conduite de la tragédie, puisqu’en apparence il n’a servi qu’à sauver Lélia des ruines de l’abbaye où elle s’était réfugiée, Magnus reparaît au cinquième acte, courbé sous une caducité précoce, chauve avant l’âge, brisé par la continence et la dévotion ; il a cherché un asile contre les passions humaines dans un couvent de Camaldules. — Sténio, conduit par Trenmor, qui l’a surpris dans l’épuisement d’une orgie, Sténio interroge Magnus sur le fruit de ses abnégations. Le moine, effrayé, répond au désespoir par le doute. Sténio, convaincu sans retour de l’impuissance et de la folie des désirs humains, retourne à Dieu pour lui demander raison de sa raillerie.
Lélia s’agenouille sur le corps de Sténio, dépose un baiser sur ses lèvres, avoue son amour et justifie sa rigueur. Elle n’a pas voulu être à Sténio, parce qu’elle a respecté en lui la pureté idéale que le plaisir devait troubler. Elle a repoussé ses caresses pour lui apprendre à distinguer le bonheur de la volupté.
Magnus, dont la raison est égarée par un sacrifice au-dessus de ses forces, donne la mort à Lélia, et Trenmor vient méditer sur le double châtiment de l’espérance aveugle et de l’incrédulité hautaine.
Il me semble que ce dénoûment réalise pleinement l’attente du lecteur, et respecte jusqu’à la fin l’ensemble des symboles exprimés par la conception de Lélia.
Quant à la philosophie qui se mêle au dialogue, à la trame du récit, aux monodies de Lélia et de Sténio, si la pensée de l’auteur n’emprunte pas toujours la forme la plus précise et la plus nette, au moins devons-nous dire que sa parole et les images qu’il appelle à son aide ont quelque chose de saisissant et de compréhensif qui étonne d’abord, mais qui peu à peu, sert merveilleusement au relief de ses idées.
Il y a dans Lélia deux morceaux qui se distinguent entre tous par la vigueur et la portée : l’un, placé dans la bouche de Lélia, sur l’avènement et la chute des religions ; l’autre, dans la bouche de Sténio, sur la destinée de don Juan, et sur la leçon qu’on en peut retirer.
Quand Lélia analyse, une à une, toutes les idées amères et décourageantes qui ont traversé son âme dans la solitude, elle com-