Tarcisio Bertone
Tarcisio Bertone, né le à Romano Canavese dans la province de Turin, au Piémont (Italie), est un prêtre religieux salésien. Archevêque de Verceil en 1991, puis de Gênes en 2003, il est créé cardinal la même année. Du au , il est cardinal secrétaire d'État du Saint-Siège.
Biographie
[modifier | modifier le code]Prêtre
[modifier | modifier le code]Tarcisio Pietro Evasio Bertone fait sa profession religieuse chez les salésiens de saint Jean Bosco le avant d'être ordonné prêtre le .
Il est titulaire d'une licence en théologie et d'un doctorat en droit canon.
Comme prêtre, il enseigne la théologie morale, le droit canon avant de devenir doyen puis recteur de l'université pontificale salésienne[2].
Évêque
[modifier | modifier le code]Nommé archevêque de Verceil le , il est consacré le 1er août suivant. Le , il est nommé secrétaire de la Congrégation pour la doctrine de la foi où il seconde le cardinal préfet Joseph Ratzinger, futur pape Benoît XVI.
En 2000, il est responsable du dévoilement des secrets de Fatima[2].
Il devient archevêque de Gênes le , charge qu'il assume jusqu'à son installation comme secrétaire d'État, le .
Il est créé cardinal par le pape Jean-Paul II lors du consistoire du avec le titre de cardinal-diacre de Santa Maria Auxiliatrice in via Tuscolana. Il participe au conclave de 2005 qui élit le pape Benoît XVI.
En 2005, il prend la parole contre l'influence exercée par le roman Da Vinci Code : « je suis effaré qu'autant de gens puissent croire ces mensonges. » Il organise une série de conférences-débats intitulées l'Histoire sans histoires pour mettre en évidence à quel point les affirmations du livre sont « honteuses et sans fondement »[3].
Secrétaire d'État
[modifier | modifier le code]Le , Benoît XVI le rappelle à Rome comme secrétaire d'État, l'équivalent d'un Premier ministre du pape. Après avoir été le bras droit du cardinal Ratzinger quand celui-ci était préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, il devient ainsi le bras droit de Benoît XVI. Il dirige la diplomatie du Saint-Siège et vient directement après le pape dans la hiérarchie du Vatican.
Il exerce la fonction de secrétaire d'État jusqu'à la fin du pontificat de Benoît XVI. Le suivant, le pape François le confirme provisoirement dans cette même fonction ainsi que l'ensemble des responsables de la Curie romaine[4].
Jusqu'en , il est aidé dans sa tâche par un secrétaire particulier français, le père Nicolas Thévenin, membre de la communauté sacerdotale Saint-Martin. Ce dernier est nommé en protonotaire apostolique participant, la plus haute dignité pour un prélat non-évêque. Depuis , le secrétaire particulier du cardinal est un prêtre italien, Roberto Lucchini.
Dans l'entourage du numéro deux du Saint-Siège, on trouve aussi un autre Français, Dominique Mamberti, secrétaire pour les relations avec les États, ce qui correspond au ministre des Affaires étrangères.
Au sein de la Curie romaine, il est également, jusqu'à son 80e anniversaire le , membre de la Congrégation pour la doctrine de la foi, de la Congrégation pour le clergé, de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, de la Congrégation pour les Églises orientales de la Congrégation des évêques et de la Congrégation pour l'évangélisation des peuples.
Il est élevé au rang de cardinal-évêque de Frascati le , succédant au cardinal Alfonso López Trujillo.
Le , la salle de presse du Saint-Siège annonce que sa démission de son rôle de secrétaire d'État est acceptée par le pape François, il est remplacé à ce poste par l'archevêque Pietro Parolin[5],[6]. Cette démission prend effet le suivant au cours d'une cérémonie pour installer son successeur[7] et remercier le cardinal Bertone[8].
Le , il inaugure dans les jardins du Vatican une statue représentant la Vierge de la Charité del Cobre (du cuivre) qui est vénérée avec ferveur à Cuba et au sanctuaire de laquelle les papes Jean-Paul II et Benoît XVI se sont rendus. Cette cérémonie s'est faite en présence du président de la conférence épiscopale cubaine : Garcia Ibanez, archevêque de Santiago de Cuba, et aussi des ambassadeurs de Cuba auprès du Saint-Siège et auprès de l’État italien[9].
Camerlingue de la Sainte Église romaine
[modifier | modifier le code]Benoît XVI le nomme camerlingue de la Sainte Église romaine le . À ce titre il est chargé de l'administration du Saint-Siège pendant la vacance du Siège apostolique consécutive à la renonciation de Benoît XVI le et jusqu'à l'élection de François à l'issue du conclave qui s'ensuit. Il est remplacé dans cette charge par le cardinal Jean-Louis Tauran, le , quelques jours après son 80e anniversaire.
Prises de position en tant que secrétaire d'État
[modifier | modifier le code]Un programme d'affirmation et de lutte contre la sécularisation
[modifier | modifier le code]En , dans une interview au Figaro Magazine réalisée par Nicolas Diat et Jean Sévillia, le cardinal Bertone évoque la publication du motu proprio de Benoît XVI libéralisant le rite de saint Pie V (il paraîtra sous le titre Summorum Pontificum le ). Il y passe en revue les enjeux du pontificat : retrouver la dimension sacrée de la liturgie catholique, améliorer la formation des séminaristes, lutter contre la sécularisation de la société et le relativisme, montrer la compatibilité du dialogue inter-religieux avec l'affirmation de l'identité catholique. Il souligne son refus d'une appréhension de la laïcité qui ferait de la foi un fait purement privé. Interrogé sur les relations du Saint-Siège avec les médias, il les critique avec virulence : « Les messages de l’Église sont soumis à une forme de manipulation et de falsification de la part d’un certain nombre de médias occidentaux. J’observe une fixation de certains journalistes sur les thèmes moraux, comme l’avortement ou les unions homosexuelles, qui sont bien sûr des enjeux très importants, mais qui ne résument absolument pas la pensée et l’œuvre de l'Église. »[10].
Certains commentateurs, comme Sandro Magister, ont exprimé l'idée que si le cardinal Bertone est un théologien aux idées claires, ses premiers temps à la tête de la Curie ont été marqués par plusieurs gaffes. Sont ainsi cités la gestion des remous provoqués par le discours de Ratisbonne qui coïncidait avec la prise de fonction du cardinal[11], le choix de Stanislas Wielgus à la tête de l'archidiocèse de Varsovie sans enquête suffisante, la mauvaise gestion de la succession à la présidence de la Conférence épiscopale italienne[12].
Relations avec les différents États
[modifier | modifier le code]Il se montre ouvert à la Turquie, sans être favorable à son entrée dans l'Union européenne[13].
En , il visite l'île de Cuba immédiatement après la démission de Fidel Castro, et sera la première personnalité à rencontrer Raúl Castro.
Lors du séisme de 2009 à L'Aquila, le cardinal Bertone préside une messe de funérailles, tenue par autorisation spéciale le jour du Vendredi saint. Il revient à la fin août dans cette ville pour présider la cérémonie traditionnelle du pèlerinage du Pardon de saint Célestin V (Perdonanza Celestiniana). Le président du Conseil italien Silvio Berlusconi devait participer aux cérémonies et rencontrer le cardinal lors d'un dîner, mais il renonce au déplacement, illustrant la brouille croissante entre le gouvernement italien et l'Église[14],[15]. En effet, les mois précédents les journaux catholiques italiens ont critiqué de plus en plus sévèrement la politique du gouvernement, principalement sur la question de l'immigration. Le conflit connaîtra son paroxysme au moment même de la venue du cardinal à L'Aquila avec la mise en cause calomnieuse de Dino Boffo, directeur de l’Avvenire, dans une affaire de mœurs par son collègue Vittorio Feltri d’Il Giornale, journal de la famille Berlusconi[16],[17]. Feltri devra finalement se rétracter et sera condamné à 6 mois de suspension par le conseil de l'ordre des journalistes italiens[18].
Controverse sur l'homosexualité et la pédophilie
[modifier | modifier le code]Tarcisio Bertone est mis en cause par le journal Le Monde du pour des propos controversés et homophobes liant l'homosexualité à la pédophilie[19]. Cette intervention se situe en pleine crise de l'Église catholique romaine, mise en cause directement dans plus de 4 400 affaires de pédophilie ayant fait plus de 11 000 victimes en Europe lors de ces 50 dernières années[20].
Dans Le Monde du , contrairement aux propos de Tarcisio Bertone, le pape Benoît XVI fait la distinction nette entre pédophilie et homosexualité[21].
La France émet très rapidement une condamnation officielle : « Il s'agit d'un amalgame inacceptable que nous condamnons », a déclaré Bernard Valero, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères. « La France rappelle son engagement résolu dans la lutte contre les discriminations et les préjugés liés à l'orientation sexuelle et l'identité de genre », a-t-il ajouté[22]. De nombreuses réactions scandalisées proviennent des associations de défense des droits des gays et des partis politiques de gauche en Italie[23] et en Belgique où le ministre de l'égalité des chances demande une condamnation officielle[24].
Le , le Vatican indique qu'il n'est « pas compétent pour faire des affirmations psychologiques ou médicales », mais publie une déclinaison des « cas récents d'abus sur mineurs de la part de prêtres auxquels a été confrontée la Congrégation pour la doctrine de la foi » portant : « 10 % de cas de pédophilie au sens strict, et 90 % de cas à définir plutôt comme éphébophilie (c'est-à-dire l'attirance envers des adolescents) », ces derniers cas se déclinant en « 60 % concernent un individu du même sexe, et 30 % sont de nature hétérosexuelle »[25],[26]. Le , La Stampa publie l'interview de Richard Fitzgibbons, psychiatre américain spécialisé dans le traitement des prêtres ayant commis des abus sexuels et engagé dans divers organismes catholiques. Il prend la défense du cardinal Bertone, qu'il trouve totalement conformes au John Jay report et à l'expérience clinique. Il ajoute que « tous les prêtres qu'il a traités qui avaient eu des contacts sexuels avec des mineurs avaient été auparavant impliqués dans une relation homosexuelle adulte. »[27].
Pour éclaircir les choses, plusieurs spécialistes soulignent le flou qui entoure l'emploi du terme de « pédophile », lié au contraste entre son emploi courant et son sens technique. Ils rappellent que « 80 % des prêtres ayant commis des abus sexuels ont agressé des adolescentes postpubères et ne sont pas pédophiles du tout »[28]. Ils soulignent que les problématiques pédophiles concernant des enfants prépubères ne sont pas liées à une orientation sexuelle[29], laquelle n'est pas, en elle-même, un facteur de risque pour les crimes sexuels. Au contraire, les questions d'opportunité jouent un grand rôle dans le choix des victimes d'agression[28].
Polémiques
[modifier | modifier le code]- Critiqué pour son appartement - Le , l'annonce de la prochaine installation du cardinal Bertone dans un appartement de 700 m2 dans le palais Saint Charles, réservé aux dignitaires de l’Église, suscite une polémique. La presse se fait l'écho de la « grosse colère » du pape François, qui a lui-même préféré un appartement de 70 m2 de la résidence Sainte-Marthe à ses appartements pontificaux[30].
- Soupçonné de détournement d'argent - En , les journaux annoncent que le cardinal Tarcisio Bertone a fait subir une perte à la banque du Vatican. Il aurait facilité un prêt de 15 millions d’euros des caisses du Vatican à une maison de production télé gérée par l’un de ses amis. Une enquête de la banque du Vatican a été lancée[31].
- Cité dans les scandales de Vatileaks - Il avait déjà été visé par le scandale du Vatileaks pour avoir fait muter abusivement un prélat, qui se plaignait de lui au pape Benoit XVI[32].
- En , le journaliste italien Emiliano Fittipaldi révèle, dans son ouvrage Avarizia, comment 200 000 € de la Fondation de l'Enfant Jésus, destinée à recueillir les dons pour les enfants malades, ont été détournés pour payer une partie des travaux effectués dans le nouveau domicile du cardinal Tarcisio Bertone - un appartement de 700 m2 -[33] ou encore mentionne un déplacement en hélicoptère du cardinal en 2012, facturé 23.800 €[34].
Distinctions
[modifier | modifier le code]- Grand-croix de l'ordre de Sant'Iago de l'Épée ()
- Collier de l'ordre de l'Étoile de Roumanie (décret du du Premier ministre Călin Popescu-Tăriceanu[35])
- Chevalier grand-croix de l'ordre du Mérite de la République italienne (26 juin 2006[36])
- Citoyen honoraire de la commune d'Introd ( Vallée d'Aoste) depuis le [37].
Sources
[modifier | modifier le code]- Tarcisio Bertone, un pape par intérim, Le Monde, .
- « Le cardinal Bertone intronisé par Benoît XVI », article de La Croix.
- (en) "Church fights Da Vinci Code novel", sur le site de BBC News.
- « LE SAINT-PERE CONFIRME PROVISOIREMENT LES CHEFS ET LES MEMBRES DES DICASTERES DE LA CURIE ROMAINE » sur le site Le Suisse Rom@ain, 16 mars 2013.
- The fall of the vicepope, NYBooks, 16 juin 2014.
- « Mgr Pietro Parolin, nouveau secrétaire d'Etat », sur News.va, .
- à laquelle celui-ci n'est pas présent en raison d'une opération chirurgicale.
- AFP, Le Point, « Le Vatican a un nouveau secrétaire d'Etat, Pietro Parolin », sur lepoint.fr, (consulté le ).
- Radio Vatican, « Une statue de la Vierge de la charité de Cuba au Vatican », sur news.va, (consulté le ).
- « Bertone : Foi et raison ne s'opposent pas ».
- Sandro Magister, Voici un secrétaire d'état parfait. Mais c'était il y a cent ans, Chiesa, L'Espresso.
- Sandro Magister, Tarcisio Bertone, le cardinal qui devait aider le pape, Chiesa, L'Espresso.
- (fr) http://www.chretiente.info/spip.php?page=actu&id_syndic_article=7810
- « La brouille s'aggrave entre Berlusconi et l'Église de Rome ».
- « Silvio Berlusconi ne rencontrera pas le cardinal Bertone à l'Aquila ».
- « Le Vatican et Berlusconi, c'est fini », Slate.
- Hugues Portelli, « Berlusconi et les catholiques italiens, les raisons du conflit ».
- (it) Feltri ci ripensa: Boffo va ammirato.
- https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/04/12/le-numero-deux-du-vatican-lie-pedophilie-et-homosexualite_1332571_3224.html, consulté le 12 avril 2010.
- https://www.lemonde.fr/web/recherche_breve/1,13-0,37-1117554,0.html, consulté le 12 avril 2010.
- Stéphanie Le Bars, « Le pape exprime sa "honte" à propos des prêtres pédophiles », Le Monde, (lire en ligne).
- Paris dénonce l'« amalgame inacceptable » du numéro deux du Vatican.
- Le no 2 du Vatican lie pédophilie et homosexualité: l'Italie choquée, consulté le 19 avril 2010.
- Lien homosexualité-pédophilie: PS, MR, Ecolo et cdH s'indignent, consulté le 19 avril 2010.
- Polémique - Pédophilie et homosexualité : la surprenante mise au point du Vatican.
- Le Vatican prend ses distances avec les propos d'un prélat associant pédophilie et homosexualité.
- (it) Uno psichiatra per Bertone.
- (en) Thomas Plante, What we know about Homosexuals and the Catholic Clergy Sexual Abuse Crisis, Psychology Today.
- Jacques Arènes : «La pédophilie n’est pas d’abord une question d’homosexualité ou d’hétérosexualité».
- «Grosse colère» du Pape contre le cardinal Bertone et son appartement de 700 m2, Le Figaro, 22 avril 2014.
- « L’affaire Bertone entraîne une perte nette pour la « banque du Vatican » », sur La Croix, (consulté le ).
- « L'ex-numéro 2 du Vatican soupçonné de détournement d'argent », sur France Info, (consulté le ).
- (it) Alberto Custodero, « L'attico del cardinale Bertone al centro di Vatileaks: "Pagato con i soldi dei bimbi malati" », La Reppublica, (lire en ligne).
- Patricia Labarre, « Vatileaks: l’argent destiné aux pauvres finance les dépenses excessives des cardinaux », Le Soir, (lire en ligne).
- (ro) Călin Popescu-Tăriceanu, « DECRET Nr. 861 din 26 august 2008 », sur legex.ro (consulté le ).
- Titulaire de la décoration consulté le 04/11/2013 sur quirinale.it.
- ANSA Vallée d'Aoste.
Annexes
[modifier | modifier le code]Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- Évêque catholique du XXe siècle
- Évêque catholique du XXIe siècle
- Archevêque catholique du XXIe siècle
- Archevêque de Verceil
- Archevêque de Gênes
- Salésien italien
- Personnalité de la curie romaine
- Clergé italien du XXe siècle
- Personnalité liée à Introd
- Cardinal italien du XXIe siècle
- Cardinal créé par Jean-Paul II
- Cardinal secrétaire d'État
- Diplomate du Saint-Siège au XXIe siècle
- Camerlingue de la Sainte Église romaine
- Secrétaire du dicastère pour la Doctrine de la foi
- Professeur à l'université pontificale salésienne
- Membre du dicastère pour les évêques
- Membre du dicastère pour la Doctrine de la foi
- Membre de la congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements
- Collier de l'ordre de l'Étoile de Roumanie
- Chevalier grand-croix de l'ordre du Mérite de la République italienne
- Grand-croix de l'ordre de Sant'Iago de l'Épée
- Grand-croix de l'ordre du Mérite de la république de Pologne
- Chevalier de l'ordre du prince Iaroslav le Sage, 1re classe
- Grand-croix de l'ordre du Soleil
- Naissance en décembre 1934
- Naissance dans la province de Turin
- Romano Canavese