Jean Bernard (médecin)

médecin et professeur de médecine français

Alfred Simon Jean Bernard, né le à Paris et mort le dans la même ville, est un écrivain, résistant, médecin hospitalo-universitaire hématologue et cancérologue français. Membre de l'Académie française, il est le premier président du Comité consultatif national d'éthique, ainsi que président de l'Académie des sciences et de l'Académie nationale de médecine.

Jean Bernard
Fonctions
Président
Académie des sciences
-
Président
Comité consultatif national d'éthique
-
Fauteuil 25 de l'Académie française
-
Président
Académie nationale de médecine
-
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Biographie

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Jeunesse, études et engagement

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Demeurant au no 2 du square Saint-Ferdinand (aujourd'hui rue du Colonel-Moll), dans le 17e arrondissement de Paris, Jean Bernard est l'aîné d'une famille d'ingénieurs avec deux frères et une sœur : Henri (1908-1982), Michel (1909-1997) et Lise (1913-2004)[1],[2]. Son grand-père maternel, Émile Paraf (1846-1924) est polytechnicien ; son père, Paul Bernard (1876-1951) est centralien, ainsi que Michel, son frère cadet. Pendant la Première Guerre mondiale, et tandis que son père est au front, il est envoyé en Bretagne, à Couëron, près de Nantes. Jusqu'en 1918, il étudie à l’école communale de Couëron en Loire-Atlantique, puis, après que sa famille s'installe boulevard Saint-Aignan à Nantes, au lycée Clemenceau[3]. Sa mère, née Andrée-Marguerite Paraf, meurt en 1920. Puis Jean Bernard fréquente le lycée Louis-le-Grand à Paris, où il acquiert une solide culture classique. Il lit beaucoup et commence à écrire des proses et des poésies. À 17 ans, il joue une pièce de Victor Hugo, Mangeront-ils ?. Ses partenaires sont Claude Lévi-Strauss et Pierre Dreyfus[1]. À cette époque, il hésite encore entre la médecine et la littérature. Il finit par se décider pour la médecine : « La médecine me parut allier l'humanisme et mon goût pour les sciences »[4].

Il suit des cours à la Faculté des sciences de Paris, à la Faculté de médecine et enfin à l'Institut Pasteur.

En 1929, il devient interne des hôpitaux. Par indisponibilité de stage dans l'hôpital où il est formé, Jean Bernard décide d'occuper un poste dans l'hôpital le plus proche de son domicile[5]. Il entre dans le service du Pr Paul Chevallier[6], qui est un maître en hématologie[1]. Jean Bernard éprouve une grande admiration pour ce médecin et c'est grâce à lui qu'il va faire des maladies du sang l'affaire de sa vie. En 1931, il fonde, avec Paul Chevallier, la première société savante d'hématologie. À partir de 1933, il commence une thèse expérimentale sur la leucémie. Il obtient son doctorat en médecine en 1936.

Le , il épouse Amy Pichon (1905-1992)[7], fille de Charles-Adolphe Pichon (1876-1959), secrétaire général civil de la présidence de la République et délégué général de l'UIMM, et de Marguerite Pichon-Landry, présidente du CNFF. Amy Pichon est également la nièce du ministre Adolphe Landry[8],[9]. Leur union leur offre trois enfants : Antoinette, Dominique et Olivier[7].

Dès 1940, Jean Bernard entre dans la Résistance, ce qui lui vaut d'être l'un des cinq cents titulaires de la carte de Résistant de 1940[1]. Le , il entre dans le réseau de René Parodi où il rédige et distribue des tracts. Au début de l'année 1941, ce réseau est démantelé. René Parodi est arrêté puis exécuté en prison. Jean Bernard se cache en province, passe ensuite en zone Sud, où il entre dans un réseau action. En automne 1942, il découvre la ville de Marseille et le monde du Vieux-Port, dont il manque pas de se souvenir lors de son éloge à Marcel Pagnol[10]. En 1942, il dirige un réseau de résistance dans le sud-est de la France[11]. Il est responsable des parachutages d'armes sur les plateaux du Vivarais, dans le Vaucluse et dans les Bouches-du-Rhône.

En , de retour à Paris en ayant repris ses consultations, Jean Bernard est arrêté par la Gestapo à son domicile. Il lui est reproché la rédaction d'une ordonnance médicale pour le fils de Robert Debré, Michel. Pour cet acte, il est fait prisonnier et est incarcéré durant six mois à la prison allemande de Fresnes, où ils sont entassés à cinq détenus dans la cellule no 359 qui ne peut recevoir qu'une seule personne. Dès sa libération, Jean Bernard reprend ses activités de résistant[10]. Il ne déposera les armes qu'une fois la capitulation allemande du 8 mai 1945 proclamée[1]. De mai à , il est actif dans un réseau de renseignement où il parcourt la ville à bicyclette et prend des notes permettant la libération de Paris. Il reçoit à son cabinet Alexandre Parodi qui est devenu un des chefs de la Résistance et lui montre la liste complète des futurs commissaires de la République, préfets et sous-préfets[10].

Après la guerre, Jean Bernard reprend ses études de médecine. Il suit les cours d'immunologie et de bactériologie de Gaston Ramon et Robert Debré. En 1946, il devient médecin des hôpitaux, puis, en 1949, il réussit l'agrégation et enseigne à la faculté de médecine de Paris.

Les succès médicaux et la réflexion éthique

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En 1947, avec Jean Hamburger, Jean Bernard crée l'« Association pour la recherche médicale » qui devient la Fondation pour la recherche médicale en 1962.

En 1947, à l'hôpital Hérold, il obtient avec Marcel Bessis la première rémission dans un cas de leucémie chez un enfant[11], Michel. Jean Bernard a eu l'idée de modifier le milieu intérieur (concept dû à Claude Bernard) et c'est Marcel Bessis qui a apporté la technique de l'exsanguino-transfusion, consistant dans le remplacement total du sang d'un organisme. Ce premier succès fait l'objet d'une publication dans la Revue de transfusion. En 1950, il décrit la première leucémie chimiquement induite chez l'homme : l'hémopathie benzénique observée chez les sujets travaillant dans les industries qui utilisent le benzène. Cette étude permet à Jean Bernard d'aborder le traitement curatif de la leucémie.

En 1948, avec son confrère Jean-Pierre Soulier, ils décrivent le syndrome Bernard-Soulier qui porte leurs noms[12]. Les deux hématologues ont décrit le cas d'un jeune homme avec une tendance à saigner, une thrombocytopénie et des thrombocytes extrêmement hypertrophiés (« thrombocytes géants »). Le patient s'est présenté à l'âge de 15 ans avec des saignements de nez importants et du sang dans les selles, puis a subi des saignements répétés au cours des années suivantes et est décédé à l'âge de 28 ans d'une hémorragie cérébrale. Sa sœur est morte en bas âge à l'âge de 31 mois. Les parents et les autres frères et sœurs n'ont pas été touchés.

En 1956, il est professeur de cancérologie.

En 1957, il est médecin chef de service à l'hôpital Saint-Louis. Léon Binet témoigne de la manière dont Jean Bernard menait ses consultations : « Les malades étaient fascinés par sa façon d'être. Il avait un esprit de synthèse tellement fulgurant qu'il arrivait très vite à formuler des solutions pratiques, dans une discipline pourtant complexe. Très présent dans son service, partisan du temps plein à l'hôpital, il recevait les familles de ses petits malades dès huit heures le matin et savait les rassurer »[13].

En 1958, il devient membre du Comité consultatif de la recherche scientifique. Il fait partie du Comité des douze sages qui conseille le Général de Gaulle sur l'orientation de la recherche en France. En 1961, il devient professeur de clinique des maladies du sang et il prend la direction de l'Institut de recherche sur les leucémies et les maladies du sang installé à l'hôpital Saint-Louis. En 1962, il isole une substance, la rubidomycine, dont il réussit à démontrer l'efficacité contre la leucémie. Il décrit aussi en 1967 le syndrome de Lasthénie de Ferjol.

Il est président du conseil d'administration de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) de 1967 à 1980.

En 1974, Jean Bernard est l'un des deux médecins invités à se rendre en secret à Téhéran (Iran), pour voir le Shah régnant, Mohammad Reza Pahlavi (1919-1980), qui souffre d'une hypertrophie de la rate. Le médecin diagnostique une leucémie lymphoïde chronique et une macroglobulinémie de Waldenström. Trois ans plus tard, le Shah est destitué et part en exil. Le président Carter l'autorise finalement à entrer aux États-Unis pour y être soigné et en représailles, un groupe d'étudiants Iraniens s'empare de l'ambassade américaine à Téhéran en y retenant 52 Américains pendant plus d'une année[5].

Grâce à ces recherches, l'hématologie, qui était jadis une discipline unifiée, tend à se diviser en domaines plus spécialisés. C'est Jean Bernard qui oriente Marcel Bessis vers la cytologie. Jean Dausset est, lui, orienté vers l'immunologie ; il découvre ainsi le système majeur d'histocompatibilité (ou compatibilité tissulaire) dit HLA ; pour ses découvertes, Jean Dausset reçoit le prix Nobel de médecine en 1980.

En 1983 et durant dix années, il devient le premier président du Comité consultatif national d'éthique des sciences de la vie et de la santé[14].

Membre du conseil d'administration de l'Institut Pasteur de 1967 à 1970, il est président de l'Académie des sciences de 1983 à 1984 et de l'Académie nationale de médecine de 1983 à 1992. Il est par ailleurs membre de l'Académie du royaume du Maroc[15].

L'Académie française

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Jean Bernard est aussi un écrivain et un poète. Il est, notamment, l'ami de Paul Valéry et de Jules Romains[16],[17]. Il est élu à l'Académie française, le , à la suite du décès de Marcel Pagnol (25e fauteuil de l'Académie française) pour lequel il rend hommage lors de son intronisation[18]. Il reçoit Jean Hamburger en 1986, puis Michel Debré en 1989. Dominique Fernandez lui succède et prononce son éloge sous la Coupole en 2008.

Décès

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Jean Bernard décède le à son domicile de la rue d'Assas dans le 6e arrondissement de Paris[10],[19]. Il est inhumé dans le caveau de sa belle-famille auprès de son épouse dans le petit hameau d'Aizecq (Charente) où il a passé ses vacances durant 60 ans[20],[2].

Distinctions

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Décorations

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Prix et récompenses

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Honneurs

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Publications

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Cette liste est issue des données de la Bibliothèque nationale de France (BnF) avec 139 notices bibliographiques[23] et du Système universitaire de documentation (Sudoc) contenant 206 publications de livres[24],[Note 1].

Notes et références

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Note
  1. Compte tenu de l'abondance de publications de son auteur, une mise en page est élaborée pour respecter le contenu textuel de la biographie.
Références
  1. a b c d et e Claudine Escoffier-Lambiotte et Jacques Ruffié, « Jean Bernard, médecin humaniste, est mort », sur Le Monde, (consulté le ).
  2. a et b « Jean Bernard », sur Roglo (d) (consulté le ).
  3. Philippe Mustière (d), « Le Professeur Jean Bernard ou la légende du sang », Le vieux bahut, Nantes, Amicale des anciens élèves des lycées & collèges Clemenceau et Jules Verne, no 89,‎ , p. 13-14 (lire en ligne [PDF], consulté le ).
  4. Jean Bernard, C'est de l'homme qu'il s'agit, Odile Jacob, 1988.
  5. a et b (en) « Biography: Jean Bernard », sur Royal College of Physicians Museum (d), [(fr) version traduite] (consulté le ).
  6. Clément Claude Fauré, « Paul Chevallier, le pionnier français de l'hématologie », sur Association Amicale des Anciens Internes en Médecine des Hôpitaux de Paris (AAIHP) (consulté le ).
  7. a b c d e f g et h « Biographie : Jean Bernard », sur Who's Who in France (consulté le ).
  8. Ella Sauvageot : l'audace d'une femme de presse, 1900-1962, 2006.
  9. Fernand Émile Beaucour, Un fidèle de l'empereur en son époque : Jean Mathieu Alexandre Sari (1792-1862).
  10. a b c et d « Discours de d'entrée à l'Académie française de Dominique Fernandez », sur Le Monde, (consulté le ).
  11. a b c d e f g h et i « Portrait : Jean Bernard », sur Inserm, (consulté le ).
  12. J. Bernard, J. P. Soulier, Sur une nouvelle variété de dystrophie thrombocytaire-hémorragipare congénitale. In: Semin Hop Paris. 24, 1948.
  13. Léon Binet, dans le Figaro du 22 avril 2006.
  14. S. Mouchet et J.-F. Picard, Entretiens avec Jean Bernard : Les questions d'éthique médicale.
  15. « Les membres de l'Académie », sur Site officiel de l'Académie du Royaume du Maroc, .
  16. Judith Robinson-Valéry, Quelle médecine demain ? sous le regard de Paul Valéry.
  17. Ghislaine Alajouanine, « Que pensait le célèbre Professeur Jean Bernard de sa fin de vie ? », sur opinion-internationale.com, (consulté le ).
  18. Jean Bernard, « Discours de réception en hommage à Marcel Pagnol », sur Académie française, (consulté le ).
  19. « Alfred Simon Jean Bernard : Acte no 67 », sur Fichier des personnes décédées (consulté le ).
  20. Philippe Landru, « Cimetière d'Aizecq », sur Cimetières de France et d'ailleurs (d), (consulté le ).
  21. a et b (en) « Profile: Jean Bernard », sur Prabook, [(fr) version traduite] (consulté le ).
  22. « Les Grandes Médailles d'Or (1908-2018) » [PDF], sur Société d'encouragement au progrès, (consulté le ).
  23. « Résultat de recherche pour : Bernard, Jean (1907-2006) », sur BnF (consulté le ).
  24. « Résultat de recherche pour : Bernard, Jean (1907-2006 ; hématologue) [Type de publication : Livres] », sur Sudoc (consulté le ).

Voir aussi

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Bibliographie

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Interview
  • [1990] S. Mouchet et J.-F. Picard (, 29 mai 1991, et ), « Entretiens avec Jean Bernard », sur Histoire de la recherche médicale (Histrecmed), (consulté le ).  

Fonds d'archives

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Liens externes

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