Lucilie bouchère

espèce de diptères

Cochliomyia hominivorax

La lucilie bouchère (Cochliomyia hominivorax) est une espèce de diptères de la famille des Calliphoridae, communément appelée mouche à viande ou mouche de Libye, bien qu'elle soit originaire d'Amérique centrale.

Sa larve est un parasite obligatoire des mammifères, dont l'humain, et rarement d'oiseaux[1]. Les œufs sont pondus dans les plaies ouvertes ou atteintes cutanées suffisantes pour permettre à la larve de pénétrer dans les tissus. Les œufs peuvent aussi être pondus sur des muqueuses et des orifices naturels du corps, comme les narines, les sinus, la bouche, les orbites et les orifices génitaux. La larve se nourrit exclusivement de tissus vivants.

Étymologie

modifier

L'épithète spécifique hominivorax, signifie littéralement « dévoreuse d'hommes ».

Systématique

modifier
 
Larve de Lucilie bouchère

Cochliomyia hominivorax a été décrite en 1857 par le médecin français Jean Charles Coquerel, qui en observa les larves dans les plaies des bagnards de l'île du Diable, en Guyane[2].

Le nom valide complet (avec auteur) de ce taxon est Cochliomyia hominivorax (Coquerel, 1858)[3]. L'espèce a été initialement classée dans le genre Lucilia sous le protonyme Lucilia hominivorax Coquerel, 1858[3].

Ce taxon porte en français les noms vernaculaires ou normalisés suivants : Lucilie bouchère[4],[5], ver en vis[5].

Cochliomyia hominivorax a pour synonymes[3] :


Identification

modifier

Le troisième stade larvaire présente un tronc trachéen dorsal brun, qui s'étend, en avant, du douzième au dixième ou neuvième segment, tandis que la larve de Chrysomya bezziana s'en distingue par sa spinulation, le nombre de lobes, ses stigmates antérieurs (4 ‡ 6) et la pigmentation du tronc trachéal secondaire[1].

Les adultes des espèces du genre Cochliomyia se distinguent d'autres genres impliqués dans des myiases des plaies par leur couleur bleu ou vert métallique et les trois bandes longitudinales brunes sur le thorax. C. hominivorax peut toutefois être confondue avec sa congénère C. macellaria[1].

Biologie

modifier
 
Myiase sur un berger belge provoquée par la Lucilie bouchère
 
Myiase sur la jambe d'homme de 77 ans, 12 ans après une ostéosynthèse tibiale (Colombie) : A) Plaie ouverte dans la jambe gauche de l'homme, montrant plusieurs larves. B), C) Larves de Cochliomyia hominivorax extraites de la plaie. La flèche 1 indique les bandes d'épines ; notez les épines disposées en 4 rangées qui séparent chaque segment. La flèche 2 indique les crochets. Les barres d'échelles indiquent 2 mm (B) et 1 mm (C)[6].

La femelle est attirée par les plaies. Elle y pond jusqu'à 340 œufs qui éclosent après 12 à 24 heures d'incubation. La jeune larve commence immédiatement à se nourrir en s'enfonçant dans les chairs à partir de la plaie. Après trois stades larvaires, la larve sort de son hôte et se laisse tomber au sol[1]. Elle s'y enfouit pour former une pupe, de laquelle émergera un nouvel adulte. Plus il fait chaud, plus le développement est rapide (jusqu'à environ 3 semaines pour le cycle complet en milieu tropical)[1].

La plaie produit une odeur caractéristique souvent imperceptible pour l'humain, mais qui attire d'autres mouches femelles gravides qui viennent alors pondre dans les mêmes plaies, aggravant le processus infestant, qui peut être mortel sans traitement[réf. nécessaire].

Traitements

modifier

L'ivermectine a été utilisée avec succès dans le traitement des myases causées par ce parasite[7]. Chez l'animal l'avermectine est souvent utilisée (doramectine en général) en injection sous-cutanée[1]. D'autres traitements sont possibles[8].

Contrôle

modifier
 
Carte de répartition de la Lucilie bouchère (2010)
  • Distribution
  • Variations saisonnières
  • Zone où l'espèce a été éradiquée

En utilisant la technique des mâles stériles, les États-Unis ont officiellement éradiqué la lucilie bouchère en 1982. La même chose s’est produit en Libye en 1990[9],[10], au Guatemala et au Belize en 1994, au Salvador en 1995, et au Honduras en 1996. Il y a des campagnes en cours contre la mouche au Mexique, au Nicaragua, au Costa Rica et en Jamaïque, toutes avec l'assistance financière du département de l'Agriculture des États-Unis.

Aucun vaccin ni produit d'origine biologique efficace n'est disponible[1].

En 2022, la mouche est envahissante en Uruguay où elle cause de gros dégâts aux élevages et même à des humains. Le Panama a entrepris la production des mâles stériles cryogénisés pour ce pays. Chaque semaine, 25 millions de ces mâles seront dispersés aux frontières de l'Uruguay (environ 1 000 km) entre 2023 et 2027 afin d'éradiquer l'espèce du territoire[11].

Références

modifier
  1. a b c d e f et g OIE, "Myiase à 'Cochliomyia hominivorax et 'Chrysomya bezziana'"
  2. L'éradication de la MOUCHE TUEUSE du Mexique, La Recherche, 2009, no431, p. 62-69.
  3. a b et c GBIF Secretariat. GBIF Backbone Taxonomy. Checklist dataset https://doi.org/10.15468/39omei accessed via GBIF.org, consulté le 12 mai 2024
  4. MNHN & OFB [Ed]. 2003-présent. Inventaire national du patrimoine naturel (INPN), Site web : https://inpn.mnhn.fr, consulté le 12 mai 2024
  5. a et b Base de données mondiale de l'OEPP, https://gd.eppo.int, consulté le 12 mai 2024
  6. (en) Wilmer E. Villamil-Gómez, Jaime A. Cardona-Ospina, Juan Sebastián Prado-Ojeda, Hugo Hernández-Prado, Mauricio Figueroa, Pedro N. Causil-Morales, Keirim Pérez-Reyes, Leidy A. Palechor-Ocampo et Alfonso J. Rodríguez-Morales, « Pin-Site Myiasis Caused by Screwworm Fly in Nonhealed Wound, Colombia », Emerging Infectious Diseases, Centers for Disease Control and Prevention (CDC), vol. 25, no 2,‎ , p. 379-380 (ISSN 1080-6040, DOI 10.3201/eid2502.181053, lire en ligne).
  7. Traitement des myiases dues à Cochliomyia hominivorax par application locale d'ivermectine, Bulletin de la Société de pathologie exotique, 2003, vol. 96, no 5, p. 410-411.
  8. Loïc EPELBOIN, Philippe ABBOUD, Karim ABDELMOUMEN, Frédégonde ABOUT, Antoine ADENIS, Théo BLAISE, Romain BLAIZOT, Timothée BONIFAY, Morgane BOURNE-WATRIN, Mathilde BOUTROU, Gabriel CARLES, Pierre-Yves CARLIER, Jean-François CAROD, Luisiane CARVALHO, Pierre COUPPIÈ, Bertrand DE TOFFOL, François DELON, Magalie DEMAR, Justin DESTOOP, Maylis DOUINE, Jean-Pierre DROZ, Narcisse ELENGA, Antoine ENFISSI, Yves-Kénol FRANCK, Alexis FREMERY, Mélanie GAILLET, Hatem KALLEL, Arsène Amadouhé KPANGON, Anne LAVERGNE, Paul LE TURNIER, Lucas MAISONOBE, Céline MICHAUD, Rémi MUTRICY, Mathieu NACHER, Richard NALDJINAN-KODBAYE, Margot OBERLIS, Guillaume ODONNE, Lindsay OSEI, Jean PUJO, Sébastien RABIER, Brigitte ROMAN-LAVERDURE, Cyril ROUSSEAU, Dominique ROUSSET, Nadia SABBAH, Vincent SAINTE-ROSE, Roxane SCHAUB, Karamba SYLLA, Marc-Alexandre TAREAU, Victor TERTRE, Camille THOREY, Véronique VIALETTE, Gaëlle WALTER, Magaly Magaly, Félix DJOSSOU et Nicolas VIGNIER, « Panorama des pathologies infectieuses et non infectieuses de Guyane en 2022 », Revue Médecine Tropicale et Santé Internationale (MTSI), vol. 3, no 1,‎ (DOI 10.48327/mtsi.v3i1.2023.308, lire en ligne)
  9. Envoyées par les Américains en Libye Des mouches stériles contre la lucilie bouchère, Le Monde, 2 décembre 1990.
  10. L'éradication de la " mouche tueuse " est confirmée par la Libye, Le Monde, 23 juin 1992.
  11. Marion Floch, « Pourquoi des millions de mouches cryogénisées vont-elles être envoyées en Uruguay ? », sur Ouest-France, .

Références taxonomiques

modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

Liens externes

modifier