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Sauternes (AOC)

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Sauternes
Image illustrative de l’article Sauternes (AOC)
Le village de Sauternes et une vigne de sémillon.

Désignation(s) Sauternes
Appellation(s) principale(s) sauternes[1]
Type d'appellation(s) AOC-AOP
Reconnue depuis 30 septembre 1936
Pays Drapeau de la France France
Région parente vignoble de Bordeaux
Sous-région(s) vignoble du Sauternais
Localisation Gironde
Climat océanique
Sol graviers (appelés graves)
Superficie plantée 1 735 hectares en 2008[2]
Cépages dominants sémillon B[3]
Vins produits blancs liquoreux
Production 34 260 hectolitres en 2008[2].
Rendement moyen à l'hectare maximum 25 à 28 hectolitres par hectare[4]
Maison des vins de Sauternes.

Le sauternes[5],[1] est un vin liquoreux français d'appellation d'origine contrôlée produit dans le Sauternais, une des subdivisions du vignoble de Bordeaux.

L'aire de production de l'appellation est composée de cinq communes : Barsac, Bommes, Fargues, Preignac et Sauternes, toutes situées sur la rive gauche de la Garonne, de part et d'autre de la rivière Ciron, au sud de Bordeaux.

Son vignoble comporte quelques vins au prestige mondialement reconnu comme le Château d'Yquem, seul premier cru supérieur retenu dans la classification officielle des vins de Bordeaux de 1855.

Historique

La vigne est réputée être cultivée dans la région bordelaise depuis la fin de l'Empire romain, mais il faut attendre le Moyen Âge pour avoir des documents l'attestant dans le Sauternais.

Époque moderne

Ce sont les commerçants néerlandais qui développèrent le vignoble pour leur fournir du vin blanc. Ils amenèrent une nouvelle technique : une mèche trempée dans du soufre est mise à brûler dans les barriques ; cette mèche est d'ailleurs appelée « allumette hollandaise »[6]. Cet usage du soufre permet de stopper la fermentation avant sa fin et donc de conserver du sucre résiduel.

Le recours à la pourriture noble, lui, n'est pas aisé à dater. Hugh Johnson mentionne son usage attesté en 1836 au Château La Tour Blanche, mais un siècle plus tôt, des vendanges très tardives donnaient un vin très riche qui demandait à vieillir plusieurs années en barrique[7].

Une légende locale raconte qu'un propriétaire (le négociant Focke en 1836 à La Tour Blanche, ou le marquis de Lur-Saluces à Yquem en 1847)[8] rentra en retard pour superviser ses vendanges. Trouvant le raisin surmûri, il décida néanmoins de rentrer sa récolte en dépit de l'aspect pourri des raisins. Bien lui en prit puisqu'il découvrit l'apport de la pourriture noble aux arômes du vin.

Époque contemporaine

Vignoble

Situation géographique

L'appellation sauternes est située à une trentaine de kilomètres au sud de Bordeaux. Sise sur la rive gauche de la Garonne, elle s'étend sur les deux rives de la rivière Ciron.

Elle est délimitée aux terroirs viticoles de cinq communes : Barsac, Bommes, Fargues, Preignac et Sauternes. Les vins de la commune de Barsac peuvent aussi être revendiqués en appellation barsac.

Géologie et orographie

Doux vallonnement des croupes de graves du Sauternais.

Le vignoble repose sur un sous-sol argilo-calcaire ou calcaire, sur lequel une couche plus ou moins épaisse de graves s'est déposée. Les crus les plus prestigieux sont implantés sur des coupes de graves[2]. La topographie des lieux donne un paysage faiblement vallonné, le maigre relief étant constitué de croupes de graves de quelques dizaines de mètres.

Au bord de la Garonne sur Barsac et Preignac quelques parcelles sont plantées sur des alluvions post-Würm dits « argiles des palus », mais le vignoble commence sur la basse-terrasse (entre la D 113 et la voie ferrée) datant du Riss (Pléistocène moyen), avec le calcaire à douze mètres en dessous (+12 NGF). Sur Barsac et le long des rives du Ciron, l'érosion fait affleurer le calcaire à Astéries et à Archiacines désignés localement « calcaire de Saint-Macaire » datant du Stampien (Oligocène supérieur), recouvert d'une fine couche de limon et de sable.

Le sud de Preignac ainsi que le nord de Bommes, Sauternes et Fargues sont sur la moyenne-terrasse datant du Mindel (Pléistocène inférieur), formée de sables peu argileux feldspathiques, avec du graviers et des galets recouverts de limons (s'y trouvent Suduiraut, le bas d'Yquem, Sigalas-Rabaud, etc.), le substrat calcaire étant à +45 NGF. Enfin le sud du Sauternais est sur la haute-terrasse datant du Günz (Pléistocène inférieur) formée de sables et de graviers dans une matrice argileuse jaunâtre (Rieussec, Guiraud, Filhot et haut d'Yquem), le calcaire se trouvant à +70 NGF[9],[10].

Climatologie

Le climat général est un climat océanique proche de celui de Mérignac[11].

L'appellation bénéficie d'un climat local particulier. La rivière Ciron coule sous le couvert végétal de la forêt des Landes. Son eau froide amène de l'humidité. À l'automne, ce phénomène crée des brouillards matinaux qui s'estompent durant la matinée. Ces brumes favorisent le développement du Botrytis cinerea en pourriture noble. Le grain se confit, sa pulpe se concentre en sucres et l'action de la pourriture noble donne des arômes de fruits confits caractéristiques.

Encépagement

Le décret d'appellation précise que quatre cépages peuvent être utilisés sans règle de proportion : la muscadelle B, le sauvignon B, le sauvignon gris G et le sémillon B. Tous sont sensibles à la pourriture grise. Ce défaut devient qualité lors d'années où le climat local favorise la noblesse de cette pourriture.

Le sémillon B est le principal cépage utilisé pour faire du sauternes. Guy Lavignac le dit originaire du Sauternais[12]. Ce cépage à l'acidité parfois un peu faible se rattrape avec une structure ample, beaucoup de gras et de douceur en bouche. C'est un cépage sensible à la pourriture, mais la pellicule (la peau) de ses baies étant épaisse, il se prête bien à la botrytisation[13],[14].

La muscadelle apporte une touche de complexité à l'assemblage. Ce cépage originaire du sud-ouest est peu cultivé, mais avec 5 à 10 % de l'assemblage, il apporte déjà sa touche. Sa sensibilité aux maladies (oïdium, vers de la grappe, pourriture grise) et à l'oxydation le pénalise[15],[16].

Le sauvignon blanc B est un cépage issu du bordelais ou du centre de la France. Il possède des arômes variétaux typiques en vin sec : agrumes, bourgeon de cassis ou buis. Vinifié en liquoreux, il apporte à l'assemblage une pointe d'acidité, gage de fraîcheur et arômes[17],[18]. Le sauvignon gris G est la version colorée du sauvignon blanc. Les caractéristiques des vins sont très voisines, cependant, le taux de sucre est plus élevé avec le sauvignon gris, un argument de poids pour faire des vins moelleux[19].

Pratiques culturales

Vigne enherbée dans le rang et désherbée sous le rang.

La densité de plantation doit être d'au moins 6 500 pieds de vigne par hectare. Dans le détail, l'écartement entre rangs ne peut dépasser 1,90 mètre et l'écartement entre pieds de vigne sur le rang doit être d'au moins 0,80 mètre[4].

Les vignes doivent être taillées avant le premier mai. Les modes de taille préconisés sont différents selon le cépage. Pour la muscadelle B, seule la taille en éventail est autorisée. Il s'agit d'un cep portant deux à cinq bras portant au maximum six coursons à deux yeux francs. Pour le sémillon, outre la taille en éventail, la taille en guyot est permise. Il s'agit d'une baguette (localement appelée « latte ») taillée à six yeux francs et un courson de deux yeux francs. Pour les deux sauvignon, un autre mode de taille est encore ajouté, la taille dite à la bordelaise : le cep porte alors deux baguettes de quatre yeux francs au maximum[4].

Le feuillage des vignes doit être palissé, c'est-à-dire maintenu verticalement par des fils de fer ou un support où les vrilles de la vigne trouvent à s'accrocher. La hauteur de palissage doit être d'au moins 0,5 fois l'écartement entre rangs. Cette hauteur est mesurée entre la limite basse du feuillage et la hauteur de rognage[4]. La surface foliaire est un facteur qualitatif important ; ce sont les feuilles qui assurent la photosynthèse et fabriquent les sucres nécessaires au bon développement de la plante et à la bonne maturité du raisin. À l'inverse, une trop grande végétation entretient un microclimat humide sous les feuilles, au niveau des grappes ; il facilite grandement l'attaque des maladies cryptogamiques, mildiou, pourriture grise. Pour maîtriser l'expansion naturelle de la vigne, le rognage est indispensable.

Le traitement anti-botrytis est interdit.

Le taux de ceps morts ou manquants est limité à 20 %[4]. Au delà de cette limite, le rendement est amputé du pourcentage de ceps morts. La vigne doit être entretenue convenablement. Il s'agit notamment de l'entretien du sol (tonte régulière de l'herbe, passage d'un outil de travail du sol, ou désherbage chimique) et du maintien d'un bon état sanitaire, car le raisin malade ne fait jamais un bon vin. Cependant, les traitements chimiques contre la pourriture (anti-botrytis) sont interdits. Ils agissent indistinctement sur la pourriture grise et la pourriture noble. Seules les mesures prophylactiques sont possibles. Les parcelles ne peuvent être laissées à l'abandon[4].

La charge maximum admissible à la parcelle est de 8 000 kilogrammes[4]. Au delà la vendange ne peut pas être revendiquée en AOC sauternes. Cette limite est destinée à favoriser la qualité. Trop de raisins ne peuvent pas mûrir convenablement et un entassement trop important des grappes transformerait rapidement la pourriture noble en pourriture grise. Pour respecter ces limites, outre une taille relativement courte, le vigneron maîtrise la fertilisation de la vigne aux seules qualités d'éléments exportées durant les vendanges. Si malgré ces mesures, la charge de la parcelle est trop forte, il peut aussi pratiquer une vendange en vert en enlevant le raisin surnuméraire.

Récolte

Pourriture noble sur sémillon B.

Pour respecter le caractère particulier des vins de sauternes, la pourriture noble est indispensable. La récolte se fait donc sur des raisins surmûris porteurs de la noble maladie. Les vendanges se font obligatoirement[4] en tris successifs, de trois à six passages selon les années[20] ; les vendangeurs récoltent à chaque passage les seules grappes ayant atteint la bonne maturité. Certains châteaux récoltent en partie de grappe, voire grain par grain[20]. Pour un tel mode opératoire, il va de soi que l'usage de la machine à vendanger est impossible.

Pour être à bonne maturité le vigneron peut goûter les grains rôtis (nom local désignant les grains desséchés par la pourriture noble). Il dispose aussi d'outils pour mesurer le taux de sucre (mustimètre, réfractomètre, analyses de laboratoire). Le législateur estime que la vendange doit atteindre au moins 221 grammes de sucre par litre pour avoir une maturité suffisante[4].

Vins

Bouteille devant le chai du Château La Tour Blanche, classé premier cru.

Vinification

La vinification débute à l'arrivée de la vendange au chai, par le pressurage. Cette opération est délicate. L'action de la pourriture noble sur le raisin a transformé les constituants de la pulpe, la rendant visqueuse. Une forte pression laisse passer des éléments solides. Une pression avec une lente montée en puissance est indispensable. Au château Guiraud, par exemple, le pressoir reste une heure à la pression de 0,2 bars, laissant s'écouler le premier jus. La montée en pression dure ensuite deux heures pour finir avec une heure à la pression de deux bars ; c'est à ce stade que le moût le plus sucré s'écoule[21].

Le moût est ensuite débourbé avant d'être mis en cuve ou en barrique pour y accomplir la fermentation alcoolique. Les levures utilisent le sucre pour se développer et excrèter de l'alcool, un déchet pour elles. Lorsque la fermentation arrive à un titre alcoométrique suffisant, les levures s'auto-empoisonnent. La fermentation cesse en conservant des sucres résiduels. Pour des raisons de commodité de travail au chai et de maitrise de la quantité de sucres résiduels, le vinificateur peut provoquer la fin de la fermentation alcoolique. Pour cela, il dispose de groupe de réfrigération (anesthésie des levures), de systèmes de filtration stérile (les levures sont ôtées du vin) ou encore du SO² ; (les levures sont tuées).

Élevage

Chai de vieillissement sauternais.

Après une fermentation alcoolique en cuve ou en barrique, l'élevage a généralement lieu en barrique. Plusieurs mois dans le précieux contenant de chêne, le vin se débarrasse des particules en suspensions et acquiert une évolution aromatique vers plus de complexité.

Normes analytiques

Le législateur impose que le vin fini ait au moins 15 % en volume de titre alcoométrique naturel et 12 % de titre alcoométrique acquis. La différence entre les deux concerne le sucre non fermenté. Le taux de sucre résiduel doit être supérieur ou égal à 45 grammes par litre. Lorsque le vin est enrichi, le titre alcoométrique ne peut dépasser 21 %[4].

Dégustation

Le sauternes est un vin qui ne bénéficie pas d'un service trop froid: frais mais pas glacé (autour de 8-9 °C[22], les meilleurs Sauternes pouvant se déguster jusqu'à 14 °C selon les spécialistes).

Accords mets-vin

Sauternes avec des toasts au foie gras.

Le sauternes a longtemps été le vin des desserts. Son sucre résiduel et ses arômes de fruits confits le désignaient pour le rôle de faire-valoir aux fins de repas. Ensuite, la découverte de son association avec le foie gras lui a confié un autre unique rôle. Bérénice Lurton, directrice du château Climens et représentante de l'union des crus classés de Barsac-Sauternes, a initié des expériences entre ce vin et de grands chefs internationaux. Leur structure et leur douceur font merveille avec les crustacés ou viandes blanches, mais aussi les cuisines exotiques aux épices douces (safran, gingembre) ou la cuisine des légumes[23].

Selon Pierre Casamayor, « c'est avec les fromages bleus que le sauternes trouve des compagnons d'exception. Peut-être faut-il y voir là, le mariage parfait entre deux moisissures que l'homme anoblit après avoir paré les deux produits des vertus de la fermentation[24]. »

Classement

L'appellation sauternes compte plusieurs de ses propriétés dans le classification officielle des vins de Bordeaux de 1855.

Premier cru supérieur

Château d'Yquem, un écrin de verdure pour un vin d'or.

Premiers crus

Seconds crus

Caisse de bouteilles de sauternes.

Notes et références

  1. a et b Références sur la façon d'orthographier les appellations d'origine.
  2. a b et c Guide Hachette 2009, p. 393.
  3. Le code international d'écriture des cépages mentionne la couleur du raisin de la manière suivante : B = blanc, N = noir, Rs = rose, G = gris.
  4. a b c d e f g h i et j Direction générale des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires, « Cahier des charges de l’appellation d’origine contrôlée « SAUTERNES » » [PDF], homologué par le « décret no 2011-1820 du 7 décembre 2011 », JORF, no 0284,‎ , p. 20761.
  5. Fiche INAO de l'AOC Sauternes
  6. Johnson 1990, p. 187.
  7. Johnson 1990, p. 264.
  8. Claude Peyroutet, « Crus Classés de Sauternes & Barsac en 1855 » [PDF], sur http://www.sauternes1855barsac.com/.
  9. Jacques Dubreuilh, Notice explicative de la feuille Langon à 1/50000, Orléans, Bureau de recherches géologiques et minières (lire en ligne).
  10. « Carte géologique centrée sur Bommes », sur http://www.geoportail.gouv.fr/.
  11. Voir le paragraphe climatologie de la page vignoble de Bordeaux.
  12. Guy Lavignac, Cépages du sud-ouest, 2000 ans d'histoire/Mémoires d'un ampélographe, Éditions du Rouergue, INRA éditions, 2001. ISBN 2-84156-289-1 et ISBN 2-7380-0974-3.
  13. Catalogue des variétés et clones 1995, p. 241.
  14. Ambrosi 1997, p. 235.
  15. Catalogue des variétés et clones 1995, p. 188.
  16. Ambrosi 1997, p. 175.
  17. Ambrosi 1997, p. 230-231.
  18. Catalogue des variétés et clones 1995, p. 233.
  19. Catalogue des variétés et clones 1995, p. 234.
  20. a et b « Vendange ou cueillette au château d'Yquem » (consulté le )
  21. « Le pressurage au château Guiraud » (consulté le )
  22. Guide Hachette 2009, p. 46.
  23. Marcel Michelson, « Le Sauternes voudrait bien être privé de dessert », (consulté le )
  24. Pierre Casamayor, L'école des alliances, les mets et les vins, Hachette pratique, (ISBN 2-01-236461-6), p. 240.

Voir aussi

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Bibliographie

  • ENTAV-INRA-ENSAM-ONIVINS, Catalogue des variétés et clones de vigne cultivés en France, ENTAV et ministère de l'Agriculture et de la pêche, , 355 p. (ISBN 2-9509682-0-1).
  • Hugh Johnson, Une histoire mondiale du vin de l'Antiquité à nos jours, Hachette, , 464 p. (ISBN 2-01-015867-9).
  • Hans Ambrosi, E. Dettweiler-Münch, E.H. Rühl, J. Schmid et F. Schuman (trad. Maria Elisabeth Gerner), Guide des cépages : 300 cépages et leurs vins, éditions Eugen ULMER, , 320 p. (ISBN 2-84138-059-9).
  • Collectif, Le guide Hachette des vins de France 2010, Hachette pratique, (ISBN 978-2-01-237514-7).

Lien externe

Articles connexes