. éd. 2+3=5. Montpellier. Collections de la médiathèque Émile Zola, Montpellier, Manoir des livres (Archipel Butor) Lucinges, BNF, Paris.
Postérité
modifier- Une place de la ville de Montpellier et une rue de la commune de Clapiers portent son nom. Il en est de même d'un bâtiment et d'une salle de l'Université Paul-Valéry.
Pour approfondir
modifierBibliographie
modifier- Jean-Marie Petit, Hommage à Charles Camproux / Omenatge a Carles Camprós, Béziers, Centre International de Documentation occitane, 1983.
- Charles Camproux. De la philologie à l'histoire, dans la revue Lengas, 53, 2003. Articles de Robert Lafont : Carles Camprós, Philippe Gardy : Au plus près des mots, Charles Camproux écrivain d'oc, Philippe Martel : Charles Camproux, un non-conformiste des années 1930 en occitan ?, Jean-Pierre Chambon : Un dialectologue rebelle ?, Jean-Marie Petit : Charles Camproux dans la tourmente de l'histoire 1939 1947[10].
- Paul Ricard, Jòrgi Reboul, Charles Camproux, Max Rouquette, autour de l'action occitane (1930-1950), (Actes du colloque du 2 février 2013)[11], Centre Culturel Louis Aragon, Septèmes-les-Vallons, 2014.
- Livre d'artiste "Tres poèmas en Occitan - Trois poèmes en Occitan", Charles Camproux, Marcel Barral et Léon Cordes, illustré par des peintures originales de Jacquie Barral. éd. 2+3=5, 2017. Collections de la médiathèque Emile Zola de Montpellier /Manoir des Livres, Archipel Butor à Lucinges/ BNF.
Liens externes
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- Ressource relative à la recherche :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- « Existe-t-il une biographie de Charles Camproux ? », sur Centre Interrégional de développement de l'occitan (version du sur Internet Archive).
Notes et références
modifier- Insee, « Fichier des personnes décédées », sur data.gouv.fr, (consulté le ).
- « Carles Camprós », sur occitanica.eu (consulté le ).
- « Charles Camproux (1908-1994) », sur persee.fr (consulté le ).
- « Camproux Charles / Camprós Carles (1908-1994) », sur Université Paul-Valéry Montpellier 3 (consulté le ).
- Robert Sabatier, Histoire de la poésie française, vol. 6, t. 3, Paris, Albin Michel, , p. 313
- Paul Fabre, « Charles Camproux (1908-1994) », Nouvelle revue d'onomastique, vol. 25, no 1, , p. 305–306 (lire en ligne, consulté le )
- Historique du département d'occitan
- Compte-rendu
- Encyclopædia Universalis
- Lengas no 53
- « Accueil », sur univ-montp3.fr (consulté le ).