Lignac précisera : « Comment M. de Buffon n’a-t-il pas aperçu, qu’en se liant aux Encyclopédistes par les mêmes principes, il concourait à leurs desseins criminels ? »
Après cela, que Buffon ait eu peu de goût pour les Encyclopédistes et dédaigné, à tort ou à raison, leur philosophie militante, il n’en est pas moins certain que, pour l’historien qui regarde surtout au sens général et à la portée des œuvres, les Encyclopédistes n’eurent pas, malgré toutes ses réserves, de plus utile allié, ni les théologiens, malgré toutes ses précautions, de plus sérieux adversaire, que le grand interprète rationaliste de la nature au dix-huitième siècle.
Un Encyclopédiste, qui marchanda presque autant son concours que Buffon, c’est Duclos. On connaît les allures, moitié naturelles, moitié affectées, du personnage : très bourru, mais non moins avisé, jaloux de son indépendance sans mépriser les faveurs de la cour, « droit et adroit » enfin, suivant le mot de Jean-Jacques, il donne assez l’idée, quand on le voit jouer son rôle dans les salons du temps, d’une espèce de sanglier solitaire et redouté de tous, qui se vautre et se rue à plaisir à travers toutes les bienséances, mais cela, sans jamais perdre la tête, car il sait toujours placer à propos ses coups de boutoir. C’est lui qui a asséné aux Encyclopédistes le mot célèbre : « Ils en feront tant qu’ils finiront par m’envoyer à confesse. » Un historiographe de France et un protégé de Mme de Pompadour ne pouvait guère fournir plus de deux articles : il écrivit déclamation et étiquette et se tint quitte envers l’Encyclopédie. En vain Voltaire voulut-il l’engager plus avant dans le parti en essayant de lui faire patronner la candidature de Diderot à l’Académie : Duclos fit la sourde oreille. Dès l’apparition de l’Encyclopédie, il s’était méfié de ces écrivains qui cachent leur jeu, qui, « sous prétexte d’attaquer la superstition, cherchent à saper les fondements de la morale et donnent atteinte aux liens de la société ». Comment, du reste, eût-il pu s’entendre avec ces démolisseurs des préjugés, lui qui avait dit, avec beaucoup de sens d’ailleurs, que