Sinaï (Bible)

lieu biblique

Dans le Pentateuque, Sinaï désigne à la fois le désert où pérégrinent les Hébreux et la montagne, appelée aussi Mont Horeb, où Moïse reçoit les Tables de la Loi.

Étymologie

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Sinaï pourrait dériver de senèh. Dans le récit littéraire du buisson ardent, le rédacteur biblique du livre de l'Exode opère un procédé de style appelé paronomase, qui consiste en un rapprochement graphique et sonore entre le buisson (« senèh » en hébreu) et la montagne du Sinaï (« sny » en hébreu, lui-même issu de l'hébreu : סֶ֫נֶּה : Senneh). Il a ainsi pour but de relier la théophanie du buisson ardent (passage qui est un assemblage de sources littéraires élohiste et jahviste mettant en scène Dieu identifié au feu) à celle de la péricope du Sinaï (texte de traditions yahviste et élohiste mêlées à quelques éléments deutéronomistes mettant en scène l'alliance mosaïque (en) avec Dieu se manifestant sous forme de nuée)[1].

Références bibliques

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Les deux sens apparaissent en Ex 19,1 :

Exode, 19, 1 : "Le troisième mois après leur sortie du pays d'Égypte, les enfants d'Israël arrivèrent ce jour-là au désert (מִדְבַּר, Midbar) de Sinaï.
Exode, 19, 11 - Qu'ils soient prêts pour le troisième jour; car le troisième jour l'Eternel descendra, aux yeux de tout le peuple, sur la montagne de Sinaï (עַל־הַר סִינָי, 'Al-Har Sinaï).

L'endroit est cité ensuite :

Rois 19:8 Il se leva, mangea et but ; et avec la force que lui donna cette nourriture, il marcha quarante jours et quarante nuits jusqu'à la montagne de Dieu, à Horeb.
4:24 Ces choses sont allégoriques ; car ces femmes sont deux alliances. L'une du mont Sinaï, enfantant pour la servitude, c'est Agar,
4:25 car Agar, c'est le mont Sinaï en Arabie, -et elle correspond à la Jérusalem actuelle, qui est dans la servitude avec ses enfants.
Moïse, ayant reçu ces bienfaits de Iothor(os) - tel était le surnom de Ragouël - vécut là en faisant paître les troupeaux. Quelque temps après, il les mena paître sur la montagne appelée Sinaï : c'est la plus haute montagne de cette région. Elle a les meilleurs pâturages, car il y pousse une herbe excellente et, comme la renommée voulait que la divinité y eût son séjour, elle n'avait pas jusque-là été affectée au pacage, les bergers n'osant pas la gravir.

Localisation du Sinaï biblique

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Les auteurs bibliques ne savent pas toujours où situer le Sinaï. Le livre des Juges suggère qu'il est dans le territoire d'Édom[2] et non pas dans la péninsule arabique où la tradition localise le Sinaï. D'autres passages évoquent Paran qui doit se trouver en direction de l’Égypte[3] : le livre des Rois[4] décrit une station sur le chemin de Madian vers l'Égypte et peut correspondre à l'oasis de Wadi Faran (en) dont l'étymologie se rapproche avec Paran. Faran est dominé par la montagne Jebel Serbal (en) qui pourrait correspondre au mont Sinaï[5]. Le Deutéronome identifie le Sinaï à un mont Paran situé à proximité de l’oasis de Qadesh (identifié avec l'oasis actuel d’ʿEn el-qederat)[6] mais l'auteur biblique se livre probablement à une spéculation savante sur la localisation du Sinaï et probablement pas à un souvenir ancien[7]. Le livre de Habacuc[8] affirme également une origine de Yahweh du mont Paran qui est mis en parallèle avec Téman (en), nom d’une personne ou d’un clan dans la généalogie d’Édom, voire d'un toponyme en territoire arabe[9]. La localisation du Sinaï primitif reste donc un mystère : les auteurs bibliques ne font pas œuvre d'historien mais donnent une théologie de l'histoire, rappelant que Yahweh a été à l'origine la divinité d'une ou de plusieurs montagnes dans le désert de la péninsule arabique[10].

Pour les Hébreux, l'Arabie est de l'autre côté du Golfe d'Aqaba. Pour les Romains, la péninsule arabique est divisée en trois parties :

« Il n'existait aucune tradition juive sur l'emplacement du Sinaï. Pas plus que sur l'itinéraire emprunté par les Hébreux à leur sortie d'Égypte. Voici donc le cas de figure où ce sont les seuls chrétiens qui ont identifié - et balisé - un ensemble de sites propres à l'Ancien Testament. De façon empirique, déductive, en s'appuyant sur la Septante, les «enquêteurs» ont fixé une route qui, certes, ne tenait guère compte des contradictions toponymiques entre le livre de l'Exode et le livre des Nombres. Mais qui, au fond, n'était pas moins vraisemblable qu'une autre.
En vérité, débats et divergences ont agité les concernés dès la naissance de cette tradition. Certains placeront la Sainte Montagne dans le djebel Serbal. Ou vers le djebel Chomer. Voire sur le volcan éteint de Hala el-Badr. À travers les siècles, au moins 25 « monts Moïse » seront ainsi revendiqués. Les dernières plaidoiries remontent à la fin des années 1990. Un archéologue anglais, Lawrence Kyle, militera bruyamment pour la montagne Blanche et l'Arabie saoudite. En écho, un historien italien, Emmanuel Anati, lui renverra le mont Safron et le Néguev, en Israël. Dans leur immense sagesse, les exégètes lucides admettent que toutes ces discussions n'ont aucun sens. Et qu'il n'est qu'un lieu saint, que l'on nomme Sinaï, Horeb ou Moïse : c'est ce mont sacralisé par la tradition monastique. » [11]

Notes et références

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  1. André Wénin, « La théophanie au Sinaï: Structures littéraires et narration en Exode 19,10-20,21 », In Marc Vervenne (éds) Studies in the Book of Exodus, Leuven University Press, 1996, p. 471-480
  2. Jg 5,4-5 dans la Bible Segond.
  3. Gn 21,21 dans la Bible Segond.
  4. 1R 11,18 dans la Bible Segond.
  5. (en) Joseph J. Hobbs, Mount Sinai, University of Texas Press, , p. 41
  6. Dt 33,2 dans la Bible Segond.
  7. Thomas Römer, Le dieu Yhwh : ses origines, ses cultes, sa transformation en dieu unique, Chaire des Milieux bibliques du Collège de France, 17 février 2011, 11 min 30 s.
  8. Ha 3,3 dans la Bible Segond.
  9. Jr 49,7.20 dans la Bible Segond.
  10. Thomas Römer, L'Invention de Dieu, Seuil, , p. 33
  11. Source : La Sainte Cime, par Yves Stavridès

Voir aussi

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