était invitée à reprendre sa place dans le concert européen, et, trois jours plus tard, M. de Bourqueney, par ordre de son gouvernement, signait la convention du 13 juillet, déjà paraphée depuis le 15 mars. L’isolement officiel de la France avait cessé.
Ainsi les conséquences diplomatiques du traité de Londres sont désormais épuisées ; il sort du domaine des faits actuels pour entrer sur le terrain de l’histoire. Les passions qu’il avait suscitées s’éteignent de part et d’autre ; il n’en reste plus que ces colères sourdes qui fermentent encore dans le cœur des peuples quand le souvenir des évènemens s’est refroidi. Les partis qui s’étaient formés au milieu de la crise, prenant l’un la guerre et l’autre la paix pour drapeau, sont dissous ou cherchent à s’ouvrir de nouvelles perspectives. Les deux personnes politiques de ce drame européen, le ministère de M. Thiers et le ministère de lord Melbourne, n’existent plus. La tribune et la presse ont eu leurs combats, qui retentiront long-temps ; mais, en Angleterre comme en France, l’opinion publique a posé les armes. Après avoir changé l’état de l’Europe, on s’arrête aujourd’hui pour mesurer l’étendue de ce changement.
Le moment paraît favorable à un examen calme et sincère de ce passé, qui est à la fois si près et si loin de nous. Il est temps de juger la moralité des actes. Le succès a eu ses apologies ; le malheur doit avoir la sienne. Mettons chaque chose à sa place, et que ceux qui ont savouré les joies insolentes du triomphe ne prétendent pas du moins aux honneurs de la loyauté.
Je ne m’occuperai point des querelles qui ont agité nos chambres pendant la dernière session. Je n’établirai pas de parallèle entre les divers ministères qui ont mis successivement la main aux affaires de l’Orient. Je ne prendrai parti ni pour M. Thiers ni contre M. Guizot. Sous le coup des évènemens et au bruit du canon qui renversait les remparts de Saint-Jean d’Acre, ces débats avaient leur importance. Ils apprenaient à la France comment ses intérêts avaient été compris et ses affaires dirigées ; ils faisaient connaître la valeur des hommes, le fond des opinions, le secret des positions. L’œuvre est achevée ; nous n’avons plus à la reprendre. Ce qui était alors un enseignement pour tout le monde ne pourrait plus fournir aujourd’hui qu’un prétexte à de vaines récriminations.
J’ai en vue, pour ma part, une satisfaction d’un ordre plus élevé. L’influence de la France étant à peu près détruite en Europe, je voudrais lui restituer cette réputation de bonne foi qui est son patrimoine le moins contesté depuis plusieurs siècles, et que ses ennemis d’hier,