VIGINUM
Fondation |
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Sigle |
VIGINUM |
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Forme juridique |
Service déconcentré à compétence nationale d'un ministère (hors défense) |
Domaines d'activité |
Désinformation, administration publique générale |
Siège | |
Pays |
Effectif |
+65 équivalent temps plein (unité non prise en charge) () |
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Directeur |
Marc-Antoine Brillant (d) (depuis ) |
Organisation mère | |
Budget |
7,2 M€ () |
SIREN | |
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OpenCorporates | |
Annuaire du service public |
VIGINUM est le service technique et opérationnel de l'État chargé de la vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères. Rattaché au secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale (SGDSN), ce service à compétence nationale a été créé le [1].
Historique
[modifier | modifier le code]Plusieurs pays ou groupes d'États se sont dotés de structures similaires. En 2015, l'Union européenne a créé l'East StratCom Task Force (en) (ESCTF) consacrée à la lutte contre les manipulations en provenance de Russie. Aux États-Unis, le Global Engagement Center au sein du département d'État a la mission de « diriger, synchroniser, intégrer et coordonner les efforts du gouvernement fédéral pour détecter, comprendre, exposer et contrer la propagande étatique et non-étatique, les manœuvres de désinformation visant à saper ou influer sur la politique, la sécurité ou la stabilité des États-Unis, de leurs alliés et de leurs partenaires ». Des initiatives similaires ont été prises en République tchèque et en Suède[2]. Au Royaume-Uni, ce type de mission est assuré par le programme NSCT, rattaché aux services du premier ministre[3].
L'assassinat de Samuel Paty en est suivi d'une campagne de désinformation sur les réseaux sociaux. Une « Task force Honfleur » est mise en place afin de détecter et de caractériser cette tentative de déstabilisation qui est dorénavant attribuée à la Turquie[4].
Lors du conseil de défense du , Emmanuel Macron prend la décision de lancer une mission de préfiguration à la création d'un service à compétence nationale[5]. Quatre personnes sont chargées du dossier sous la direction de Marc-Antoine Brillant.
Le nouveau service à compétence nationale est créé par le décret no 2021-922 du publié au Journal officiel du 14 juillet[1]. VIGINUM devient opérationnel à partir du 7 décembre 2021, après qu'un décret a autorisé l'agence à collecter des informations sur les réseaux sociaux et les stocker dans le « fichier de souveraineté »[6],[7]. L'agence a alors scruté les discussions sur internet concernant le référendum pour l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie, les débats sur les conséquences du Brexit, et les conversations concernant le Convoi de la liberté[8],[7]. Pour l'élection présidentielle française de 2022, l'agence surveille d'éventuelles interventions étrangères qui viseraient à promouvoir ou dénigrer un candidat, ou encore à dissuader les électeurs d'aller voter[7].
Missions
[modifier | modifier le code]La mission de VIGINUM est de détecter les manipulations de l’information venues de l’étranger visant à « déstabiliser l’État » ; il ne s'agit pas de rétablir la vérité, mais de détecter si des circulations massives d'informations sont le fruit d'une ingérence étrangère[9]. Selon Stéphane Bouillon, secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale, le service devrait permettre « aux hommes politiques, aux diplomates, à la justice et la presse de constater que sur 400 000 tweets de reprise de telle ou telle information, 200 000 viennent d’une ferme à bots dans une région hors de notre pays ou que tel débat provient d’une ferme à trolls[3],[10].
Selon le texte du décret publié au journal officiel[1], VIGINUM « est autorisé à mettre en œuvre un traitement informatisé et automatisé de données à caractère personnel ». Et « ce traitement a pour finalités la détection et la caractérisation des opérations impliquant, de manière directe ou indirecte, un État étranger ou une entité non étatique étrangère, et visant à la diffusion artificielle ou automatisée, massive et délibérée (...) d'allégations ou imputations de faits manifestement inexactes ou trompeuses de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation »[11].
Le décret prévoit que les données collectées seront conservées pendant une durée maximale de six mois et que le service VIGINUM travaillera sur les plateformes nécessitant une inscription et qui ont une audience en France supérieure à cinq millions de visiteurs uniques par mois. Le service n'analyse pas le contenu des messageries privées, comme WhatsApp ou Messenger[11],[10],[12].
Stéphane Bouillon a indiqué lors de son audition par la commission défense de l'assemblée nationale en : « Soyons bien clair, il ne s'agit absolument pas pour nous de commencer à dire telle information est exacte, telle information est inexacte. Cela c'est le rôle des politiques, des médias, et c'est le rôle de la justice. Cela ne peut pas être le rôle d'une administration et cela ne doit pas être son rôle »[13],[14].
Ensuite, selon Cédric O, VIGINUM transmettra les dossiers à la justice ou à la diplomatie[15]. Intelligence Online présente une troisième option en indiquant que le volet offensif de la contre-ingérence sera assuré par la direction du Renseignement militaire (DRM).
Organisation
[modifier | modifier le code]Direction
[modifier | modifier le code]Par un arrêté du , Gabriel Ferriol[16], ingénieur et magistrat de la Cour des comptes, est nommé à la tête de VIGINUM[17]. Diplômé de l'école Telecom Paris, spécialiste en ingénierie de l'information, de la communication et de la cognition, il commence sa carrière en tant qu'ingénieur de recherche à l'international. En 2003, il rejoint le ministère de la Défense en tant qu'ingénieur d'étude avant d'être nommé, au sein de ce ministère, responsable d'une équipe d'informaticiens, de scientifiques et d'analystes chargés de la mise au point de divers traitements automatiques de signaux électromagnétiques. Lauréat du concours de l'Ecole nationale de l'Administration en 2008, il rejoint alors la Cour des Comptes avant d'intégrer la coordination nationale du renseignement et de la lutte contre le terrorisme, en tant que conseiller pour les affaires économiques et financières. Il est ensuite nommé en 2019 avocat général près la Cour des comptes et la Cour de discipline budgétaire et financière. Gabriel Ferriol est poussé vers la sortie le 30 juillet 2023. En attendant son remplacement, l'intérim est assuré par Marc-Antoine Brillant, no 2 de Viginum[18].
Par une décision du , le lieutenant-colonel Marc-Antoine Brillant est nommé adjoint au chef de service[19]. Diplômé de l'Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr, de l'École de Guerre et de l'ESCP, il a exercé différentes fonctions opérationnelles et notamment commandé des unités de combat au Proche et Moyen-Orient avant de servir comme chef des opérations d'un groupement tactique. En 2018, il rejoint l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) en tant que conseiller auprès de la direction générale chargé des affaires opérationnelles et stratégiques, avant d'être promu sous-directeur adjoint Stratégie. En 2021, après avoir dirigé la « Task Force Honfleur », il est désigné préfigurateur du service à compétence nationale VIGINUM.
Chef | Grade ou statut | Date de nomination | Texte de nomination |
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Gabriel Ferriol | Conseiller référendaire à la Cour des comptes | 15 octobre 2021 | Arrêté du 5 octobre 2021[20] |
Marc-Antoine Brillant | Adjoint au chef de VIGINUM | 15 octobre 2023 | Arrêté du 4 octobre 2023[21] |
Comité éthique et scientifique
[modifier | modifier le code]Un comité éthique et scientifique[22], rattaché au secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale, est garant des conditions d'exercice de l'activité de VIGINUM. Il est composé d'un président choisi parmi les conseillers d'État, d'un membre de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) et de six personnalités qualifiées. Par un arrêté du 5 octobre 2021, le premier comité éthique et scientifique est composé de[23] :
- Jean-Luc Sauron[24], conseiller d'État, président du comité éthique et scientifique
- Aymeril Hoang, ancien directeur de cabinet de Mounir Mahjoubi au secrétariat d'État au Numérique[25]
- Isabelle Mandraud, cheffe adjointe du service international du Monde[26]
- Claude Kirchner, directeur de recherche émérite à l'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (INRIA) et directeur du Comité pilote d'éthique du numérique[27]
- Benoît Loutrel, membre du collège de l'ARCOM
- Jean-Maurice Ripert, ancien diplomate
- Camille Malplat, coordinatrice Afrique francophone à l'investigation numérique[26]
- Jérôme Marilly, avocat général près la cour d'appel de Paris[28]
Anciens membres :
- Marie-Christine Tarrare, procureure générale
- Béatrice Bourgeois-Machureau, conseillère d'État
- Pauline Talagrand, journaliste
- Julie Joly, journaliste directrice du Centre de formation des journalistes (CFJ) et directrice générale de l'École W
Moyens
[modifier | modifier le code]Au 30 septembre 2022, VIGINUM employait 42 agents, dont 62 % de femmes[29].
Le service devrait comporter à terme 65 personnes, principalement des spécialistes en sciences de la donnée, OSINT, sciences politiques et géopolitiques[30],[9].
Le budget de lancement est évalué à 5 millions puis 12 millions d'euros par an[31].
Guerre d'influence contre la France
[modifier | modifier le code]« L’efficacité des opérations d’influence étrangères malveillantes est celle que les populations qui en sont les cibles leur donnent. L’un des écueils auxquels nous risquerions d’être confrontés serait de surestimer leur impact », indiquent les sénateurs en introduction de leur rapport de 369 pages[32]. Outre la Russie, la commission d’enquête identifie, parmi les principaux « compétiteurs » engagés dans une guerre d’influence contre la France, la Chine, la Turquie ou encore l’Azerbaïdjan[33].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Décret n° 2021-922 du 13 juillet 2021 portant création, auprès du secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale, d'un service à compétence nationale dénommé « service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères »
- (en) « L'Agence nationale de lutte contre les manipulations de l'information, nouvelle arme anti-fake news du gouvernement », sur portail-ie.fr (consulté le ).
- « La France va créer une agence nationale de lutte contre les manipulations de l'information », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le ).
- « Que sait-on de la future agence de lutte contre les manipulations numériques venues de l'étranger ? », sur www.franceinter.fr, (consulté le ).
- (en) « FRANCE : Emmanuel Macron launches anti-fake news task force Honfleur - 01/02/2021 », sur Intelligence Online, (consulté le ).
- Cyberingérence: Viginum traque les contenus pas nets, liberation.fr, 2 février 2022, par Amaelle Guiton
- Martin Untersinger, « Présidentielle 2022 : la France se prépare à la propagande sur les réseaux sociaux pendant la campagne », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- Dominique Desaunay, « Présidentielle 2022: mise en place de l’agence Viginum pour guetter la propagande en ligne », sur RFI, (consulté le )
- Amaelle Guiton, « Manipulations de l’information : comment la France s’est mise en ordre de bataille », sur Libération (consulté le )
- « Viginum, un service pour détecter les tentatives d'ingérence sur les réseaux sociaux », sur France Culture, (consulté le )
- Claudia Cohen, « Ingérence numérique : l'agence d'État Viginum pourra surveiller nos publications sur les réseaux sociaux », sur Le Figaro, (consulté le )
- « Décret no 2021-1587 du 7 décembre 2021 portant autorisation d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dans le but d'identifier les ingérences numériques étrangères »,
- « Question au Secrétaire général de la Défense et de la Sécurité nationale. » (consulté le ).
- « Le gouvernement va lutter contre les fake news venues de l'étranger avec une quarantaine de Geeks », sur La Revue du Digital, (consulté le ).
- « Invité du matin - Cédric O: À six mois de l'élection présidentielle, « Il faut se préparer aux cyberattaques » », sur RFI, (consulté le )
- « Biographie de Gabriel Ferriol, chef du service VIGINUM »,
- Claudia Cohen, « Gabriel Ferriol nommé chef de Viginum, l'arme de l'État contre les ingérences numériques étrangères », sur Le Figaro, (consulté le )
- Elsa Trujillo, « Viginum : les dessous d'une exfiltration au cœur de l'État » , La Lettre A, (consulté le )
- Décision du 15 juillet 2021 portant nomination de l'adjoint au chef du service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères
- « Arrêté du 5 octobre 2021 portant nomination du chef du service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères - M. FERRIOL (Gabriel) », sur www.legifrance.gouv.fr, (consulté le )
- « Arrêté du 4 octobre 2023 portant nomination du chef du service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères », sur legifrance.gouv.fr, (consulté le )
- « Comité éthique et scientifique »
- « Arrêté du 5 octobre 2021 relatif à la composition du comité éthique et scientifique chargé de suivre l'activité du service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères », sur www.legifrance.gouv.fr, (consulté le )
- Arrêté du 3 novembre 2023 relatif à la composition du comité éthique et scientifique chargé de suivre l'activité du service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (lire en ligne)
- ActeursPublics, « Aymeril Hoang, l'architecte discret du projet d'application StopCovid », sur Aymeril Hoang, l'architecte discret du projet d'application StopCovid (consulté le )
- Arrêté du 28 décembre 2023 relatif à la composition du comité éthique et scientifique chargé de suivre l'activité du service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (lire en ligne)
- « Claude Kirchner, directeur du Comité d'éthique du numérique : "La conception et la mise en œuvre du suivi numérique doivent être faites avec la participation citoyenne" », sur L'Humanité, (consulté le )
- « Arrêté du 3 février 2023 relatif à la composition du comité éthique et scientifique chargé de suivre l'activité du service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères », sur Légifrance (consulté le )
- VIGINUM, « VIGINUM ANNÉE #1 » [PDF], sur sgdsn.gouv.fr, (consulté le )
- « Place de l'emploi public »
- Pierre Alonso et Amaelle Guiton, « Les dessous de « Viginum », la future agence contre les manipulations de l'information », sur Libération (consulté le ).
- Lutte contre les influences étrangères malveillantes. Pour une mobilisation de toute la Nation face à la néo-guerre froide - Rapport.
- « Face aux opérations malveillantes, les propositions du Sénat pour gagner la « néo-guerre froide » », Le Figaro, (lire en ligne, consulté le ).
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Arnaud Le Dez et Général Olivier Bonnet de Paillerets, Tactique cyber : Le combat numérique, Economica, , 148 p. (ISBN 978-2717870602)
- (en) Dr Case Cunningham (trad. Cyber guerre - Vérité, tactiques et stratégies: concepts stratégiques et vérités pour vous aider, vous et votre organisation, à survivre sur le champ de bataille de la cyber-guerre), Cyber Warfare - Truth, Tactics, and Strategies: Strategic concepts and truths to help you and your organization survive on the battleground of cyber warfare, Packt Publishing, , 330 p. (ISBN 978-1839216992)
- (en) Morey J. Haber (trad. Vecteurs d'attaque privilégiés : Construire des stratégies de cyber-défense efficaces pour protéger les organisations), Privileged Attack Vectors : Building Effective Cyber-Defense Strategies to Protect Organizations, Apress, , 420 p., 2e éd. (ISBN 978-1484259139)
- Stéphane Fosse, Cyber Cache-Cache : Règles d'or de la vie privée, Stéphane FOSSE, , 140 p. (ISBN 978-2959208935)Protégez votre vie numérique : Le guide essentiel de cybersécurité pour tous.
Articles connexes
[modifier | modifier le code]- Renseignement d'origine source ouverte (OSINT)
- Loi contre la manipulation de l'information, loi française promulguée le 22 décembre 2018
- Diffusion de fausse nouvelle, infraction pénale française
- Désinformation
- Fake news
- Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI)
- Pôle d'expertise de la régulation numérique (PEReN)
- Commission Bronner
- Commandement de la cyberdéfense
- Cyberharcèlement
Liens externes
[modifier | modifier le code]- Page sur le site du SGDSN
- Décret no 2021-922 du 13 juillet 2021 portant création, auprès du secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale, d'un service à compétence nationale dénommé « service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères »
- Décret no 2021-1587 du 7 décembre 2021 portant autorisation d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dans le but d'identifier les ingérences numériques étrangères
- Délibération no 2021-116 du 7 octobre 2021 portant avis sur un projet de décret portant création d'un traitement automatisé de données à caractère personnel visant à détecter et caractériser les opérations d'ingérence numérique étrangères aux fins de manipulation de l'information sur les plateformes en ligne (demande d'avis no 21013837)