Elle a les yeux enfermés dans deux taches noires, & on dit qu’ils éclairent la nuit comme ceux des chats. Le dessus de la tête, jusqu’aux oreilles, est gris. Elle a sur le cou quatre bandes noires sur un fond fort blanc. Elle a aussi quelques taches, que Pline appelle des yeux dans la panthère, mais qui ne sont point isolées. Ses dents sont canines, & souvent rompues, car c’est un animal farouche qui les rompt en mordant les barreaux de fer de sa cage, quand il est renfermé. La poche, ou le sac, où est le parfum qu’on appele civette, est au dessous de l’anus. Elle a deux pouces & demi de large, & trois de long. Sa capacité peut contenir un petit œuf de poule. On en fait sortir la liqueur odorante d’un grand nombre de glandes qui sont entre les deux tuniques de ses poches. Scaliger & Mathiole croient que le parfum de la civette, zibettæ odoramentum, n’est autre chose que sa sueur : mais cela est faux, aussi-bien que ce qu’ils disent qu’elle se perfectionne avec le temps, & que le reste du corps sent bon.
Barbe, dans son Parfumeur françois, a suivi l’opinion de Scaliger & de Matthiole, & dit que l’on tient cet animal enfermé dans une cage de fer, que les personnes qui gouvernent ces animaux savent connoître le temps qu’il faut prendre pour les faire suer, qu’ils mettent alors plusieurs réchauds plein de feu autour de leurs cages ; que cela aide au naturel de l’animal, & que comme la sueur en est fort épaisse, on ramasse avec un couteau d’ivoire toute la sueur qui se trouve sous ses écailles ou entre ses cuisses, & que c’est ce que nous appelons la civette. Tout cela est faux, & d’ailleurs cet animal n’a point d’écailles.
Plusieurs croient avec Bélon, que notre civette n’est autre chose que l’hyène dont parle Aristote, ou que c’en est une espèce. Mais Scaliger, Ruel, Matthiole, Léon Africain, Busbec, Aldrovandus, & autres modernes, veulent que la civette ait été inconnue aux Anciens, & que ce soit une espèce de chat. Les civettes sont fort communes au Royaume d’Issiny en Guinée. Les Nègres les suivent à la piste pour recueillir le suc qu’elles laissent sur les herbes. P. Loyer.
Ce mot vient de l’Arabe zibet ou zebet, qui signifie écume ; car en effet cette liqueur est écumeuse en sortant, & fort blanche ; & elle perd sa blancheur, quand elle est reposée. Cela est tiré des mémoires de M. Perrault. Le Pere Ange de S. Joseph dit qu’il a vu plusieurs fois à Bassora le gatto zibetto, & que c’est une fouine qu’on frappe avec un petit bâton jusqu’à tant qu’elle sue le musc. On enferme ces civettes fort étroitement, pour en tirer la sueur qui coule entre leurs aînes, & cela une fois par jour. Elle sont d’un grand revenu ; mais elles dépensent beaucoup. Toutes les fois qu’on en veut ramasser la sueur, on leur met le cou dans une fourche, afin de s’en rendre maître ; parce qu’elles sont fort méchantes, & ne s’apprivoisent point.
On appelle aussi civette, la liqueur épaisse & odoriférante qu’on tire de la civette.
La Civette, lorsqu’elle est nouvelle, est blanche, elle n’est pas encore en état d’être employée, & lorsqu’elle est trop vieille, elle est toute brune, elle n’est pas bonne non plus ; mais il faut qu’elle soit d’un jaune doré, & d’une très-forte odeur, qui soit pourtant agréable, & sur-tout qu’elle ne file pas, car il y auroit danger qu’elle ne fût mêlée de miel. Barbe.
☞ Il faut préférer la civette du mâle à celle de la femelle, laquelle est souvent mêlée avec l’urine de la bête, qui l’altère beaucoup. Histoire des voyages.
Civette est aussi un oiseau nommé plus communément Chouette. Voyez ce mot. Un des Erranti de Bresce, qui avoit pris le surnom d’Il Notturno, s’étoit donné pour devise une civette, avec cet hémystiche, Per amica silentia Lunæ.
Civette est aussi une petite plante potagère. Petite cive. Cepula minor. Elle se coupe menu, & s’emploie dans les salades & ragoûts. Voyez Cive.
CIVIDAL, CIVIDALE. Mot Italien, qui ne se dit que d’une ville d’Italie, nommée par les Latins forum Julii, & capitale du Frioul, auquel elle a donné son nom ; on la nomme Cividale, Cidivale del Frioul, comme on le voit dans l’Histoire du Frioul de Palladio, L. II, p. 58. Elle s’appelle aussi Cividale d’Austria, parce que sur la fin du treizieme siècle elle fut soumise à Ottocare, Roi de Bohême & Prince d’Autriche, dit le même Auteur, L. VI, p. 253, 254. Ainsi Maty & les Géographes qui disent, soit dans leurs Carres, soit ailleurs, Cividad, ou Ciudad, se trompent. Cette terminaison est Espagnole, & ne convient ni à la langue françoise, ni à l’italienne ; il faut dire Cividad ou Cividale, avec l’Atlas, Thomas Corneille, &c.
CIVIÈRE. s. f. Sorte de petit brancard, à quatre bras, ☞ sur lequel deux hommes portent à bras ou par le moyen de bricolles ou bretelles, de gros fardeaux. Brachiata crates. Dans les ateliers on appelle bar, des civières à bras, & dans l’Eglise, on appelle des civières à cou celles sur lesquelles on porte des Reliques, des pains benis.
On dit en proverbe, cent ans bannière, & cent ans civière : ☞ pour marquer les révolutions & les changemens de fortune qui arrivent dans les maisons.
CIVIL, ILE. adj. ce qui regarde la police, le bien public, le repos des Citoyens. Civilis. Il faut punir séverement tous les crimes qui blessent la société civile. Les guerres civiles sont les plus cruelles, & les plus dangereuses de toutes. Il n’est pas nécessaire de se détacher de la vie civile, ni de rompre tout commerce avec les hommes, pour s’unir à Dieu. S. Evr. Un mineur est incapable des moindres actes de la vie civile. C. B.
☞ Civile se dit aussi, en parlant des états produits par le fait des hommes ; état civil, société civile, gouvernement civil. De tous les états produits par le fait des hommes, il n’y en a point de plus considérable que l’état civil ou celui de la société civile & du gouvernement. Le caractère essentiel de cette société, qui la distingue de la simple société de nature ; (Voyez Société.) c’est la subordination à une autorité souveraine qui prend la place de l’égalité & de l’indépendance.
☞ Originairement le genre humain n’étoit distingué qu’en famille & non en peuples. Ces familles vivoient sous le gouvernement paternel de celui qui en étoit le chef, comme le pere ou l’ayeul. Mais ensuite étant venues à s’accroître, & à s’unir pour leur défense commune, elles composèrent un corps de nation, gouverné par la volonté de celui, ou de ceux à qui l’on remettoit l’autorité. De-là vient ce qu’on appelle le gouvernement civil, & la distinction de Souverain & de sujets. Voyez cet mots, & Loi naturelle.
☞ Ainsi pour se faire une juste idée de la société civile, il faut dire que c’est la société naturelle elle-même, modifiée de telle sorte, qu’il y a un Souverain qui y commande, & de la volonté duquel tout ce qui peut intéresser le bonheur de la société dépend en dernier ressort, afin que sous sa protection & par ses soins, les hommes puissent se procurer d’une manière plus sûre le bonheur auquel ils aspirent naturellement. Voyez Souverain, fondemens de la Souveraineté.
☞ L’Etat civil & la propriété des biens ont donné lieu à plusieurs autres établissemens qui font la beauté & l’ornement de la société, & d’où résultent tout autant d’états accessoires : comme sont les différentes charges de ceux qui ont quelque part au gouvernement, des Magistrats, des Juges, des Officiers des Princes, des Ministres de la religion, des Docteurs, &c. à quoi l’on doit ajouter tous les arts, les métiers, l’agriculture, la navigation,