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Page:Ducros - Les Encyclopédistes.djvu/273

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traîner péniblement à la remorque du grand dictionnaire. Un Encyclopédiste avait écrit en riant qu’ « un prêtre marié ne méritait guère moins devant Dieu en supportant les défauts de sa femme et de ses enfants qu’en résistant aux tentations de la chair, » et Bonhomme de répliquer gravement : « Y aurait-il donc tant de défauts à supporter dans une épouse vertueuse et dans des enfants bien élevés ? » L’Encyclopédie avait allégué, contre le célibat, le mariage des ministres anglais ; mais, répond Bonhomme sans sourciller, un prêtre français est bien plus occupé que ne l’est dans sa famille un ministre anglais : « il sacrifie presque tous les jours ! » Après cela, Bonhomme avait bien raison, et plus encore qu’il ne croyait, de s’écrier en raidissant ses petits bras contre « le déluge des livres impies », que : « tous les talents se trouvaient réunis pour combattre Jésus-Christ. »

Un autre, l’abbé Yvon, prétend réfuter « l’oracle des philosophes[1] ». C’est Voltaire qu’il désigne ainsi, et il prouve, par raisons démonstratives délayées en deux forts volumes, que Voltaire « s’est déclaré l’ennemi de toutes les nations, de tous les États et du genre humain. » Pour mieux faire éclater à nos yeux l’impuissance des philosophes, il nous les montre, admirez son astuce ! incapables de rien changer aux lois de la nature : si vous voulez qu’on vous croie, leur répète-t-il, « donnez la preuve de votre mission : citez vos miracles ! » Il est bien certain, en effet, que Voltaire n’avait jamais ressuscité personne ; ce « valétudinaire », c’est ainsi que l’injurie l’abbé Guyon, se contentait de ressusciter lui-même tous les matins pour immoler gaiment quelque nouvel adversaire, et son éternelle jeunesse était le seul miracle dont pouvaient témoigner, sinon se réjouir, l’abbé Yvon et ses amis.

Voici maintenant l’abbé de Crillon avec ses laborieuses allégories : comme avait fait déjà le sot inventeur des

  1. Par l’Oracle des nouveaux philosophes (anonyme). Berne, 1760, 2 volumes.