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« Mouvement des Gilets jaunes » : différence entre les versions

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Version du 7 novembre 2019 à 23:14

Mouvement des Gilets jaunes
Description de cette image, également commentée ci-après
Rassemblement à Belfort, le .
Informations
Date Depuis le
(5 ans, 11 mois et 26 jours)
Localisation Drapeau de la France France
Caractéristiques
Organisateurs Aucun (mouvement sans structuration hiérarchique)
Participants Pic le  :
entre 287 700 (ministère de l'Intérieur) et 1,3 million (France Police – Policiers en colère) de personnes
Revendications Changement de politique fiscale, amélioration du niveau de vie des classes populaires et moyennes, référendum d'initiative citoyenne, démission d'Emmanuel Macron
Types de manifestations Port de gilet de haute visibilité, manifestations non déclarées, manifestations déclarées, blocages d'axes routiers, opérations péages gratuits
Bilan humain
Morts 11[a]
Blessés 4 439[b] (au )
Arrestations 12 107 interpellations
10 718 gardes à vue
2 000 condamnations
()[1]

Le mouvement des Gilets jaunes — du nom des gilets de haute visibilité de couleur jaune portés par les manifestants — est un mouvement de protestation non structuré et sporadique apparu en France en qui trouve son origine dans la diffusion, principalement sur les réseaux sociaux, d'appels à manifester contre l'augmentation du prix des carburants automobiles issue de la hausse de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Les manifestations ont lieu essentiellement le samedi.

À partir du , la contestation s'organise autour de blocages de routes et ronds-points et de manifestations tous les samedis. Ces protestations mobilisent surtout les habitants des zones rurales et périurbaines, mais s’organisent également dans des métropoles, où se produisent plusieurs épisodes violents, notamment sur l’avenue des Champs-Élysées.

Rapidement, les revendications du mouvement s'élargissent aux domaines sociaux et politiques. Lors des rassemblements, le plus souvent non déclarés, plusieurs milliers de personnes sont blessées, aussi bien du côté des manifestants que des forces de l'ordre. Des associations comme Amnesty International critiquent une conduite inadaptée du maintien de l'ordre et des institutions comme l'ONU et le Conseil de l'Europe s’interrogent sur l'usage d'armes comme les LBD et les grenades de désencerclement.

Face à l'ampleur de ce mouvement, le gouvernement renonce à la hausse de la TICPE. Le président de la République, Emmanuel Macron, annonce ensuite des mesures, entérinées par la loi portant mesures d'urgence économiques et sociales, puis lance le grand débat national, à l'issue duquel il annonce notamment une baisse d'impôts pour les classes moyennes et la réindexation des petites retraites. Mais cette réponse ne met pas fin au mouvement : des manifestations, moins nombreuses, persistent sous différentes formes.

Contexte

Ce mouvement social trouve ses racines dans une remise en cause de la politique fiscale, un sentiment de délaissement d'une partie des territoires, et une défiance grandissante à l'égard du fonctionnement des institutions françaises. Ce mouvement semble également être chronologiquement le premier d'une vague de mouvements sociaux qui commence à la fin de 2018 et qui continue en 2019.

Niveau de vie, prix des carburants et fiscalité

Sous la présidence de François Hollande, l'instauration de la taxe carbone ne rencontre pas une forte hostilité dans l'opinion publique, le prix du pétrole étant plutôt en baisse lors de son quinquennat. Mais entre 2017 et 2018, le prix du baril passe de 40 à 80 dollars environ ; la hausse des tarifs s’élève à 28 % pour le fioul domestique, à 22 % pour le gaz naturel, à 21 % pour le diesel, à 13 % pour l'essence[5]. Le phénomène est amplifié par une augmentation de la taxe carbone, prévue dès sa mise en place mais que le gouvernement d'Édouard Philippe décide d'accélérer[6].

Cette hausse importante des prix des hydrocarbures est d'autant plus sensible que l'étalement urbain, qui se développe à partir des années 1970, fait de l'automobile un mode de transport quasi-incontournable pour les personnes habitant en zone périurbaine[7]. Mais ce sont les ruraux qui vont manifester le plus fortement leur mécontentement, la voiture étant un objet indispensable pour travailler et avoir une vie sociale dans des territoires où les classes populaires — hommes ouvriers et femmes précarisées, souvent à temps partiel — sont sur-représentées[8].

Alors qu'en 2017, le ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot, n'avait pas eu de difficultés à faire voter les hausses de la fiscalité énergétique, le débat parlementaire est beaucoup plus vif en 2018, La Tribune indiquant que « l'incompréhension d'une partie des citoyens provoque une véritable fronde qui se cristallise sur le prix des carburants »[5]. Mais le gouvernement ignore les avertissements de la Commission nationale du débat public, consécutifs au débat public sur la programmation pluriannuelle de l'énergie, sur l'acceptabilité de la hausse de la taxe carbone, qu’elle juge pénalisante pour « les plus dépendants et les plus captifs aux énergies fossiles » en l'absence de refonte de la fiscalité générale[9].

D'autres médias soulignent que le « ras-le-bol fiscal » est plus global que la simple question du prix des carburants[10],[11],[12]. Le poids des prélèvements obligatoires (impôts, taxes et cotisations) a crû de manière quasi continue depuis la crise de 2008 pour passer de 41 % du PIB en 2009 à plus de 45 % en 2017. Cette hausse est principalement ressentie par les classes moyennes[12]. Selon le cabinet EY, le gouvernement a mis en place huit impôts et taxes supplémentaires entre le début de la présidence d’Emmanuel Macron et la fin de l’année 2018[10]. Le Monde met en lumière la stagnation du niveau de vie depuis dix ans et la croissance des inégalités depuis vingt ans, relevant « trop de taxes, des prélèvements injustes ou mal répartis, [une] fiscalité mise en accusation »[13].

De façon plus ponctuelle, la forte médiatisation de l’arrestation du chef d'entreprise Carlos Ghosn pour raisons fiscales au Japon, au tout du début du mouvement, a pu renforcer un sentiment d’iniquité[14],[15].

Sentiment de délaissement de certains territoires

Nombre de demandeurs d'emploi en France entre 2007 et 2017 selon Pôle emploi.

Une enquête publiée en par le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie met en avant un sentiment de délaissement par les pouvoirs publics de certaines franges de la population. Trois personnes sur dix estiment vivre dans un territoire délaissé, un sentiment d’abandon qui est à la fois géographique et social. Les problèmes liés à l'emploi, aux transports et à l'accès aux soins sont centraux. Cette perception est plus forte dans les territoires situés en dehors des grandes aires urbaines[16],[17],[18].

Pour expliquer le mouvement, l'universitaire et vice-président de l’Association de géographes français Samuel Depraz met en avant « la disparition de 60 % des sites militaires d’ici à 2020, surtout dans le Grand Est, de 30 % des tribunaux d’instance entre 2007 et 2010 dans toutes les petites villes, et de 15 % des maternités en sept ans, surtout dans les régions rurales »[19].

La fronde contre la limitation de vitesse à 80 km/h, mesure prise sans concertation avec les collectivités territoriales, et très majoritairement incomprise dans les campagnes et zones périurbaines, est analysée par certains comme un précurseur du mouvement des Gilets jaunes après le démarrage de celui-ci[20].

Défiance vis-à-vis de la classe politique et des corps intermédiaires

À partir de la fin des années 2000, le taux d'abstention aux élections augmente de façon continue pour atteindre des niveaux records sous la Ve République[21],[22]. L'étude annuelle OpinionWay-CEVIPOF publiée pendant le mouvement des Gilets jaunes fait état d'un niveau de défiance historique des Français vis-à-vis des acteurs politiques, des institutions politiques, des syndicats et des médias[23],[24]. Le président de la République, Emmanuel Macron, élu en 2017, perd rapidement en popularité. Ses déclarations et les mesures économiques qu'il fait prendre le font paraître éloigné de la plupart des Français (notamment ceux qui habitent en zones rurales)[25],[26]. De leur côté, les syndicats professionnels connaissent une érosion continue de leurs adhérents[27],[28]. C'est ainsi que, fin 2018, certains Gilets jaunes ont la volonté de « renverser les élites », qu’elles soient politiques ou syndicales[29],[30],[31]. Certains analystes considèrent que le mouvement se situe dans le prolongement de la « disruption » opérée par Emmanuel Macron dans le champ politique français[32],[33]. Gérard Noiriel affirme : « Ce sont deux illustrations du nouvel âge de la démocratie dans lequel nous sommes entrés, et que Bernard Manin appelle la « démocratie du public ». De même que les électeurs se prononcent en fonction de l'offre politique du moment — et de moins en moins par fidélité à un parti politique —, de même les mouvements sociaux éclatent aujourd'hui en fonction d'une conjoncture et d'une actualité précises »[34]. À propos de La République en marche et des Gilets jaunes, Rémi Lefebvre écrit : « [Ils sont] le produit tout autant que les ferments d’une dynamique de désintermédiation de la politique qui n’est pas propre à la France, mais ronge l’ensemble des démocraties occidentales. Ils portent les intérêts de groupes sociaux qui ne se sentaient plus représentés, invisibilisés ou déniés. Les médiations traditionnelles sont court-circuitées par des organisations ou des mouvements qui surgissent et les déstabilisent en utilisant les réseaux sociaux, les plateformes et des formes à la fois horizontales et verticales de mobilisation. Ils traduisent ainsi chacun à leur manière la décomposition des organisations politiques et l’affaiblissement de leur ancrage social »[35].

Déroulement

Gilets jaunes à Belfort le .

Le gilet de haute visibilité, dit « gilet jaune », est utilisé comme symbole et signe de ralliement ; porté par les manifestants, il est également placé par des soutiens du mouvement au-dessus du tableau de bord ou sur la plage arrière de leur véhicule[36],[37]. Faisant suite à des appels d’anonymes sur les réseaux sociaux, le mouvement se traduit par des blocages d'axes routiers et des manifestations chaque samedi — dénommées « actes » —, qui sont plusieurs fois violentes, notamment à Paris. La durée de cette contestation est un phénomène unique sous la Ve République.

Organisation du mouvement

À la différence des manifestations traditionnelles, coordonnées par des organisations syndicales, le mouvement des Gilets jaunes est lancé et se développe initialement uniquement via le web, au travers de médias sociaux (Facebook, Twitter, YouTube) ou de plateformes dédiées. Les principaux syndicats français, bousculés par ce mouvement, ne le soutiennent pas lors de son démarrage[38],[39].

Le mouvement n'est pas structuré à l'image d'un mouvement politique, syndical ou d'une association. Les groupes Facebook et leurs administrateurs constituent des médias où ils sont en confiance[c],[42]. Selon l'analyse des Décodeurs, l'organisation du mouvement sur Facebook s'appuie tout particulièrement sur des groupes départementaux baptisés « Colère », nés entre janvier et février 2018 notamment en réaction à l'abaissement de la limitation de vitesse à 80 km/h sur les routes secondaires, ainsi que sur la « patriosphère », qui inclut « des groupes Facebook militants comme « Debout la France » ou « Rassemblement national HBM » », et « la nébuleuse des anti-Macron », « le plus souvent à l’extrême droite du spectre politique », tandis que les « communautés de gauche et d'extrême gauche » ont été inactives[43].

Au début du mouvement, Éric Drouet et Maxime Nicolle, administrateurs de groupes Facebook du mouvement, disaient chercher à renouveler la façon de gérer un mouvement social. Par ce nouveau média, ils voulaient instituer ce que Libération nomme une « démocratie de l'audience », d'autant que Facebook survalorise par ses algorithmes le contenu des groupes au détriment des contenus postés par des pages et donc par les médias traditionnels. Dans cet esprit, Éric Drouet avait voulu que la rencontre entre lui-même, Priscillia Ludosky et le ministre de l'Écologie, François de Rugy, soit filmée dans un souci de transparence[44].

Plusieurs manifestants sont désignés comme porte-paroles par des Gilets jaunes ou sont mis en avant par les médias. Au début du mouvement, les principales personnalités médiatisées sont Éric Drouet, qui a lancé sur Facebook l'appel au rassemblement du , Priscillia Ludosky, à l'origine de la pétition en ligne de mai 2018 appelant à la baisse des prix du carburant[45], Jacline Mouraud, dont la vidéo à l'adresse d’Emmanuel Macron est devenue virale[46],[47]. Ils sont en général issus d'horizons différents et dans des situations professionnelles diverses. Mais l'historien Gérard Noiriel souligne que « le combat des Gilets jaunes a été lancé par des gens qui appartenaient plutôt à la petite bourgeoisie indépendante » mais « aucun salarié d'usine », citant Éric Drouet, Priscillia Ludosky, Maxime Nicolle, Fabrice Schlegel, Jacline Mouraud[48], Benjamin Cauchy[49],[48] et Christophe Chalençon[48]. D’autres figures apparaissent dans les médias, comme François Boulo[50], Ingrid Levavasseur[51] ou Jérôme Rodrigues[52].

Le , un groupe de huit personnes issues de différentes régions où le mouvement est actif s'autoproclament « porte-paroles » afin de servir d'interlocuteur avec le gouvernement[53]. De nombreux Gilets jaunes s'inquiètent alors du risque de récupération politique et d’un manque de représentativité de ces « porte-paroles »[54]. Le , les huit représentants sont conviés pour une rencontre avec Édouard Philippe, mais seul un d'entre eux s'entretient avec le Premier ministre à Matignon ; la délégation des porte-paroles est alors considérée comme dissoute[55].

Manifestations

Actions

Les protestations s'organisent autour de blocages d’axes routiers et de ronds-points, notamment en régions, et de manifestations nationales organisées chaque samedi, appelées « actes » et numérotés, qui trouvent un plus grand écho médiatique que les autres actions.

Dans Libération, l’universitaire Samuel Depraz explique, à propos du blocage des ronds-points : « Les Gilets jaunes se sont d’abord bloqués eux-mêmes en ralentissant leur propre accès aux centres d’agglomération. Pourtant, le choix de ces lieux n’est pas dû au hasard : cela permet de bloquer assez efficacement les flux économiques des camions de livraison et ralentit la fluidité des échanges routiers entre métropoles, puisqu’on se positionne exactement à la limite des unités urbaines, aux entrées de ville - la carte du 17 novembre montrait cette surreprésentation spatiale. Plus encore, c’est un territoire vécu, pleinement maîtrisé par les manifestantes et manifestants : ce sont les lieux de la « France contrainte », c’est-à-dire de cette population essentiellement périurbaine qui, sans être la plus pauvre de France (on a une voiture, un logement), est la plus pénalisée par les dépenses pré-engagées, c’est-à-dire les factures, le coût de l’essence et autres remboursements d’emprunts.[19] »

Le mouvement commence le (premier « acte »), journée durant laquelle plus de 3 000 sites sont occupés en France selon le ministère de l'Intérieur[56],[57],[58]. La mobilisation se poursuit dans les semaines qui suivent partout en France[59] et se déplace progressivement vers les centres urbains[19].

Nombre de participants

Manifestations à Marseille, compilant différents chants et slogans de Gilets jaunes en France.

Le comptage des participants est difficile car les parcours lors des rassemblements des samedis ne sont pas connus à l'avance et les manifestants ne font pas tous le même. Il n'est pas possible d'installer des postes de comptage comme dans les manifestations classiques[60].

Chaque samedi, le ministère de l’Intérieur publie des chiffres du nombre de manifestants qu’il révise parfois par la suite. Des élus et organisations syndicales dénoncent régulièrement une sous-évaluation volontaire de ces chiffres par le gouvernement[61]. Ces évaluations ne sont pas non plus reconnues par les Gilets jaunes.

France Police – Policiers en colère, un syndicat policier minoritaire proche de l'extrême droite[62], publie des chiffres qui font état d'un nombre beaucoup plus important de manifestants que ceux du ministère, mais qui sont aussi contestés[63]. À partir de l'acte VII, Le Nombre jaune, un collectif de Gilets jaunes, annonce recenser le nombre de manifestants en recoupant plusieurs sources (presse régionale, vidéos, etc.). Ses chiffres sont selon lui a minima en raison d’un « manque d’informations et de référents locaux »[64]. Le différentiel avec les chiffres du ministère de l’Intérieur est similaire à celui constaté lors des précédentes manifestations en France entre les chiffres donnés par le gouvernement et ceux des syndicats ou d’autres groupes[64].

Selon l'historien Gérard Noiriel, ce n'est pas « le nombre des manifestants qui explique l'importance de ce mouvement social », le pic observé en novembre 2018 étant « un score modeste comparé aux grandes manifestations populaires du passé », mais « l'articulation entre des milliers d'actions groupusculaires réparties sur tout le territoire et les grands défilés sur les Champs-Élysées »[65].

Graphique présentant le nombre de manifestants (en milliers) par acte

  • Ministère de l'Intérieur
  • Le Nombre jaune
  • France Police - Policiers en colère

N.B. : Pour l'acte 18 (), le nombre de manifestants recensé par Le Nombre jaune (231 000 personnes)[66] n’est pas mentionné supra en raison de l'impossibilité du collectif d’obtenir certains chiffres locaux distinguant les Gilets jaunes des participants à la marche pour le climat.

Violences

Attribuées aux manifestants

Façade d'une banque dans le 17e arrondissement de Paris.

À la suite de violences et affrontements avec les forces de l'ordre, un couvre-feu partiel est en vigueur sur l'île de La Réunion du 20 au [67].

Lors de l'« acte II », sur l'avenue des Champs-Élysées, à Paris, des barricades sont montées puis incendiées, des abribus cassés et des vitrines de commerces brisées[68]. Le samedi suivant, des casseurs vandalisent l'arc de triomphe de l'Étoile[69],[70], tandis qu'une partie de la préfecture du Puy-en-Velay est incendiée[71]. La situation se calme durant l'« acte IV », avec en particulier des Gilets jaunes s'opposant à des casseurs[72],[73]. Lors de l'« acte VIII », la destruction avec un engin de chantier de la porte de la cour de l'hôtel de Rothelin-Charolais conduit à l’évacuation du secrétaire d’État et porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux[74],[75].

Dès le , de façon à éviter la présence de « casseurs » et en l'absence de service d'ordre organisé par les manifestants, des responsables syndicaux de la CGT et de FO proposent aux Gilets jaunes de mettre à leur disposition leur service d'ordre ; en l'absence de coordination du mouvement, ces appels ne reçoivent guère d'écho[76]. À Paris, un service d'ordre est finalement mis en place par les manifestants le suivant[77].

Selon le politologue Thomas Guénolé, les « casseurs » sont de trois ordres : des manifestants pacifiques devenus violents en réaction aux violences policières, des activistes d'ultragauche et d'ultradroite venus dans un but insurrectionnel, et des pillards venus vandaliser des magasins. Il considère que les Gilets jaunes adoptent des méthodes différentes : certains veulent devenir une société civile contre-pouvoir face à Emmanuel Macron, d'autres veulent créer un mouvement politique autogéré qui serait l'équivalent du Mouvement 5 étoiles italien, certains veulent continuer à privilégier l'action de rue dans un rapport de force, tandis que d'autres veulent des grèves et des actions de blocage relevant de la grève générale[78].

Le Fouquet's le .

L’« acte XVIII », le , marque le retour d'importantes violences à Paris, avec notamment l’incendie d'une agence bancaire et de la brasserie le Fouquet's[79]. Au total, des casseurs et un black bloc de plus de 1 500 personnes[80] dégradent 216 commerces[81] (27 d'entre eux sont pillés[82]). Les autorités déplorent 79 incendies, dont cinq de bâtiments[82], et la destruction de la quasi-totalité des kiosques à journaux de l'avenue des Champs-Élysées[83],[84]. Le secrétaire général de l'UNSA Police déclare que les agents des forces de l'ordre étaient « en mesure d'intervenir » pour contrer ces violences, mais qu'ils n’ont pas été « autorisés à le faire »[85]. Le préfet de police de Paris, Michel Delpuech, est alors limogé et remplacé par Didier Lallement[86].

En marge du mouvement, des députés, en particulier ceux de LREM, sont pris à partie, dans des proportions inédites sous la Ve République selon l'historien Christophe Bellon[87]. Selon son confrère Jean Garrigues, il s'agit d'« un phénomène inédit depuis la guerre d'Algérie » et les exactions de l'Organisation armée secrète (OAS)[88]. Une nouvelle vague de violences exercées symboliquement à l'encontre d'élus de LREM se produit après la validation par l'Assemblée nationale de l'accord CETA, ces violences associant des partisans des Gilets jaunes, des agriculteurs et des black blocks[89].

Début septembre 2019, une enquête Ipsos indique que 8 % des Français trouvent justifiées les violences commises par les Gilets jaunes et que 57 % les considèrent comme inacceptables[90]. Les ouvriers et les sympathisants LFI et RN montrent une plus grande compréhension pour ces violences[90].

Attribuées aux agents des forces de l'ordre

Jérôme Rodrigues, une des figures des Gilets jaunes, éborgné début 2019[91].

Les violences intervenant envers des manifestants sont d’un niveau inédit en France, avec « des blessures hors du commun pour des manifestations »[92]. Plusieurs Gilets jaunes perdent ainsi un œil ou une main[93],[94]. La blessure puis la perte de l'œil de Jérôme Rodrigues, un des chefs de file du mouvement, sont particulièrement médiatisées[95], et une enquête est diligentée pour déterminer les circonstances ayant conduit à cette blessure[96].

De nombreux manifestants sont blessés en raison de l'utilisation d'armes proscrites ailleurs en Europe pour ce type d'intervention et considérées par certains fabricants[d] comme des armes de guerre : lanceurs de balle de défense (Flash-Ball) et grenades de désencerclement (notamment des grenades GLI-F4)[98]. Au , Checknews de Libération dénombre 109 blessés graves parmi les Gilets jaunes et journalistes, 78 l'étant à la suite de tirs de lanceurs de balle de défense[94]. Des médias se font l'écho de tirs tendus avec des lanceurs de lacrymogènes à hauteur d'homme, et le président de Gendxxi reconnaît que des LBD ont été utilisés « de façon un peu déviante, comme une arme d'attaque et non de défense »[99],[100]. Des vidéos montrent des policiers tirant avec des LBD à hauteur de tête[101],[102],[103]. La Gendarmerie mobile justifie l’utilisation de l'explosif GLI-F4 par la volonté de préserver l'intégrité physique des forces de l'ordre[92]. Fin , six organisations, dont la Ligue des droits de l'homme, l'UNEF et le Syndicat de la magistrature, estimant que les LBD doivent être interdits, demandent au Conseil d'État de saisir le Conseil constitutionnel pour faire « cesser ces atteintes graves et répétées aux droits fondamentaux » », mais leur demande est rejetée[104],[97]. Le Défenseur des droits, Jacques Toubon, réclame également que les lanceurs de balle de défense et les grenades explosives soient interdits en raison de la dangerosité qu'ils présenteraient « pour l'intégrité » des manifestants[105],[106].

Dans un rapport publié le , Amnesty International dénonce un « usage excessif de la force » contre des manifestants pacifiques, des fouilles et arrestations abusives (notamment sur des street medics), ainsi que les conditions « inhumain[es] » de l'interpellation le à Mantes-la-Jolie de 148 lycéens, agenouillés et menottés pendant plusieurs heures[107],[108],[109],[110]. L'ONU et le Parlement européen évoquent également un usage excessif de la force[111],[112].

Le , vingt-quatre photographes et journalistes déposent plainte pour violences policières, dont huit pour violences avec arme, à la suite d’une intervention de Christophe Castaner invitant les professionnels à porter plainte en cas d'abus[113],[114]. En avril, le Syndicat national des journalistes et Reporters sans frontières invoquent des atteintes à la liberté d'informer. Selon Reporters sans frontières, quelque 90 journalistes ont été victimes de violences policières depuis le début du mouvement[115],[116],[117]. David Dufresne recense 62 signalements de violences policières contre les journalistes[118].

L'Inspection générale de la Police nationale (IGPN) a ouvert, au début du mois de , un total de 116 enquêtes après des plaintes de manifestants[119]. Le journaliste David Dufresne dénombre, au , 1 décès et 613 personnes blessées par les forces de l'ordre, dont 238 blessées à la tête, 23 éborgnées et 5 ayant eu une main arrachée[120]. Le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, réfute toute violence policière[121],[120].

Le , le ministre récompense quelque 9 000 membres des forces de sécurité au titre de la « promotion exceptionnelle médaille de la sécurité intérieure « Gilets jaunes » », dont certains impliqués dans des enquêtes concernant des violences policières lors du mouvement[122],[e].

Début septembre 2019, une enquête Ipsos indique que 12 % des Français trouvent justifiées les violences commises par les forces de l'ordre contre les Gilets jaunes et que 46 % les considèrent comme inacceptables[90]. Les retraités et les cadres, ainsi que les sympathisants LREM, LR et RN montrent une plus grande compréhension pour ces violences et une forte minorité les justifient[90].

Le 2 novembre 2019, 18 médecins et chercheurs français publient un article intitulé « Blessures oculaires causées par des armes non-létales en France » dans la revue scientifique médicale britannique The Lancet. L'article compte vingt-cinq cas de blessures oculaires en 2018 et quinze sur la période de l'étude de 2019, alors qu'il n'y avait que 2 cas en 2016 et un cas en 2017[124],[125].

Revendications

Le mouvement des Gilets jaunes n'étant ni structuré, ni centralisé, ses revendications traduisent des aspirations très diverses. Des slogans sont souvent inscrits au dos des gilets jaunes, mais aussi sur des pancartes ou tags[126].

Les revendications ne concernent pas uniquement le prix des carburants. Pour Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l'Ifop, « le mouvement des Gilets jaunes est la cristallisation d'un mécontentement massif des Français sur le pouvoir d'achat, dont le révélateur est le carburant »[127].

Prix des carburants

La protestation s'insurge contre une hausse jugée excessive des prix des carburants à la pompe, notamment en raison de l’augmentation de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), qui comprend depuis 2014 une composante carbone, et de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), qui dépend de la TICPE[128],[129], l’objectif affiché par le gouvernement étant la régulation des variations du prix du pétrole.

Ce mouvement protestataire à l'égard du prix des carburants concerne essentiellement des particuliers, car un certain nombre de professions et d'activités bénéficient d'exonérations partielles ou totales de la TICPE[130].

Démocratie directe et participative

Manifestation à Paris lors de l’« acte IX ».

Des membres du mouvement demandent sur Internet et lors des manifestations la mise en place d’une « démocratie directe »[131],[132].

Dans une tribune publiée le , un collectif nommé « Gilets jaunes libres » propose notamment au gouvernement l'ouverture d'États généraux de la fiscalité, l'organisation fréquente de référendums sur les grandes orientations sociales et sociétales et l'adoption du scrutin proportionnel pour les élections législatives[133].

À partir du mois de , l'instauration d'un référendum d'initiative citoyenne (RIC) apparaît comme l'une des principales revendications du mouvement[134],[135]. Un tel système vise à permettre de légiférer sans passer par le Parlement[136],[137]. Des Gilets jaunes citent les outils de démocratie directe en Suisse en exemple[138]. L'historien Sylvain Boulouque indique que la revendication « apparaît timidement aux lendemains de la manifestation du 24 novembre » et devient « quasiment virale à partir du 2 décembre » sur les pages des réseaux sociaux des Gilets jaunes[139].

Autres revendications

Une revendication récurrente des manifestants est la démission du président de la République, Emmanuel Macron, une proposition qui est soutenue par la moitié des Français répondant à un sondage YouGov réalisé début décembre 2018[140],[141],[142].

Des revendications portent également sur des mesures défavorables aux automobilistes (prix des péages, du contrôle technique des véhicules, limitation de la vitesse à 80 km/h sur des routes secondaires, multiplication de radars sophistiqués), et parfois sur les retraites, la baisse de la CSG, l'éducation, la culture ou encore la santé[127],[143],[144],[145],[146],[147].

Au fil des semaines, une partie du mouvement s’étend à la question de l’immigration[148],[149]. Des Gilets jaunes s'opposent notamment au Pacte mondial sur les migrations, signé par l’exécutif français pendant le mouvement[150],[151].

Le , une délégation de huit Gilets jaunes, désignés dans l'urgence et à titre provisoire par des animateurs du mouvement, communique une liste de 45 revendications dans plusieurs domaines (transports, pouvoir d'achat, impôts, retraites et aides sociales, travail, démocratie et institutions, services publics et de proximité, entreprises, santé, logement, immigration)[145]. Ils proposent notamment la mise en place d'une taxe sur le fioul maritime et le kérosène, l'augmentation du SMIC à 1 300 euros et l'abandon de l'impôt retenu à la source[152],[153],[154]. L'historien Samuel Hayat écrit à ce sujet : « Cette liste a été qualifiée de « magma de revendications hétéroclite ». Il me semble au contraire qu’elle est profondément cohérente, et que ce qui lui donne sa cohérence est aussi ce qui a permis à la mobilisation des Gilets jaunes de prendre et de durer : elle s’ancre dans ce que l’on peut appeler l’économie morale des classes populaires. »[155]. Le politiste Rémi Lefebvre juge cette liste « relativement cohérente » et considère que « si les revendications ont été évolutives, souvent contradictoires et non priorisées, formant une liste à la Prévert », les Gilets jaunes se sont accordés sur « un socle de revendications [qui] fait l’unanimité autour d’un agenda de justice sociale », à savoir « la revalorisation du SMIC, le rétablissement de l’ISF, l’augmentation des retraites »[35].

Réponse du pouvoir exécutif

Sur la composition du mouvement

Le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, est accusé par l’opposition d'amalgame et de réduire les Gilets jaunes à des « séditieux d'ultradroite » à la suite des mobilisations du [156]. Emmanuel Macron déclare à la fin de que les violences commises lors des manifestations sont l’œuvre « de 40 à 50 000 militants ultras qui veulent la destruction des institutions ». Mediapart indique qu'à la même période, les services de renseignement ont décompté seulement quelques centaines d'ultras au plus fort du mouvement, début décembre 2018, et quelques dizaines en mars 2019, en signalant un désengagement de l’ultradroite « à Paris comme en province » et une implication restée « limitée » de l'ultragauche[157].

Gestion des manifestations

Mesures de maintien de l'ordre

Manifestants face aux forces de l’ordre à Rouen, le .

Le mouvement est marqué par une très importante mobilisation des forces de l'ordre les samedis (jusqu'à 89 000 agents, lors de l’acte IV). Des véhicules blindés de la Gendarmerie sont également présents, une mesure exceptionnelle en France métropolitaine[158],[159]. Des policiers, parfois masqués, infiltrent en civil les manifestants[160],[161]. Dans une note du , le procureur de la République de Paris invite les procureurs à lever les gardes à vue le plus tardivement possible, même en cas de classement sans suite, et à inscrire les Gilets jaunes interpellés sur le fichier de traitement des antécédents judiciaires, là encore y compris si les dossiers sont classés sans suite[162].

Le gouvernement annonce une loi pour lutter contre les « casseurs » permettant notamment de sanctionner les organisateurs de manifestations non déclarées et l’instauration d'un fichier pour interdire la présence de manifestants radicaux dans les cortèges[163]. Les mesures envisagées dans ce projet de loi posent des questions d'ordre juridique, notamment vis-à-vis du droit de manifester[164]. En outre, après l'« acte 18 », l'exécutif passe le montant de la contravention pour participation à une manifestation interdite à 135 euros, soit une multiplication par 3,5[165].

Les réponses du gouvernement sont perçues par plusieurs organisations internationales comme une répression policière disproportionnée. Des membres du Conseil de l'Europe et de l'ONU expriment leurs inquiétudes vis-à-vis du projet de loi[166],[167]. La commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Dunja Mijatović, remet un mémorandum invitant les autorités françaises à « mieux respecter les droits de l’homme », à « ne pas apporter de restrictions excessives à la liberté de réunion pacifique » et à « suspendre l’usage du lanceur de balle de défense »[168].

Après la censure de l'interdiction administrative de manifester par le Conseil constitutionnel, la loi anticasseurs est promulguée par Emmanuel Macron le [169].

Poursuites judiciaires

Selon le gouvernement, au , parmi tous les manifestants interpellés, plus de 8 700 ont été placés en garde à vue, 2 000 ont été condamnés et 390 incarcérés[170]. Ces chiffres constituent un record pour un mouvement social en France[171]. Le sociologue Fabien Jobard indique que le nombre d'environ 1 500 gardes à vue en une journée, atteint le , est « un record, bien au-delà de ce que l’on a vu à l’occasion de sommets internationaux tels que, dernièrement, le G20 de Hambourg, pourtant marqué par des destructions et, plus rarement, des pillages »[172].

Début , après avoir appelé à « entrer » à l'Élysée, Éric Drouet fait l'objet d'une enquête pour « provocation à la commission d'un crime ou d'un délit » et « organisation d'une manifestation illicite »[173] ; le mois suivant, il est interpellé pour la troisième fois et placé en garde à vue[174],[175],[176],[177].

La justice est suspectée de freiner les plaintes visant la police. Le Canard enchaîné indique le qu'aucune des 227 procédures ouvertes par l'Inspection générale de la Police nationale (IGPN) n'a abouti[178]. À cette date, l’IGPN a bouclé 59 enquêtes, dont les dossiers ont été envoyés à la justice, mais cette dernière n'a encore pris aucune décision, ni de poursuivre ni de classer[179].

Traitement des revendications

Opposition initiale à toute revendication

Dans un premier temps, le , le gouvernement réaffirme qu'il ne reviendra pas sur la hausse prévue des taxes sur les carburants, et annonce la revalorisation de la prime à la conversion[f] et l'augmentation du nombre de bénéficiaires du chèque énergie[g] et du système d’indemnités kilométriques[h],[180],[181],[182]. Le suivant, l'exécutif affirme qu’il renonce à une partie de ces mesures, puis annonce le même jour son souhait de toutes les maintenir[183],[184].

Emmanuel Macron s'exprime le , lors de la présentation de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE). Il annonce plusieurs mesures s'inscrivant dans le cadre de la transition énergétique et ne fait pas de concession aux Gilets jaunes en matière de taxes[185]. Ce même jour, alors même que l'exécutif avait précédemment exprimé son refus d'entamer toute négociation, le ministre de la Transition écologique et solidaire, François de Rugy, reçoit deux représentants des Gilets jaunes ; à l'issue de la réunion, ces derniers ne se montrent pas convaincus et le ministre indique que les revendications exprimées « vont très au-delà des questions de la transition écologique »[186],[187]. Édouard Philippe convie huit des porte-paroles à Matignon le , mais seul un d’entre eux accepte finalement de s'entretenir avec le Premier ministre[188],[189].

Recul sur les taxes sur les carburants

Le , alors que le mouvement se poursuit et que les représentants des Gilets jaunes refusent de le rencontrer, Édouard Philippe revient sur la position du gouvernement, décrétant un moratoire de six mois sur la hausse annoncée des taxes sur les carburants[190]. Cette annonce est jugée insuffisante par les Gilets jaunes et l'opposition au Gouvernement[191],[192],[193]. Le lendemain, la présidence de la République annonce que la hausse des taxes ne figurera pas dans le projet de loi de finances pour 2019[194].

Allocution d'Emmanuel Macron du 10 décembre 2018

Emmanuel Macron le .

Lors d'une allocution prononcée le et vue par 23 millions de personnes, Emmanuel Macron annonce l'augmentation du revenu[195] d'un travailleur au SMIC de 100 euros par mois dès 2019 « sans qu'il en coûte un euro de plus pour l'employeur », le retour à la défiscalisation des heures supplémentaires, l'annulation de la hausse de la CSG pour les retraites de moins de 2 000 euros par mois et une défiscalisation de la prime de fin d'année dans les entreprises[i],[199],[200]. Il s'oppose au rétablissement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), une demande de certains Gilets jaunes[201],[k].

Plusieurs médias relèvent que la hausse du revenu des travailleurs au SMIC reposera en grande partie (80 %) sur la mise en œuvre dès 2019 de sa promesse de hausse de la prime d'activité alors que celle-ci était prévue sur les trois années à venir[203],[204]. L'augmentation de la prime d'activité ne donne pas de droits supplémentaires, ni sur la retraite, ni sur l'assurance-chômage[205].

Les annonces d'Emmanuel Macron sont traduites dans la loi du portant mesures d'urgence économiques et sociales. Évaluées à 10,3 milliards d'euros, ces mesures doivent être financées à hauteur de quatre milliards par un plan d’économies, avec notamment une taxe sur les « géants du Web », la diminution de dépenses publiques, une réduction de la baisse de l'impôt sur les sociétés et la limitation de la niche Copé[206]. Pour le reliquat de 6,3 milliards d'euros, il est décidé de laisser filer le déficit budgétaire de 2,8 % à 3,2 %, soit au-delà du seuil des 3 % prévus par les critères de convergence européens[207].

Grand débat national

Pour tenter de désamorcer la crise, l'exécutif lance un grand débat national, qui se déroule de mi- à mi-. Cette consultation propose de faire remonter les souhaits des Français autour de quatre grands thèmes (transition écologique, fiscalité, services publics et débat démocratique), le gouvernement excluant notamment l’immigration, la peine de mort, l’interruption volontaire de grossesse et le mariage homosexuel de la consultation[208],[209]. Plusieurs défaillances ou manipulations dans la tenue et la restitution des résultats par le gouvernement sont relevées par les médias[210]. Le , Emmanuel Macron conclut le débat par une conférence de presse à l'Élysée, au cours de laquelle il annonce notamment une baisse de l'impôt sur le revenu et la réindexation des petites retraites sur l'inflation[211].

À partir de , Emmanuel Macron reconnaît des « erreurs », notamment de méthode, dans sa gestion de la crise des Gilets jaunes[212],[213].

Consultations organisées par des Gilets jaunes

En parallèle des manifestations, des consultations sont organisées par des Gilets jaunes dans toute la France, sous la forme de réunions publiques ou de plateforme en ligne.

« Le Vrai débat »

En réaction au grand débat national, des Gilets jaunes obtiennent du prestataire de l'État, la société Cap Collectif, l'ouverture de la plateforme « Le Vrai débat »[214]. Cette consultation en ligne se veut plus ouverte que le grand débat, cherchant à favoriser « l’expression spontanée et le vote ». Les thématiques abordées sont cependant définies au préalable, comme pour le grand débat[215].

En mars 2019, un laboratoire de recherche en lexicométrie de l’université Toulouse-III publie une étude analytique sur « Le Vrai débat ». Celle-ci montre que les 44 576 comptes créés ont fait ressortir trois familles de revendications, données ici par ordre d'importance : 1°) économie, finances, travail, comptes publics ; 2°) démocratie, institutions, référendum d'initiative citoyenne ; 3°) expression libre et sujets de société. Le rapport souligne que cette consultation n'est pas un sondage et qu'il serait risqué d'en tirer des conclusions sur toute la population[215]. Les propositions ayant retenu le plus de votes s'orientent notamment sur la fin des privilèges des élus et sur la démocratie directe[216].

« Assemblée des assemblées »

En , se tient à Commercy (Meuse) l'« Assemblée des assemblées », une assemblée générale de Gilets jaunes réunissant 70 délégations, venues de toute la France. En avril, une deuxième édition a lieu à Saint-Nazaire, rassemblant entre 700 et 800 délégués, et donne lieu à une déclaration dans laquelle l'assemblée réaffirme les revendications principales de lutte contre la pauvreté et son indépendance vis-à-vis des formations politiques ou syndicales[217]. Une troisième édition se tient en à Montceau-les-Mines[35]. Ces réunions cherchent à structurer le mouvement[218].

Profil des manifestants et des soutiens

Milieu social et motivations

Manifestants le à Belfort.

La spontanéité du mouvement des Gilets jaunes, son absence d'encadrement partisan, de structure et de revendications claires ont fait qu'il a été analysé comme une jacquerie fiscale moderne, c'est-à-dire un mouvement de colère populaire dû à une fiscalité jugée injuste ou mal répartie[219],[220]. Toutefois, pour Gérard Noiriel, l'emploi de ce terme de jacquerie est inadéquat : l'analogie des situations est imparfaite et le propos passe pour condescendant et péjoratif[221]. Gérard Grunberg propose quant à lui une comparaison avec les sans-culottes, notamment au travers de leur critique commune du gouvernement représentatif[222].

Beaucoup de manifestants, qui représentent principalement les classes moyennes, expriment le sentiment de mépris dont ils estiment faire l’objet de la part des élites urbaines[223]. La Süddeutsche Zeitung y voit ainsi « la rébellion d’une classe moyenne qui se sent marginalisée socialement et géographiquement par les personnes les mieux rémunérées des grandes villes »[224].

Pour Vincent Tiberj, professeur à l’IEP de Bordeaux, les Gilets jaunes « incarnent ce que le sociologue Olivier Schwartz appelle les « petits moyens » : ils travaillent, paient des impôts et gagnent trop pour être aidés et pas assez pour bien vivre »[225]. Pour certains, la thématique du chômage est absente des protestations[226],[227]. Pour d'autres, au contraire, elle entre indirectement en considération au travers des revendications relatives aux minima sociaux et à leur indexation sur l'inflation[228],[229], à la suppression du travail détaché[230], aux aides au retour à l'emploi et à la reconversion professionnelle[231], à la limitation du recours au CDD par les grandes entreprises[232], à la création d'emplois pour les chômeurs[233], à la suppression des mesures ayant alourdi le contrôle des demandeurs d'emploi par Pôle emploi[234],[235].

D'après des études démographiques de chercheurs en sciences sociales en cours de publication, beaucoup de Gilets jaunes seraient célibataires. Pour Romain Huret, directeur d’études à l’EHESS, la condition du célibat expliquerait en partie leur mobilisation[236].

Selon une enquête du Cevipof menée en décembre 2018, le soutien aux Gilets jaunes dans la population française est « très fortement clivé sur le plan social » et le mouvement « reste surtout soutenu par une alliance de catégories populaires et moyennes contre les classes supérieures – ce qui semble bien réactiver une forme de lutte des classes » selon le politologue Luc Rouban[237]. S'appuyant sur une étude de l’Observatoire société et consommation, qui a comparé le profil social de celles et ceux qui soutiennent et s’opposent aux Gilets jaunes, l'historien Samuel Hayat observe « bien sûr des corrélations, par exemple entre le niveau de diplôme ou de revenus et l’absence de soutien », mais estime qu'« à part les très riches très diplômés, il n’existe pas de milieux sociaux homogènes dans leurs critiques du mouvement. Et même ceux qui critiquent le mouvement, par exemple sur la question de la violence, reconnaissent majoritairement la validité des revendications qu’il porte »[238].

Mouvement rural et périurbain

La contestation concerne essentiellement les zones rurales et périurbaines. Plusieurs facteurs sont avancés pour expliquer la surreprésentation dans le mouvement de personnes habitant dans ces territoires : proportion élevée d'ouvriers et employés, forte exposition aux taxes, utilisation contrainte de la voiture en raison de l'absence de transports publics[227]. Le démographe Hervé Le Bras fait apparaître une forte mobilisation dans la « diagonale du vide », qui va de la Meuse aux Landes[239].

En revanche, le mouvement rencontre un faible écho dans des territoires urbains comme la Seine-Saint-Denis[240]. Des personnes habitant certaines banlieues défavorisées restent en effet à l'écart du mouvement, ne se retrouvant pas dans certaines revendications, s'inquiétant de l'implication de groupes d'extrême droite, craignant une répression policière et gardant un souvenir amer des émeutes de 2005[241],[242],[243].

Mobilisation des femmes

Manifestante s’exprimant à Rouen, le .

La participation des femmes aux protestations est jugée importante : elle est estimée à quelque 45 % du nombre de manifestants, et de nombreuses figures du mouvement sont des femmes[244],[245],[246]. Selon Le Figaro et Les Inrockuptibles, cette forte mobilisation est la marque d'un malaise social profond, les femmes étant particulièrement concernées par les questions liées au niveau de vie[246],[247].

À partir du dimanche , à la suite d'un appel pour une « marche pour les femmes », des femmes se regroupent et manifestent dans plusieurs villes afin de donner une image plus « pacifique » du mouvement[248],[249],[250]. Selon LCI, qui note notamment l'existence d'un groupe Facebook réservé exclusivement aux femmes, « certains comportements se rapportent bel et bien à la sphère militante »[251].

Cette mobilisation à parts égales trouble les cadrages médiatiques du mouvement pour qui l’émeutier ne peut être une émeutière. Par ailleurs, les femmes Gilets jaunes investissent un répertoire d’actions physiques ordinairement masculin, barrant les routes, « libérant » les péages et occupant des lieux du quotidien[252].

Orientations politiques

Une enquête d'opinion réalisée par Elabe fin fait état d'une « sur-représentation des électeurs de Marine Le Pen chez les Français se définissant comme Gilets jaunes », 42 % de ses électeurs lors de l'élection présidentielle de 2017 se définissant comme tels (contre respectivement 20 % et 5 % chez les électeurs de Jean-Luc Mélenchon et d'Emmanuel Macron)[253]. Les autres études confirment que les sympathisants RN et FI sont plus enclins à soutenir le mouvement que ceux des autres partis[254],[255].

Selon une enquête menée en décembre 2018 par le Cevipof, le soutien dans la population française aux Gilets jaunes « s’inscrit très généralement dans l’opposition à Emmanuel Macron ». Il s'associe également à « une forte critique du capitalisme », ainsi qu'à un niveau de « populisme fort ». Concernant le choix lors de l'élection présidentielle de 2017, « la proportion de ceux qui soutiennent « tout à fait » les « gilets jaunes » est de 47 % dans l’électorat de Jean‑Luc Mélenchon et de 57 % dans celui de Marine Le Pen, bien avant l’électorat de Benoît Hamon où cette proportion n’est plus que de 34 %, de Nicolas Dupont-Aignan (31 %), de François Fillon (15 %) et d’Emmanuel Macron (9 %) ». Le chercheur Luc Rouban souligne par ailleurs que « 44 % de ceux qui soutiennent « tout à fait » le mouvement font confiance à Marine Le Pen (dont 21 % disent qu’ils n’avaient pas confiance en elle mais qu’elle a gagné leur confiance) contre 27 % à Jean‑Luc Mélenchon », et que ce groupe de soutien fort aux Gilets jaunes est marqué par un faible niveau de libéralisme culturel. Il considère ainsi que « le soutien aux « gilets jaunes » s’inscrit bien plus dans l’univers politique du RN que de LFI », et que « le centre de gravité des valeurs situe sinon le mouvement lui-même, du moins son soutien le plus déterminé, [...] du côté du populisme de droite »[237].

Réagissant notamment à l'analyse de Luc Rouban, le collectif d'universitaires Quantité critique souligne que « cette interprétation de la politisation du mouvement à l’extrême droite est loin de faire consensus dans le foisonnement d’enquêtes collectives apparues depuis novembre [2018] », et considère que « l’échelle d’observation » a « une influence déterminante sur les résultats obtenus par les enquêtes ». Il fait ainsi « l’hypothèse d’une configuration du mouvement en cercles concentriques. On constate un succès des discours d’extrême droite dans ses marges extérieures peu mobilisées, sensibles aux thèmes réactionnaires. En revanche, ces idées ne parviennent que très difficilement à pénétrer le noyau dur des gilets jaunes actifs »[256].

Se référant aux programmes des candidats à la présidentielle de 2017, Les Décodeurs du quotidien Le Monde estiment que les revendications du mouvement — dont ils précisent qu’« [elles] ne sont pas officielles, le mouvement étant caractérisé par son horizontalité »[l] — sont « très proches de la gauche radicale »[m], « compatibles avec l’extrême droite »[n] et « très éloignées des programmes libéraux d’Emmanuel Macron ou de François Fillon »[257]. L’historien Sylvain Boulouque indique que le « nouveau serment du Jeu de paume », prononcé par des figures des Gilets jaunes le 13 décembre 2018, « représente un étonnant syncrétisme » entre les programmes du Rassemblement national, de La France insoumise et de l'Union populaire républicaine[139]. Alors qu'ils sont souvent qualifiés d’anti-écologistes, les Gilets jaunes se disent majoritairement écologistes et ceux pour qui l’écologie n’est pas une priorité sont très minoritaires[258].

Au fil des semaines, notamment à partir de , les études d’opinion montrent une baisse sensible du soutien des sympathisants du Rassemblement national (RN) aux Gilets jaunes, les partisans de La France insoumise étant désormais plus favorables au mouvement que ceux du RN[259],[260]. À l'approche des élections européennes de 2019, pour lesquelles les sondages situent le RN en tête avec LREM, certains observateurs considèrent cependant que le RN est la force d’opposition qui a le plus bénéficié de la crise des Gilets jaunes[256]. Selon le dernier sondage Ifop paru avant les élections européennes de 2019, 44 % des personnes interrogées déclarant « se sentir » Gilets jaunes indiquent vouloir voter pour le RN, contre 12 % pour LFI et 4 % pour LREM, tandis que 31 % des simples « soutiens » des Gilets jaunes affirment vouloir voter en faveur du RN[261]. Selon une enquête Ipsos, parmi les soutiens du mouvement, 44 % ont déclaré voter pour le RN, 20 % pour LFI, et environ la moitié d’entre eux déclarent s’être abstenus[262].

Relations avec les médias

Fichier:Manifestants29décembre.jpg
Gilets jaunes devant la maison de la Radio (Paris, ).

Au tout début de la mobilisation, les médias traditionnels se montrent bienveillants à l'égard du mouvement, « traité comme très rarement l’a été un mouvement social » selon Mediapart. Mais, à partir des premiers samedis de décembre, ils mettent principalement en avant les violences intervenant en marge des manifestations[263].

Les Gilets jaunes manifestent leur hostilité à l'égard des médias classiques, en particulier de BFM TV : Mediapart souligne que la chaîne d'information en continu est « devenue le symbole à la fois de la couverture en direct des événements et des commentaires incessants des éditorialistes de plateau », et qu'elle est, dans le même temps, accusée par Emmanuel Macron d'avoir été « le principal organisateur des manifestations »[263]. Les Gilets jaunes estiment en particulier que la couverture médiatique de leur mouvement ne correspond pas à la réalité de la situation. Ils reprochent notamment aux médias de se montrer favorables au pouvoir en place et de projeter une image déformée du mouvement. La mise en avant des « casseurs »[263],[264] caractérise, de leur point de vue, le parti pris de ces médias dans la mesure où ces derniers sont accusés de servir une tactique gouvernementale qui joue sur la peur des violences ainsi que sur le pourrissement de la mobilisation. Les Gilets jaunes leur reprochent dès lors de prendre part à la manipulation de l'opinion publique[265]. Le mouvement se montre souvent bienveillant à l'égard de RT France — qui accueille sur ses plateaux de nombreux Gilets jaunes ou soutiens du mouvement et dont le site web diffuse des retransmissions en directs, non commentées, des manifestations —, ainsi que de certains journalistes tels que Rémy Buisine, producteur de live pour Brut, et Vincent Lapierre, ex-vidéaste pour Égalité et Réconciliation[263],[266].

Dans ce contexte, des manifestants agressent des journalistes ou bloquent les centres d'impression de journaux[267],[268]. Plusieurs rédactions prennent des mesures pour assurer la sécurité des journalistes[269],[270]. D'après les journalistes qui couvrent habituellement les manifestations, les agressions contre les journalistes ont débuté une dizaine d’années avant le mouvement des Gilets jaunes et sont croissantes avec le temps. Selon le directeur de la chaîne de télévision France Info, les violences contre les journalistes sont le fait de minorités, et beaucoup de journalistes de France Info ont été bien accueillis en région[271]. Arrêt sur images relève que « malgré un nombre de blessés considérablement plus important par les forces de l'ordre, la focale médiatique se fixe davantage sur les violences commises par les manifestants » à l'égard des journalistes[272].

Les Gilets jaunes privilégient Internet et en particulier Facebook pour s'informer et se mobiliser[273]. Selon un sondage mené en décembre 2018, 59 % des Français se définissant comme Gilets jaunes, lorsqu'ils s'informent en ligne, disent utiliser d'abord les réseaux sociaux (contre 37 % de l'ensemble des Français) avant les portails d'actualité ou les sites des grands médias[274]. Selon Mediapart, « les médias traditionnels, et par extension la majorité des journalistes, sont critiqués par les militants parce qu’ils incarnent une forme de médiation, de représentation, refusée par le mouvement », tandis que « les médias qu’ils plébiscitent leur offrent justement cette instantanéité sans médiation, ou presque »[263]. Le sociologue Gérald Bronner considère que « ce mouvement est une continuation d’Internet dans le monde physique »[275].

Perception du mouvement

Opinion publique

À la mi-décembre 2018, l’historien Stéphane Sirot indique : « On a rarement mesuré un soutien aussi massif de l’opinion publique à un mouvement social. Souvent en France, il y a une certaine bienveillance, une courte majorité de soutien aux mouvements sociaux de salariés, mais qu’il frise les 75 %, c’est tout à fait singulier. C’est peut-être parce qu’on est face à un soutien qu’on pourrait qualifier d’identification. Alors que lors des mouvements sociaux on observe souvent un soutien de bienveillance, qui relève de ce que l’on appelle la « grève par procuration »[276].

De précédents mouvements ont néanmoins atteint des niveaux de soutien supérieurs (mobilisations des policiers en novembre 2001 et octobre 2016, des éleveurs laitiers en , des éleveurs bovins en , des surveillants de prison en janvier 2018, du personnel hospitalier en juin 2019), avec plus de 90 % de soutien[277]. Un soutien d'un niveau similaire avait également été observé lors du conflit des marins pêcheurs de juin 2008 ou des mobilisations syndicales de janvier et mars 2009[277]. Cependant, ces mouvements sociaux avaient été beaucoup moins importants et médiatisés.

Tableau

Sondages sur le soutien au mouvement
Soutien/sympathie ou opposition/hostilité Sem. Souhait : poursuite ou arrêt
Elabe[278] Ifop[279] OpinionWay[280] Elabe[278] Ifop[279] Odoxa[281]
44-52 % (4/7) 33
47-49 % (27/6) 32
48-48 % (20/6) 31
43-54 % (13/6) 30
46-52 % (5/6) 29
45-51 % (29/5) 28
50-48 % (22/5) 27
46-50 % (14/5) 26
47-49 % (6/5) 25
44-52 % (26/4) 24
48-48 % (17/4) 23
47-50 % (11/4) 22
50-46 % (4/4) 21
45-50 % (26/3) 20
53-35 % (20/3) 46-36 % (20/3) 44-53 % (21/3) 19 39-53 % (20/3) 44-55% (21/3)
61-28 % (13/3) 49-48 % (14/3) 18
54-30 % (8/3) 51-47 % (7/3) 17 37-50 % (8/3)
46-51 % (27/2) 16
50-31 % (19/2) 48-49 % (21/2) 15 35-54 % (19/2) 45-55 % (21/2)
58-31 % (13/2) 50-34 % (14/2) 53-44 % (14/2) 14 43-56 % (13/2) 38-52 % (14/2)
55-29 % (6/2) 54-43 % (7/2) 13
63-24 % (30/1) 58-26 % (30/1) 53-45 % (31/1) 12
63-27 % (23/1) 58-26 % (23/1) 58-40 % (24/1) 11 51-49 % (23/1)
67-25 % (14/1) 58-27 % (16/1) 56-42 % (18/1) 10 54-45 % (14/1) 51-49 % (17/1)
60-31 % (9/1) 57-31 % (9/1) 57-40 % (11/1) 9 51-49 % (9/1) 52-37 % (9/1) 55-45 % (10/1)
59-39 % (3/1) 8 52-48 % (3/1)
61-38 % (1/1)
70-22 % (19/12) 64-34 % (20/12) 7 54-46 % (19/12)
73-18 % (11/12) 68-24 % (12/12) 59-38 % (13/12) 6 52-47 % (11/12) 51-37 % (12/12) 54-46 % (11/12)
66-34 % (10/12)
72-21 % (5/12) 66-24 % (6/12) 68-30 % (6/12) 5 63-37 % (5/12) 59-31 % (6/12)
72-20 % (4/12)
68-30 % (4/12)
75-17 % (28/11) 71-19 % (28/11) 66-32 % (27/11) 4 69-31 % (28/11)
70-20 % (21/11) 66-22 % (21/11) 64-33 % (22/11) 3 66-34 % (22/11)
73-15 % (14/11) 69-15 % (14/11) 65-31 % (15/11) 2
71-11 % (7/11) 1

En raison de la fin du grand débat, de la baisse du nombre de manifestants lors de chaque « acte » et de la proximité des élections européennes, le nombre de sondages consacrés au mouvement baisse fortement avec le temps. Seul l'institut OpinionWay continue à poser chaque semaine la question du soutien au mouvement. Au début du mois de , il mesure un niveau d'hostilité jamais atteint, avec 33 % des personnes interrogées déclarant « ne pas du tout » soutenir le mouvement, contre 17 % le soutenant « tout à fait »[282].

Au début du mois de , un sondage BVA mesure un soutien de 39 % à la poursuite du mouvement, celui-ci ne restant majoritaire que chez les ouvriers (52 %), les sympathisants du RN (64 %) et ceux de LFI (80 %)[283].

Graphique

Évolution du soutien des Français au mouvement des Gilets jaunes

  • Ifop
  • OpinionWay
  • Elabe

Classe politique

En France, l'automobiliste possède un certain « poids électoral », qui est revendiqué par des mouvements associatifs[284].

Rapidement, le mouvement est soutenu par des dirigeants de partis politiques comme Marine Le Pen (Rassemblement national), Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) — qui commence par s'interroger sur les insurgés « fachos et fâchés », avant de coller aux revendications des Gilets jaunes[285] — et Laurent Wauquiez (Les Républicains)[286],[287],[288]. Libération évoque une tentative de récupération politique du mouvement par l’extrême droite, tout en affirmant que l'initiative est partie de « l'Internet vrai » et non de la « fachosphère »[289].

Les Gilets jaunes divisent notamment à gauche[290]. Si certains d'entre eux affichent leur compréhension ou soutien au mouvement, la plupart ne cautionnent pas le blocage des routes[291]. Selon l'historien Gérard Noiriel, la méfiance que témoigne initialement la gauche à l'égard du mouvement s'explique par le soutien que lui apporte l'animateur Éric Brunet à la veille de la première grande manifestation, le 17 novembre 2018, au nom du fait que « la France est le pays le plus taxé au monde », avant de s'en désolidariser deux semaines plus tard[292]. Daniel Cohn-Bendit, ancien meneur de Mai 68 désormais soutien d'Emmanuel Macron, voit derrière la mobilisation une « tentation totalitaire », établissant un parallèle entre le port du gilet jaune et celui de l'étoile jaune pendant la Seconde Guerre mondiale[293].

Le , en soutien au mouvement, le député non-inscrit Jean Lassalle porte un gilet jaune à l'Assemblée nationale, entraînant une suspension de la séance et une retenue sur ses indemnités parlementaires[294],[295]. Jean-Hugues Ratenon, élu insoumis pour La Réunion, brandit cinq jours plus tard un gilet jaune à la tribune ; sa prise de parole est arrêtée par une suspension de séance[296],[297]. Nicolas Hulot, ancien ministre de la Transition écologique et solidaire sous la présidence Macron, déclare le  : « Les gens savent que le kérosène des avions n'est pas taxé, que le fioul lourd des cargos n'est pas taxé. Pas besoin d'être un Gilet jaune pour s'en indigner »[298].

Pour dénouer la crise, fin novembre, le Rassemblement national et la France insoumise réclament la dissolution de l’Assemblée nationale, tandis que Les Républicains demandent à Emmanuel Macron de soumettre à référendum le plan de transition écologique qu'il a présenté le 27 novembre précédent[299]. La France insoumise, le Parti communiste français et le Parti socialiste déposent contre le gouvernement une motion de censure, qui est largement rejetée par l’Assemblée nationale le [300],[301].

Syndicats professionnels

Les principaux syndicats professionnels de salariés refusent pendant longtemps de s'associer directement à la contestation. Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, condamne la première manifestation du mouvement, qui a lieu le 17 novembre 2018, en évoquant un mouvement patronal[292], et affirme vouloir éviter toute récupération politique[302]. Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, déclare avant le début du mouvement : « Ces blocages, tout le monde a compris qu’ils sont récupérés politiquement par l’extrême droite. »[303].

Cependant, des initiatives locales de la part de responsables de la CGT, comme dans les Pyrénées-Orientales, sont en contradiction avec les directives confédérales[304]. Le , plusieurs syndicats, dont le FNTR, appellent le gouvernement soit à entamer un processus de négociation avec les Gilets jaunes, soit à faire respecter la liberté de circulation des opérateurs économiques. Ils ajoutent qu'ils interviendront pour préserver les intérêts des transporteurs et la sécurité de leurs personnels si le gouvernement n'agit pas[305]. Dans le même temps, FO Transport exprime son souhait d'organiser des actions pour le pouvoir d'achat en solidarité avec les Gilets jaunes[306].

Monde artistique

Un collectif de plus de 1 400 artistes, qui se nomme « Yellow Submarine », apporte son soutien au mouvement des Gilets jaunes le [307]. Il compte dans ses rangs des personnalités telles que Bruno Gaccio, Juliette Binoche, Emmanuelle Béart, Robert Guédiguian, Frank Margerin, Fanny Cottençon, Jean-Claude Petit et Jean-Luc Moreau[308]. Les signataires du collectif indiquent que, précaires ou non, qu'ils soient artistes, techniciens ou auteurs, ils se sentent « absolument concernés par cette mobilisation historique ». Ils indiquent que « le mouvement réclame des choses essentielles : une démocratie plus directe, une plus grande justice sociale et fiscale, des mesures radicales face à l'état d'urgence écologique »[307].

Antisémitisme

Quelques actes à connotation antisémites ont lieu dès les débuts des manifestations du mouvement. Le , des Gilets jaunes entonnent le « chant de la quenelle », inventé par l’humoriste Dieudonné[309], plusieurs fois condamné pour antisémitisme[310]. L'historien Vincent Duclert publie deux jours plus tard, le , une tribune dans Le Monde où il regrette le manque d'indignation quant aux violences antisémites[311]. En , Le Monde nuance en affirmant que « les observateurs s’accordent sur un constat majeur : l’ensemble des « gilets jaunes » est loin […] de tenir un discours antisémite »[312]. Le , à Strasbourg, en marge du cortège des Gilets jaunes, des slogans antisémites sont lancés devant la synagogue de la Paix tandis que des pétards sont lancés contre sa porte[313].

Le , en rentrant à son domicile, le philosophe Alain Finkielkraut est sifflé et victime d’insultes antisémites[314]. Cet événement suscite l’indignation de la classe politique, bien que des membres de l'extrême gauche et des indigénistes le minimisent[314],[315]. Alors qu'un individu proche de la mouvance islamiste est suspecté par les autorités, Alain Finkielkraut évoque « un mélange de gens des banlieues, de l'extrême gauche et peut-être aussi des soraliens », et non « des Gilets jaunes d'origine »[316],[317].

Traitement médiatique

L’avenue des Champs-Élysées (Paris) au soir du .

Le sujet est souvent celui qui est le plus traité par les médias français[o],[318],[319]. De la mi- à la mi-, ce sont près de 645 000 mentions du mouvement que l'institut Kantar Media recense en tenant compte de la plupart des médias français[320],[321].

Le traitement médiatique du mouvement par certains médias est critiqué par l'association Acrimed. Elle reproche notamment au quotidien Le Parisien de nombreuses unes et articles qu'elle estime partiaux et faisant preuve de « suivisme vis-à-vis du gouvernement et de la police »[322]. Les chaînes de télévision d'information continue BFM TV et CNews sont accusées tout particulièrement de participer à l'élaboration « avec les autorités, d’un récit médiatique anxiogène ». Beaucoup d'éditorialistes de différents médias (Yves Calvi sur RTL, Bernard-Henri Lévy au Point, Gérard Leclerc sur CNews) sont décrits comme partisans du gouvernement et de la police, qui « condamn[ent] par avance » les manifestations et attribuent « l'entière responsabilité des violences » aux Gilets jaunes[323],[324]. Frédéric Lemaire, membre d'Acrimed, dénonce une « couverture médiatique quasi-nulle » d'un rapport d'Amnesty International sur la violence excessive de forces de l'ordre, contrairement aux violences commises par les manifestants, qui sont « scrutées, commentées, dénoncées à longueur de journées »[p],[326]. Tony Le Pennec d'Arrêt sur images condamne aussi la disproportion « frappante » de couverture médiatique envers les agressions de journalistes commises par des manifestants et celles commises par les forces de l'ordre[327], alors que, comme le note Acrimed, les violences des manifestants ont « un degré bien moindre et bien moins grave »[328].

Dans les médias traditionnels, les Gilets jaunes sont parfois victimes de mépris et d'insultes ou amalgamés dans leur totalité avec les casseurs. Des éditocrates les qualifient ainsi d’« olibrius » et de « beaufs » (Jacques Julliard), de « racailles cagoulées » (Pascal Bruckner), de « salopards d'extrême droite ou d'extrême gauche qui viennent taper du policier » (Luc Ferry) ou de « hordes de minus, de pillards rongés par le ressentiment comme par les puces » (Franz-Olivier Giesbert)[329].

Controverses médiatiques

Fausses informations

Le mouvement des Gilets jaunes s'accompagne de la diffusion de fausses informations (fake news), notamment concernant la présence supposée de « mercenaires » anti-Gilets jaunes sur le territoire, et la rumeur de la disparition de la Constitution française. Des vidéos et des clichés sont parfois détournés dans un but de propagande[330],[331]. Ces fausses informations sont surtout répandues sur des groupes de discussion rassemblant des Gilets jaunes[332],[333]. Selon l'ONG américaine Avaaz, les fausses informations liées au mouvement ont été vues plus de 100 millions de fois[334]. Selon l'historien Gérard Noiriel, « en matière de « fausses nouvelles », les Gilets jaunes ont surpassé les membres du gouvernement[335] ».

Des membres de la majorité présidentielle et de l'exécutif diffusent ou relaient également des fausses informations. En , Emmanuel Macron affirme qu'il n'y eu aucun mort « victime des forces de l'ordre » alors qu'une femme de 80 ans est morte le mois précédent à Marseille après avoir été touchée par une grenade lacrymogène[336]. Des élus LREM, dont le président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand, accusent des manifestants d'avoir incendié des voitures devant les locaux du Parisien alors que l'incendie était d'origine accidentelle[337]. D'autres personnalités, notamment Naïma Moutchou, rapporteure de la loi contre la manipulation de l’information, relaient un détournement d'image présentant un Gilet jaune faisant le salut fasciste sur les Champs-Élysées[338]. Les députés Émilie Chalas, Aurore Bergé, Coralie Dubost et Naïma Moutchou font état de l'intervention de Steve Bannon, ancien conseiller du président américain Donald Trump, dans l'origine du mouvement[339],[340]. Lors des manifestations du , auxquelles participent des Gilets jaunes, Christophe Castaner annonce une attaque à l’hôpital de la Salpêtrière par des manifestants ainsi que l’agression du personnel soignant et d'un policier, avant de faire son mea culpa deux jours plus tard[341],[342],[343].

Des médias sont également à l'origine de fausses informations, BFM TV accusant par exemple à tort des Gilets jaunes d'actes de vandalisme[344].

Soupçons d'ingérence

En Russie, même si le Kremlin déclare ne pas voir d'influence des États-Unis dans le mouvement des Gilets jaunes, plusieurs médias comparent ce mouvement aux Révolutions de couleur et affirment qu'il a été organisé par les États-Unis afin de punir Emmanuel Macron de s'être prononcé en faveur d'une armée européenne[345],[346],[347].

Le Times du publie des extraits de note des services de renseignement français concernant des comptes de réseaux sociaux qui auraient amplifié le mouvement[348]. Selon le journal, des centaines de comptes seraient alimentés par la Russie, qui dément[349],[350]. Le secrétaire d’État Mounir Mahjoubi dénonce ainsi une ingérence de « forces étrangères » sur les réseaux sociaux[351]. Mais selon une déclaration d'un cadre des services de renseignement français rapportée par Le Journal du dimanche le 16 décembre 2018, l'implication de la Russie n'est pas établie, ni par la DGSE ni par la DGSI[352]. En mars 2019, Mediapart indique que « la DGSI et la DGSE n’auraient toujours pas trouvé la moindre trace d’ingérence russe » et fait état de « « l’effarement » d’un haut cadre du renseignement français quand il a découvert les propos d’Emmanuel Macron »[157].

Dans un entretien avec l'hebdomadaire Le Point, le président français, Emmanuel Macron, affirme que les Gilets jaunes ont été « conseillés » par une puissance étrangère ; il cite les médias russes RT et Sputnik pour leur influence supposée sur le développement du mouvement[353]. Au vu de « la position de certains responsables italiens », la secrétaire d'État Marlène Schiappa se demande s'« il y a des puissances étrangères qui financent les casseurs et les violences dans Paris »[354].

Théories du complot

Rudy Reichstadt, fondateur et auteur du site français Conspiracy Watch, estime que « si l'on ne peut affirmer catégoriquement que le complotisme est réellement plus présent dans ce mouvement que dans d'autres, on ne connaît pas, en revanche, de figure marquante du complotisme francophone qui n'ait pas revêtu le gilet jaune »[355]. Samuel Laurent, responsable des Décodeurs, insiste sur l'extrême porosité des Gilets jaunes face « à des informations qui les confortent »[356]. Selon un sondage mené par l'Ifop en décembre 2018, les Français qui se définissent comme Gilets jaunes sont plus sensibles que la moyenne aux théories du complot[274].

Après la fusillade du 11 décembre 2018 à Strasbourg, plusieurs figures des Gilets jaunes déclarent sur Facebook que l'attentat a été organisé par le gouvernement pour « détourner l'attention »[357]. La rumeur prend rapidement de l'ampleur, plus rapidement que lors des précédents attentats selon la journaliste à France Inter Sonia Devillers[358],[359]. Selon un sondage, 23 % des Français qui se définissent comme Gilets jaunes sont d'accord avec l'affirmation selon laquelle cet attentat est « une manipulation du gouvernement pour détourner l'attention des Français et créer de l'inquiétude dans la population en plein mouvement des Gilets jaunes », contre 10 % des Français en moyenne[274].

Certaines personnalités favorables aux Gilets jaunes sont accusées de développer des « théories du complot ». C'est ainsi que sont désignées la possibilité évoquée par le démographe Emmanuel Todd que les actes de vandalisme commis le dans l'arc de triomphe de l'Étoile soient le fait d'« agents provocateurs » au service des autorités[360] ou l'affirmation de l'essayiste Jean-Claude Michéa selon laquelle les Black bloc et les antifas sont au service de l'« État macronien » et visent à discréditer les Gilets jaunes par leurs violences[347].

D'autres théories ont trait à l'organisation du mouvement des Gilets jaunes, comme celle de l'éditorialiste Jean-Michel Aphatie, qui déclare en décembre dans l'émission de France 5 C l'hebdo : « Dans ce mouvement [des Gilets jaunes], je pense depuis le début qu’il y a une organisation souterraine, cachée. Il y a des tireurs de ficelles »[361].

Accusations de fichage des manifestants

Le , l'Ordre des médecins saisit la CNIL et le ministère de la Santé pour demander des précisions sur l'utilisation du fichier « SI-VIC » dans le cadre du mouvement des Gilets jaunes. Ce fichier, mis en place après les attentats de 2015 en France, est utilisé dans des situations sanitaires exceptionnelles pour le dénombrement, l’aide à l’identification et le suivi des victimes. Il s'agit d'un fichier purement administratif, comportant notamment le nom et prénom de la victime, son heure d'admission, son éventuel décès, mais aucune information médicale. Mais, alerté par des médecins, l'Ordre des médecins s'inquiète de l'emploi du fichier dans un « contexte qui paraît être bien différent ». Les médecins affirment en particulier que leurs patients n'ont pas été avertis de l'utilisation du fichier et que certaines fiches des victimes comportent des précisions concernant les différents types de blessures tels que « tir flash-ball : plaie arcade » ou « problème au poignet, suite coup de matraque selon le patient ». Quelques jours plus tard, la direction de l’Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) reconnaît un usage inapproprié du fichier SI-VIC pour quelques patients en raison d'un mémo erroné qu'elle avait fait circuler[362],[363],[364], induisant leurs équipes en erreur[365].

L'urgentiste qui a découvert que l'AP-HP avait activé l'application SI-VIC affirme : « Le système informatique est même prévu pour que dès qu’un service d’urgence enregistre une fiche, elle aille directement à la direction générale de la Santé et même au dessus. En clair, chaque service d’urgence peut permettre de localiser les blessés gilets jaunes… En violation complète du secret médical. »[366]. Les autorités compétentes démentent la possibilité d'un usage abusif, affirmant notamment que le ministère de l’Intérieur n'a pas accès à l'outil informatique, sauf en situation d’attentat. La direction générale de la Santé affirme que l'outil informatique SI-VIC n'a été déclenché au niveau national que le 8 et , et qu'il n'a été ensuite activé qu'au niveau local et ponctuellement[363].

Conséquences

Dix morts surviennent à l'occasion de blocages routiers et une onzième lors d'une manifestation qui se déroulait près du domicile de la victime[2]. Plus de 4 000 personnes sont en outre blessées, parfois très gravement, parmi les manifestants et les forces de l'ordre. Le mouvement a également des conséquences globalement négatives sur l'économie française, notamment en raison d'une baisse des dépenses de consommation ; ces conséquences sont encore difficiles à mesurer. Les manifestations perturbent en outre le déroulement de plusieurs événements et suscitent de nombreux commentaires à l'étranger. Enfin, sur le plan politique, la contestation entraîne une baisse de la popularité de l'exécutif français. La question de la traduction du mouvement dans le débat politique traditionnel se pose en vue des élections européennes de 2019.

Bilan humain

Douille de tir de LBD.

Parmi les dix personnes mortes lors des barrages routiers entre le et le , trois sont des Gilets jaunes participant aux blocages et sept des conducteurs de véhicule[q],[r]. Les familles de trois conducteurs dénoncent une récupération de ces drames par le mouvement des Gilets jaunes[379]. Par ailleurs, plusieurs automobilistes forcent des barrages, renversant des manifestants et des membres des forces de l'ordre[380],[381].

Le , Zineb Redouane, une Marseillaise de 80 ans, meurt à l'hôpital d'un choc opératoire, après avoir été vraisemblablement blessée au visage par une grenade lacrymogène MP7[382] alors qu'elle fermait les volets de son appartement, situé au 4e étage. Selon plusieurs témoins, elle a déclaré avoir été visée par les forces de l'ordre[383]. La famille porte plainte pour violences ayant entraîné la mort[384] mais l’enquête judiciaire est très critiquée[385]. Une nouvelle autopsie, pratiquée en Algérie, conclut que la mort de Zineb Redouane est directement liée au tir policier[386].

Le , une enquête Checknews recense 1 700 blessés (dont 94 dit « graves ») chez les Gilets jaunes ainsi que 1 000 blessés chez les forces de l'ordre[387]. Le , le ministre de l'Intérieur fait état de « près de 4 000 blessés chez les manifestants et les forces de l'ordre »[388]. Le sociologue Fabien Jobard indique que le bilan humain « dépasse tout ce que l’on a pu connaître en métropole depuis Mai 68, lorsque le niveau de violence et l’armement des manifestants étaient autrement plus élevés, et le niveau de protection des policiers, au regard de ce qu’il est aujourd’hui, tout simplement ridicule »[172]. Une enquête de France Culture rappelle néanmoins que la violence de Mai 68, tant du côté des manifestants que du côté de la police, a été largement sous-évaluée[389]. La commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Dunja Mijatović, s'inquiète publiquement du grand nombre de blessés[166].

Le Délégué interministériel à la sécurité routière, estime que les dégradations de radars intervenues lors du mouvement ont entraîné la mort d'environ 60 personnes pour les mois de novembre et décembre 2018[390]. Selon la Sécurité routière, le mois de février 2019 voit un accroissement de la mortalité de 17 %, soit 37 morts supplémentaires, par rapport à février 2018[391]. Cette attribution aux Gilets jaunes de la hausse de la mortalité fait polémique en France, et quelques voix relèvent que la hausse des morts peut être due à d'autres facteurs, les piétons et cyclistes, catégorie la plus touchée par la hausse, étant plus susceptibles d'avoir un accident en ville, loin des radars[392]. Un site défavorable aux radars présente en décembre des statistiques d'accidents en baisse pour le mois précédent, alors que 65 % des radars ont été détruits, et fait le lien inverse[393].

Impacts économiques

Rouen, le .

Selon l'INSEE, le mouvement est associé à la perte d'environ 0,1 point de croissance au quatrième trimestre 2018, soit un impact économique « modéré », équivalent à celui des grèves SNCF et Air France sur les résultats économiques français du deuxième trimestre 2018[394]. L'INSEE estime également que sans les mesures votées fin 2018 en réaction au mouvement, la conjoncture française aurait été bien plus mauvaise au premier semestre 2019[394]. La Banque de France revoit, quant à elle, la croissance du dernier trimestre 2018 à 0,2 % au lieu de 0,4 %[395]. À la mi-décembre, le ministère de l’Économie mentionne une baisse de chiffre d'affaires de 40 % pour les « petits commerçants » et de 15 % pour la grande distribution[s]. Le délégué général de la Fédération du commerce et de la distribution évalue le manque à gagner total à un milliard d'euros[397]. Plusieurs enseignes et syndicats annoncent un fort report des ventes vers l'e-commerce, notamment vers Amazon et Rakuten France, qui a vu ses ventes bondir de 50 % le samedi et de 63 % le samedi suivant[397]. Le mouvement a également des conséquences sur l'industrie et l'agriculture[398]. Début , la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, indique avoir « débloqué » 32 millions d’euros pour payer les salaires des quelque 58 000 personnes ayant connu une période de chômage partiel depuis le début de la crise[399].

Lors des rassemblements à Paris, en particulier entre le et le , plusieurs enseignes, restaurants et automobiles sont la cible de violences. Du mobilier urbain est également dégradé et des barricades sont dressées[400]. Le préjudice est estimé à plusieurs centaines de milliers d'euros[t],[402]. Selon le groupe Vinci Autoroutes, les dégâts s’élèvent à la mi- à « plusieurs dizaines de millions d'euros » sur l'ensemble du réseau français[403]. Entre le début du mouvement et , plus de 60 % des radars automatiques de contrôle routier sont masqués, dégradés ou détruits[404],[405].

Selon l'Union française des industries pétrolières (UFIP), sur le mois de décembre, la crise des Gilets jaunes a conduit à une baisse de 9 % de la consommation de carburant délivré par les stations-service françaises ; pour Francis Duseux, président de l'UFIP, c'est une première en quarante années[406].

En , le ministre Bruno Le Maire reconnaît que la crise « n'a pas eu d'impact sur l'attractivité de la France » et qu'elle a eu des effets moindres sur l'économie que ce qu'il avait envisagé[407]. En juillet suivant, la Direction générale des entreprises indique que le mouvement n’a pas conduit à une augmentation des défaillances d'entreprises dans les secteurs du commerce et de l'artisanat[408]. Au contraire, selon l'Observatoire français des conjonctures économiques (Sciences Po), les mesures d'urgences votées sous la pression des manifestants, dont le déblocage de 10 milliards d'euros, notamment via la hausse de la prime d'activité, devraient avoir à moyen terme des effets positifs sur la croissance et devraient améliorer le taux de croissance de 0,3 point de PIB[409].

Vie culturelle

Des musées, théâtres et autres lieux culturels sont préventivement fermés en raison des manifestations, des concerts ou festivals de musique sont également reportés ou annulés[410]. Pour assurer la pleine disponibilité des forces de l’ordre pour les manifestations des Gilets jaunes, le ministère de l’Intérieur fait reporter plusieurs matchs du championnat de France de football[411].

Aspects politiques

Popularité de l’exécutif

Le Premier ministre, Édouard Philippe, et le ministre de la Transition écologique et solidaire, François de Rugy.

Commencée en mai 2018, la baisse de popularité du président de la République, Emmanuel Macron, et du Premier ministre, Édouard Philippe, s’accentue au début du mouvement[412],[413],[414],[415]. Le président Macron, qui cristallise les tensions des manifestants, voit son image se dégrader, aussi bien en raison de sa politique et de sa gestion du conflit que de sa personnalité[416],[417]. Alors qu’il est perçu comme faisant partie d'une élite déconnectée du quotidien de beaucoup de Français, le président français voit sa capacité à réformer la France d’ici à la fin de son quinquennat remise en cause à l'international[418],[419],[420],[421],[422]. Après un record d'impopularité atteint mi-décembre 2018, les cotes de popularité du Président et du Premier ministre remontent et se stabilisent au printemps 2019 à un niveau souvent équivalent ou supérieur à celui de novembre 2018, avant le début du mouvement[423],[424],[425].

Réactions internationales

La crise conduit plusieurs dirigeants étrangers à s'exprimer. Aux États-Unis, le président Donald Trump indique dans un tweet que « les émeutes dans cette France socialiste sont provoquées par des taxes d'extrême gauche sur le carburant », se sert du mouvement pour maintenir la pression commerciale exercée sur l'Union européenne, et critique l'accord de Paris sur le climat[u],[428],[429],[430]. Le président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, explique le mouvement des Gilets jaunes en France de la sorte : « Les Français n'ont pas aimé de devoir payer de leur poche les changements dans la politique énergétique de leur pays »[431]. Le chef de l'Autorité judiciaire iranienne, Sadeq Larijani, déclare que « si ces manifestations n'avaient pas eu lieu en Occident, l'ONU et de nombreux autres ministères des Affaires étrangères s'en seraient déjà mêlés »[432]. Le , le gouvernement italien (M5S-Lega), conduit par Giuseppe Conte, annonce son soutien au mouvement français[433].

Le , un groupe d'experts appartenant à la commission des droits de l'homme des Nations unies évoque des restrictions « disproportionnées » au droit de manifester en France[167],[434]. Le suivant, la Haut Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe « estime que le nombre et la gravité des blessures infligées aux manifestants « mettent en question la compatibilité des méthodes employées dans les opérations de maintien de l’ordre avec le respect de ces droits » »[435]. Le , le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, Michelle Bachelet, s'inquiète d’un « usage excessif de la force » contre les Gilets jaunes et demande à la France « urgemment une enquête approfondie sur tous les cas rapportés d'usage excessif de la force »[436] ; réagissant sur ce discours, le porte-parole du gouvernement s'étonne que la France se retrouve « sur une liste entre le Vénézuela et Haïti » et ajoute : « On a toujours été extrêmement clairs : à chaque fois que cela est nécessaire, des enquêtes ont été lancées »[437],[438].

Élections européennes de 2019

En , la possibilité d'une évolution du mouvement en une organisation politique susceptible de se présenter aux élections européennes de 2019 est envisagée[439]. Selon un sondage Ipsos, commandé par le parti de la majorité présidentielle et réalisé début , une liste liée au mouvement des Gilets jaunes arriverait en quatrième position des élections européennes de 2019, avec 12 % des voix[440]. Les sondeurs indiquent qu'une telle liste réduirait avant tout les intentions de vote en faveur du Rassemblement national et de La France insoumise, dont de nombreux sympathisants soutiennent les Gilets jaunes[441],[442].

Lors des élections européennes, deux listes (dites « listes jaunes ») se revendiquent finalement des Gilets jaunes. Elles obtiennent des scores très faibles au regard des sondages réalisés au début du mouvement : 0,54 % pour l'Alliance jaune, conduite par le chanteur Francis Lalanne, et 0,01 % pour la liste Évolution citoyenne, menée par Christophe Chalençon[443]. Les partis politiques ayant fait figurer des Gilets jaunes sur leur liste (Debout la France, Les Patriotes, Parti communiste français, Union populaire républicaine) ne dépassent pas les 5 %[261]. Selon des enquêtes Ipsos et IFOP, les personnes déclarant se sentir Gilets jaunes ou soutiens du mouvement votent majoritairement pour le Rassemblement national[261],[262].

Selon Bruno Jeanbart, de l'institut Opinionway, l'existence du mouvement des Gilets jaunes a pu favoriser, en réaction, le vote d'électeurs de droite en faveur de la liste LREM et ainsi augmenter son résultat[444],[445].

Débat sur le référendum d'initiative citoyenne

Une proposition de référendum d'initiative citoyenne relayée en 2018[446],[447].

Le , alors que le référendum d'initiative citoyenne (RIC) émerge comme la principale revendication du mouvement, le Premier ministre, Édouard Philippe, déclare : « Le référendum peut être un bon instrument dans une démocratie, mais pas sur n'importe quel sujet ni dans n'importe quelles conditions. C'est un bon sujet du débat que nous allons organiser partout en France[448]. » Le groupe La France insoumise à l'Assemblée nationale dépose en une proposition de loi visant à instaurer le RIC, mais celle-ci est rejetée[449],[450].

Manifestations similaires

Dans le reste du monde

Les contestations contre les taxes sur les carburants et contre la vie chère gagnent d’autres pays, en Europe et dans le reste du monde[451].

En réaction aux Gilets jaunes

Manifestation de Foulards rouges à Paris le .

Les « Gilets orange » regroupent des militants dont les revendications se rapprochent de celles du mouvement des Gilets jaunes, en particulier au niveau des prix du carburant[452], et les « Gilets rouges » des militants de la CGT solidaires des Gilets jaunes[453]. Le mouvement des « Stylos rouges » rassemble sur les réseaux sociaux plusieurs dizaines de miliers de membres de l'Éducation nationale française[454],[455]. Les « Gyros bleus » (policiers) appellent à un mouvement non déclaré pour dénoncer la fatigue engendrée par leur métier[456]. Le collectif des « Gilets verts », créé le , entend soutenir l’action des Gilets jaunes en mettant l'accent sur les enjeux écologiques[457].

Sur les réseaux sociaux, déplorant les violences, plusieurs mouvements critiquent le mode d’action des Gilets jaunes, notamment les « Foulards rouges » et les « Gilets bleus »[458],[459]. Une manifestation organisée par les Foulards rouges le à Paris rassemble 10 500 personnes d’après la préfecture de police, un chiffre surévalué selon les médias nationaux[460],[461],[462] ; à nouveau appelés à manifester dans la capitale le suivant, ils ne sont qu'une cinquantaine[463].

Dans le passé

La France a connu d'autres manifestations et révoltes spontanées qui sont parfois comparées au mouvement des Gilets jaunes. La Révolution française est régulièrement évoquée[464],[465],[466]. Les révoltes viticoles, comme celle de 1907, sont aussi mentionnées[467]. Le mouvement des Gilets jaunes est également parfois comparé à celui des Bonnets rouges, qui conduit en 2013 à la suppression des portiques écotaxe. Toutefois, selon la géopolitologue Béatrice Giblin, cette comparaison avec les Bonnets rouges est peu pertinente dans la mesure où ce mouvement « avait été pris en main par des vrais leaders, comme le maire de Carhaix, ou les grands patrons de Bretagne »[468].

En s'opposant à l'augmentation des taxes et impôts, le mouvement des Gilets jaunes peut également évoquer les jacqueries de l'Ancien Régime et le poujadisme des années 1950[v],[469]. Sont également cités les mouvements de protestation massifs étant intervenus à partir du deuxième choc pétrolier contre la hausse des prix à la pompe et plus généralement contre le coût de la vie, et ayant entraîné un blocage du pays ou de certains secteurs d'activité[470],[471].

Dans le monde arabe, un parallèle est parfois établi entre le mouvement des Gilets jaunes et le printemps arabe[472]. Samir Aita, ancien directeur du Monde diplomatique, indique ainsi que les deux révoltes trouvent leur origine dans le fait que les campagnes ont été délaissées au profit des centres urbains[473]. Des éditorialistes sont toutefois plus sceptiques : dans le quotidien L'Orient-Le Jour, Anthony Samrani affirme qu'il n'y a ici « pas de dictateur à faire tomber, pas non plus d'État policier ou de moukhabarate [services secrets] prompts à vous faire disparaître à la moindre critique »[472]. Des parallèles sont également faits avec la révolution ukrainienne de 2014[474].

Activités artistiques autour du mouvement

Audiovisuel

En , les documentaristes François Ruffin (également député issu de la gauche radicale) et Gilles Perret partent à la rencontre de Gilets jaunes sur les ronds-points[475]. Avec plus de vingt-quatre heures d'images, ils en tirent un film, J'veux du soleil, qui sort en salles en France le [476].

Les différentes antennes régionales de France 3 et la chaîne France Ô diffusent le , presque un an après le début du mouvement, plusieurs documentaires réalisés par Anne Gintzburger, s'intéressant à la place des femmes dans le mouvement. Dans ces six films (Des femmes en colère, La Marche des femmes, Les Combattantes, Les Femmes du rond-point, Toutes solidaires et Les Gardiennes de l'île), la réalisatrice suit des militantes anonymes dans leur mobilisation[477],[478].

Arts visuels

Clown sur l'avenue des Champs-Élysées ().

Une vidéo de l'humoriste La Bajon dans le rôle de l'avocate d'Emmanuel Macron portant un gilet jaune, est vue plusieurs millions de fois sur les réseaux sociaux, ce qui consolide sa célébrité dans le mouvement[479],[480]. La danseuse Nadia Vadori-Gauthier improvise une chorégraphie en pleine rue, lors des manifestations, avec pour fond les fumées des différents gaz et feux de voitures[481]. Le , en marge de la manifestation sur les Champs-Élysées, Deborah De Robertis organise un happening lors duquel cinq femmes se présentent seins nus face aux gendarmes, avec un costume évoquant Marianne[482].

À Paris, rue d’Aubervilliers (19e arrondissement), début , l’artiste urbain Pascal Boyart peint une fresque inspirée de La Liberté guidant le peuple de Delacroix représentant une Marianne guidant des Gilets jaunes[483]. Le mouvement Black Lines, un groupe d'une trentaine d'artistes, réalise une fresque de 300 mètres de long s'inspirant des divers faits relatifs aux manifestations[484],[485].

Chansons

  • Gilets jaunes par Kopp Johnson (2018)[486]
  • Tensions sociales par D.ace (2018)[486]
  • Débranche ta télé et enfile ton gilet par Antoine Froideveaux (2018)[486]
  • Le Peuple saigne par Mazfa (2018)[487].
  • Les Gentils, les Méchants par Marguerite (2019)[488],[489],[490]

Littérature

Plusieurs pamphlets anti-Macron sont publiés durant le mouvement de protestation : Ce pays que tu ne connais pas de François Ruffin[491] ou Contre Macron et Crépuscule de Juan Branco[492].

Notes et références

Notes

  1. Dix personnes sont décédées dans des accidents de la route liés aux manifestations. Zineb Redouane est morte après avoir été blessée dans son appartement, touchée par un éclat de grenade lacrymogène alors qu'elle fermait ses volets[2],[3],[4].
  2. 2 495 manifestants, 1 944 policiers, gendarmes, pompiers[1].
  3. Il existe des dizaines de groupes Facebook de Gilets jaunes. En , les trois groupes les plus importants numériquement sont :
    • « Compteur officiel de gilets jaunes », destiné à estimer le nombre de manifestants (avec près de trois millions de membres) ;
    • Celui créé par Éric Drouet et d’abord géré avec Priscillia Ludosky, initialement intitulé « TOUS ENSEMBLE LE 17 NOVEMBRE 2018 pour le blocage national face à la hausse du carburant ! », puis rebaptisé « La France en colère!!! » (avec 340 000 membres) ; souhaitant favoriser les actions en province, Priscillia Ludosky se replie ensuite sur la page d'origine « La France en colère » (sans points d'exclamation)[40] ;
    • « Fly Rider infos blocage », créé par Maxime Nicolle[41].
  4. Les LBD sont classés « armes de guerre » par la règlementation internationale, car, à l'origine, un LBD est un lance-grenade militaire et son calibre ne permet pas de le classer comme arme civile[97].
  5. Parmi eux figurent le capitaine Bruno Félix, qui commandait les auteurs présumés des tirs dont l'un conduisit au décès de Zineb Redouane à Marseille, le commissaire Rabah Souchi, chargé, le , à Nice, des opérations de maintien de l’ordre ayant causé de graves blessures à la militante pacifiste Geneviève Legay, et le commandant divisionnaire Dominique Caffin, CRS ayant frappé plusieurs manifestants dans un Burger King à Paris, le , et connu de sources policières pour être « particulièrement violent »[123].
  6. Jusqu'alors d'un montant de 1 000  pour les ménages imposables et 2 000  pour les ménages non imposables, elle devrait passer à 4 000  pour les 20 % de Français les plus modestes et pour les ménages non-imposables qui habitent à une distance supérieure à 30 km de leur lieu de travail.
  7. Le chèque énergie s'est substitué en 2018 aux tarifs sociaux de l'énergie. Il devrait bénéficier à 2,2 millions de personnes supplémentaires.
  8. Le système d’indemnités kilométriques serait élargi aux gros rouleurs, à partir de soixante kilomètres par jour, pour les petites cylindrées (4 CV), qui « consomment peu ou ne polluent pas ». L’État laisserait ces aides à la charge des collectivités et des entreprises.
  9. À la suite de l’appel présidentiel à un « effort national de solidarité », la Fédération bancaire française s'engage à ce que les banques n’augmentent pas leurs tarifs en 2019[196] et plusieurs grandes entreprises annoncent leur intention de verser une prime volontaire de fin d'année[197],[198].
  10. Le comité se penchera également sur le prélèvement forfaitaire unique (PFU) au taux de 30 % sur les revenus du capital, plus connu sous le nom de flat tax
  11. Un comité d'évaluation des réformes sur la fiscalité du capital, dont celle de l'ISF, est toutefois installé le . Ce comité doit remettre un rapport en septembre 2019, avant le dépôt du projet de loi de finances 2020[j],[202].
  12. L'article prend en compte les revendications communiquées par la délégation de huit Gilets jaunes le , ainsi qu'une autre liste de doléances assez similaire, établie la semaine précédente selon la même méthode de consultation en ligne, et « d’autres demandes entendues lors des manifestations et des publications partagées sur les réseaux sociaux ».
  13. « […] Les deux tiers sont compatibles avec le programme de Jean-Luc Mélenchon. Elles se rapprochent aussi du candidat socialiste Benoît Hamon, désormais chef de file de Génération.s. Les plus sociales, sur le smic et les retraites par exemple, sont directement inspirées des idées de Philippe Poutou ou Nathalie Arthaud »
  14. « Près de la moitié des propositions sont partagées par Nicolas Dupont-Aignan et Marine Le Pen, en particulier sur la défense des services de proximité (commerces, poste, école) ou la renationalisation des infrastructures (autoroutes, aéroports) »
  15. Exception faite notamment de l'attaque du marché de Noël de Strasbourg et des fêtes de Noël. Voir [1].
  16. Cédric Mathiot de Libération reconnaît que le rapport « a été peu mentionné dans la presse », tout en affirmant que son journal a déjà écrit « largement » sur les violences policières[325]. Pour Lemaire, les différents articles de Libération ne semblent pas être à la « hauteur de l'ampleur nouvelle de la brutalité de la répression policière »[326].
  17. Le , au Pont-de-Beauvoisin (Savoie), une conductrice d'un 4x4, arrêtée par un barrage de manifestants à un rond-point, redémarre son véhicule et renverse une manifestante de 63 ans, qui est tuée[367]. Au vu des images d'une caméra de vidéosurveillance, le parquet déclare qu'il est « impossible de qualifier l’acte d’involontaire ». Elle est mise en examen pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner [avec arme par destination] »[368]. Les 13 et , deux Gilets jaunes trouvent la mort après avoir été renversés par un camion[369],[370].
  18. Entre le et le , sept conducteurs meurent après avoir percuté des véhicules. Le , dans la Drôme (sur la N7), un motard remontant une file de voitures bloquées par un barrage percute une camionnette et meurt le lendemain[371]. Le , un artisan conduisant une fourgonnette meurt après avoir percuté un camion sur la RN 113 à Arles[372],[373]. Le , à Chasseneuil-sur-Bonnieure (Charente), une voiture percute un camion à l'arrêt au niveau d'un barrage des Gilets jaunes : la conductrice de la voiture, âgée de 25 ans, meurt sur le coup[374]. Le , une femme est tuée dans un accident de la route près d'un barrage de Gilets jaunes dans l'Aisne[375]. Le 14 décembre également, un homme meurt dans la collision de son véhicule avec un camion, à la frontière franco-belge, bloquée par un barrage de Gilets jaunes[376]. Le 19 décembre, un homme meurt dans la collision de son camion avec un autre camion, à la frontière franco-belge, bloquée par un barrage de Gilets jaunes[377],[378]. Le , un automobiliste meurt après avoir percuté un camion bloqué à un barrage à Perpignan.
  19. du fait de magasins fermés, de ruptures de stocks ou du blocage d'accès routiers vers des zones commerciales[396]
  20. Philippe Bélaval, président du Centre des monuments nationaux, estime que la remise en état de l'arc de triomphe, vandalisé le , ne devrait pas dépasser le million d’euros tout en indiquant que certaines œuvres d’art dégradées ne pourront être restaurées[401].
  21. Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, demande alors à Donald Trump de ne pas prendre parti dans la politique intérieure française[426],[427].
  22. Cependant, selon Alexis Spire, sociologue au CNRS, le mouvement se distingue du poujadisme : « Les Gilets jaunes n’appellent pas à attaquer les dépôts de carburant pour faire le plein gratuitement. C’est plutôt le constat que l’argent public est mal utilisé. Que l’argent ne va pas là où il devrait aller : dans le maintien de la petite gare, du centre de Trésor public, du bureau de poste, de la gendarmerie »[225].

Références

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Voir aussi

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Bibliographie

Articles connexes

Liens externes