L.T. Piver
L.T. Piver est la plus ancienne maison[1] de parfumerie française encore en activité. Fondée en 1774[2], la boutique de parfumerie « seule brevetée du Roi »[2] fut à l’origine et la source des tout premiers parfums de synthèse. En 2024 encore, L.T. Piver nous propose des compositions qui contribuent à la richesse de son patrimoine[3]. Les nouvelles gammes qui portent le nom de parfumeur ont été conçues dans le respect de l’authenticité des valeurs olfactives, de l’imagerie ancienne des étiquettes et des habillages.
Parfums L.T. Piver Paris | |
Création | 1774 |
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Dates clés | 25-03-1988 immatriculation de la société actuelle |
Fondateurs | Louis Toussaint Piver |
Forme juridique | Société par actions simplifiée |
Slogan | L.T. Piver parfume le monde depuis 1774 |
Siège social | Paris France |
Direction | Nelly Chenelat (2022) |
Activité | Fabrication de parfums et de produits pour la toilette |
Filiales | E.Coudray |
SIREN | 344035761 |
Site web | www.piver.com |
Chiffre d'affaires | 4 602 400 € en 2017 |
Résultat net | 137 900 € en 2017 |
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Historique
modifierGuillaume Dissey & Louis Toussaint Piver
modifierÀ l'origine de l'histoire de L.T. Piver se trouve une enseigne nommée "À la Reine des Fleurs", fondée par le maître gantier-parfumeur Michel Adam à Versailles. Au XVIIIe siècle, les gants en cuir étaient souvent parfumés pour ajouter une touche de luxe et masquer les odeurs naturelles du matériau. Ainsi est née l'eau de toilette "À la Reine des Fleurs"[1], inaugurant une nouvelle parfumerie le 8 juillet 1774 au 82 rue des Lombards à Paris[1]. Initialement destiné aux pièces de cuir, ce parfum a rapidement conquis la Cour de Louis XVI[2] grâce à son Essence Vestimentale[2], mêlant des notes de lavande, d'épices et d'herbes, séduisant hommes et femmes de la haute société.
En 1805, Pierre Guillaume Dissey, cousin de Michel Adam, reprend la société[1] et engage Louis Toussaint Piver[1] comme apprenti pour ses connaissances en chimie. En 1813, ils s'associent et établissent leur entreprise au 111-113, rue Saint-Martin[4], sous le nom "Dissey et Piver", avec pour signature commerciale "À la Reine des Fleurs". Cette collaboration permet à Louis Toussaint Piver d'apporter un regard novateur sur la création des parfums et le mélange des essences[1].
Dès 1817, des succursales sont ouvertes en Angleterre, Belgique, Russie et au Brésil, marquant le début d'une expansion internationale[4]. Sous la direction ambitieuse de Piver et Dissey, la société lance une large gamme de produits cosmétiques et de parfums, comptant plus de 1100 produits présentés dans « Catalogue des parfumeries superfines et savons de toilette de Dissey et Piver » imprimé en 1827 par l'imprimerie de Honoré de Balzac. (BNF : 8-WZ-3909)[3]
La gamme de produits s'étendait au-delà des eaux de toilette, incluant une variété de savons parfumés, d'accessoires tels que des sachets de satin et des gants, ainsi que des produits divers comme du cirage, de la moutarde, et des articles médicinaux. L'entreprise s'est rapidement imposée[2] comme une référence incontournable[2] dans la haute société de Paris et au-delà, grâce[non neutre] à ses créations innovantes[Lesquelles ?] et ses flacons
L'expansion internationale s'est poursuivie avec l'ouverture de succursales à Londres, Bruxelles et Barcelone, consolidant la réputation de l'enseigne dans les grandes capitales européennes. Par la suite, la marque s'est établie à travers le monde, notamment à New York, Mexico, Moscou et Hong-Kong, devenant une référence en matière de parfumerie[4].
Pierre-François-Pascal Guerlain, le cœur plein d’ambition[Quoi ?], signe en 1822, un contrat avec la société Dissey et Piver, la parfumerie a une solide réputation[1] déjà établie dans Paris[5]. Il fondera sa maison éponyme en 1828[5].
Louis Toussaint Piver
modifierAprès le décès de Pierre-Guillaume Dissey en 1823, l'entreprise se transforme en "L.T. Piver", pour celui qui en prendra la direction, Louis Toussaint Piver toujours sous la marque "À la Reine des Fleurs"[4]. Cette année-là, l'entreprise obtient le prestigieux[non neutre] titre de fournisseur officiel de la Cour de Versailles, officialisée à la demande de Charles X[6],[2], suivi en 1825 de celui de la Duchesse de Berry. Cette reconnaissance consacre « La Reine des Fleurs » comme un acteur majeur du commerce de luxe de la parfumerie à Paris[7].
Les créations de L.T. Piver sont recherchées dans des Cours d'Europe, recevant des brevets d'Eau de Cologne de personnalités telles que Guillaume IV[7] d'Angleterre, la Reine Adélaïde, Louis-Philippe, la Reine d'Espagne, Dona Maria : la Reine du Portugal, Leopold Ier : le Roi des Belges, le Roi du Danemark et la Princesse Frédérique de Prusse[7]. Les produits du 111 rue Faubourg Saint Martin deviennent synonymes de raffinement dans les cercles sociaux et culturels européens, ainsi qu'au-delà des frontières[2].
En 1826, Piver établit une usine à la Villette[4], équipée des dernières avancées[Lesquelles ?] pour optimiser le travail des ouvriers. Il prend des mesures pour lutter contre la contrefaçon en créant un cachet de garantie accompagnant chaque produit[1].
Malgré le déclin économique après la révolution de 1830, dite les Trois Glorieuses, L.T. Piver, fatigué et ayant perdu son associé, décide progressivement de se retirer des affaires. En 1832, il vend l'entreprise à Messier et Amavet[1], avec une clause spéciale maintenant leurs deux neveux, Alphonse Dissey et Alphonse Piver, dans leurs postes actuels. Cette décision suggère une volonté de maintenir l'entreprise dans la famille, avec l'espoir que les jeunes neveux acquerront avec le temps l'expérience nécessaire pour assurer l'avenir de la parfumerie.
En 1833, un magasin est ouvert au 103 rue Saint-Martin[2], tandis que les locaux aux numéros 111 et 113 sont réservés comme entrepôts[2]. Un laboratoire, conçu par Alphonse Piver[8], est installé dans l'arrière-cour, témoignant de l'engagement continu de l'entreprise envers l'innovation et la qualité. L'intérieur du magasin est décrit comme élégant, avec des boiseries en teck, des meubles en acajou et des tapis floraux, reflétant le luxe associé à la marque[9].
Alphonse Piver
modifierAprès le départ de Louis Toussaint Piver en 1837[5], Alphonse Dissey et Alphonse Piver, neveux de Louis Toussaint, reprennent l'entreprise avec la même conviction en l'avenir de la parfumerie. Sous la direction d'Alphonse Piver, l'entreprise prospère et élargit son catalogue. Alphonse Piver ne se contente pas de suivre les tendances, il innove en créant de nouveaux produits tels que le Lait d'Iris et le savon au Suc de Laitue. Ces produits attirent l'attention de l'Empereur Napoléon III[4], qui les utilise pour ses massages quotidiens, permettant à Alphonse Piver d'afficher sur ses véhicules de livraison : "Fournisseur de sa Majesté l'Empereur". Pour l'Impératrice Eugénie[4], il concocte l'essence nommée Fleurs d'Andalousie[4], renforçant ainsi la réputation nobiliaire de ses produits.
A la suite de l'acquisition de l'usine de distillation des Capucines à Grasse[1], Alphonse Piver établit sa marque comme une référence de qualité et d'excellence[1]. Ses efforts sont récompensés par des distinctions tout au long de sa carrière[1], témoignant de la supériorité de ses produits[1].
En 1851 et en 1862[7], L.T. Piver reçoit la Prize Medal à Londres, et en 1855[8], la médaille de 1ère classe à Paris. En 1865[6], la Maison reçoit la médaille de 1ère classe à Porto. En 1867[6], son fondateur est nommé Chevalier de la Légion d'honneur, puis en 1878[2], elle obtient la Médaille d'argent de 1ère classe à Paris, accompagnée de la promotion au grade d'officier de la Légion d'honneur[1].
En parallèle des parfums reconnus[réf. nécessaire], la maison L.T. Piver lance des lignes complètes de produits de beauté et d'hygiène, incluant des gants et des colifichets parfumés, des poudres de riz, des savons au Suc de Laitue ou à la guimauve, ainsi que des crèmes et des laits pour le visage[1].
Le génie[Quoi ?] d'Alphonse Piver s'étend également à ses inventions mécaniques, pour lesquelles il dépose des brevets. Il comprend l'importance d'anticiper les progrès technologiques et crée la Machine Pneumatique[7], révolutionnant l'extraction des parfums à partir des fleurs. Son séchoir automatique[7], breveté en 1864[7], permet de produire cinq cents douzaines de savon par jour, marquant une avancée significative dans la fabrication industrielle[8].
Outre ses talents créatifs et techniques[non neutre], Alphonse Piver manifeste un profond engagement social envers ses ouvriers. Il est le premier parfumeur à chauffer ses ateliers et à mettre en place des allocations pour les femmes en couches et des plans de retraite pour les travailleurs[7].
À la fin des années 1860, et d’après un article paru en 1867 dans Le Monde Illustré, L.T. Piver possédait, à cette époque, cinq magasins de vente à Paris : 23 boulevard des Italiens, 29 place de la Bourse, 44 rue de la Chaussée d’Antin, 28 place Vendôme, 9 boulevard Poissonnière, 2 boutiques à l’étranger : 160 Regent Street à Londres[6], 41 rue des Bouchers à Bruxelles[6], ainsi que trois usines situées respectivement à Paris (10, boulevard de Strasbourg[8]), à La Villette[6] (qui deviendra l’usine d’Aubervilliers[1]) et à Grasse (Alpes-Maritimes[1]).
Lucien Toussaint Piver
modifierLucien Toussaint Piver n'était pas un créateur de génie comme son père Alphonse Piver, mais il était un chimiste consciencieux doté d'une intelligence avertie[9]. Sa modestie et sa bonté lui ont valu l'estime de tous ceux qui ont eu le privilège de le connaître[9]. Formé par son père, Alphonse Piver, et son grand-père, Louis Toussaint Piver, Lucien a su s'entourer de compétences nouvelles telles que Pierre Armingeat, le "nez" de la maison, le chimiste et professeur émérite de la Sorbonne, Georges Darzens, Jacques Rouché, un polytechnicien passionné des beaux-arts et du théâtre qui était également son gendre, ainsi que ses cousins Nocard, et bien d'autres collaborateurs de valeur. En 1910, Lucien Toussaint Piver se retire des affaires[9].
Jacques Rouché
modifierEn 1896, Jacques Rouché, le gendre de Lucien Toussaint Piver, lors directeur de La Grande Revue, le théâtre des Arts (aujourd'hui théâtre Hébertot[10]) et l’Opéra de Paris[10] à en devenir, est nommé administrateur de l'entreprise. Afin de moderniser la société L.T. Pive, et croyant fermement en l’avenir de la parfumerie par la chimie, Rouché engage des ingénieurs chimistes pour développer les premiers parfums de synthèse. Parmi eux se trouve Georges Darzens[11], un polytechnicien et agrégé de physique, considéré comme un expert dans le domaine[6]. Ensemble, Rouché et Darzens révolutionnent l'art de la parfumerie en introduisant de nouvelles matières chimiques dans la composition des parfums[4], permettant ainsi de remplacer certaines essences naturelles et de fixer les autres, ce qui créera les principes de la parfumerie moderne[Quoi ?]. Darzens, à l'origine de la synthétisation du salicylate d'amyle[11], contribue à cette percée en créant l'un des ingrédients clés du Trèfle Incarnat. Ce fut première création, "Le Trèfle Incarnat", connaît un succès notable et devient célèbre pour ses présentations modernes[9] qui reflètent l'enthousiasme[10] de Rouché pour cet art nouveau. Cette réussite lui permet de prendre la direction du laboratoire de recherche de L.T. Piver, où il reste de 1897 jusqu'en 1920 et où Darzens inventera la réaction de Darzens[11].
L.T. Piver connaît alors une expansion à travers le monde au 19ème siècle[9], établissant des filiales commerciales et des unités de production dans de nombreux pays à travers le monde, dont Londres, Anvers, Gand, Milan, Vienne, Moscou, New York, Mexico, Buenos Aires, et Hong-Kong[9]. Au début du XXe siècle, L.T. Piver devient l'une des rares entreprises françaises à réaliser plus de la moitié de son chiffre d'affaires à l'exportation, ce qui lui vaut le surnom de "parfumeur du monde". Les parfums L.T. Piver, renommés à l'international, continuent de marquer l'histoire avec des créations telles que Trèfle Incarnat (1898), Pompeia (1907), Rêve d'Or (1889), Azur (1926), Violette Précieuse (1938), Cuir de Russie (1944), Côte d'Azur (1953), Ispahan (1960), Camaïeu (1975), Nue (1980), et Onde Sensuelle (1988)[4].
L'usine d'Aubervilliers[12], dirigée pendant de nombreuses années par Georges Gobet, a été un pilier de la production, employant jusqu'à 1 500 personnes en 1926 et produisant quotidiennement jusqu'à 50 tonnes de produits cosmétiques[9]. Après le départ de Rouché en 1970[10], l'entreprise continue son parcours sous de nouveaux propriétaires et célèbre son bicentenaire en 1974.
En 2021, Nelly Chenelat devient la nouvelle gardienne de cette histoire exceptionnelle, souhaitant perpétuer l'héritage de L.T. Piver pour les générations futures[13].
Présentation sociale et économique
modifierEn 1989, L.T. Piver est racheté par la famille franco-algérienne Amouyal[13] au groupe de chimie Rhône-Poulenc[2].
La société est finalement rachetée en 2022, par Nelly Chenelat, forte de 20 années d'expérience dans le domaine des cosmétiques et de la parfumerie. Madame Chenelat, entend moderniser la marque tout en assurant la continuité de son héritage historique[13].
Le siège de la maison se trouve aujourd’hui au 84 rue du Faubourg Saint Honoré (Paris), au coeur du Triangle d’Or de la capitale française et possède son site production et usine à Chartres en Eure-et-Loir. La production des parfums L.T. Piver reste Made In France.
Les parfums E. Coudray sont une de leurs filiales[2].
Galerie
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Publicité des années 1880.
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L'usine d'Aubervilliers vers 1900.
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Publicité des années 1920.
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Gravure de la Maison L.T. Piver
Notes et références
modifier- Gaston Vassy, La reine des fleurs: légende hindoue, Piver, (lire en ligne)
- Annick Le Guérer, Le Parfum: Des origines à nos jours, Odile Jacob, (ISBN 978-2-7381-8783-3, lire en ligne)
- Imprimerie Honoré de Balzac, « Catalogue des parfumeries superfines et savons de toilette »
- Elisabeth de Feydeau, Les parfums: histoire, anthologie, dictionnaire, R. Laffont, (ISBN 978-2-221-11007-2, lire en ligne)
- Élisabeth de Feydeau, Le roman des Guerlain. Parfumeurs de Paris, Flammarion, (ISBN 978-2-08-140691-9, lire en ligne)
- Paris guide, Paris guide, par les principaux écrivains et artistes de la France, A. Lacroix, Verboeckhoven, (lire en ligne)
- Pierre Sipriot, Ce fabuleux XIXe siècle: L'histoire extraordinaire[non neutre] de ces inventions qui transformèrent le monde, FeniXX, (ISBN 978-2-7144-8896-1, lire en ligne)
- Catalogue officiel: exposition universelle de 1862 à Londres (London) : section française, Impr. Imperiale, (lire en ligne)
- Maurice Brunetti, Parfums d'histoire, Presses du Midi, (ISBN 978-2-87867-308-1, lire en ligne)
- Dominique Garban, Jacques Rouché: l'homme qui sauva l'Opéra de Paris, Somogy, (ISBN 978-2-7572-0097-1, lire en ligne)
- Daniel Auliac, Le roman de Reschal, ou, Un romancier marginal, Editions Publibook, (ISBN 978-2-7483-5196-5, lire en ligne)
- Serge Zeyons, Sorties d'usines en cartes postales, Editions de l'Atelier, (ISBN 978-2-7082-3304-1, lire en ligne)
- PAPPERS, « Société L.T. Piver »