hissent une habitude irréfléchie de férocité, forment un contraste frappant, mais naturel avec le ton grave et sage de l’ensemble.
La fin du Hava-Mal est un petit traité de magie qui expose les effets surnaturels de la puissance des runes ; on y trouve la source de la plupart des idées superstitieuses du moyen âge ; on voit là en germe ce qui, mêlé plus tard à d’autres idées conservées par tradition de l’antiquité, ou venues de l’Orient, a été la sorcellerie.
Je vais donner une idée du Hava-Mal, en traduisant les sentences les plus frappantes et les plus naïves.
Il est remarquable qu’il n’y en ait presque aucune qui recommande la bravoure. Elle était tellement dans les mœurs et dans le tempérament du peuple, qu’il n’était pas besoin d’en parler.
On sera, je pense, frappé de quelques pensées où éclate un sentiment profond de sociabilité. La charité chrétienne, ou le sentiment social, étendu à l’espèce tout entière, est en germe dans plusieurs de ces maximes de la vieille sagesse germanique, entre autres dans celle qui se termine ainsi : l’homme est la joie de l’homme.
« Regarde bien de tous côtés avant d’aller en avant, car tu ne sais où peut être caché ton ennemi.
Heureux celui qui donne ! Un hôte entre, où va-t-il s’asseoir ?
Il a besoin de feu celui qui est entré. Ses genoux sont glacés ; il a besoin d’habit et de vêtemens celui qui vient par-dessus les montagnes.
On ne peut prendre avec soi, en voyage, une meilleure provision, que beaucoup de sagesse ; elle vaut mieux que l’or dans un lieu inconnu. C’est un secours dans le besoin.
La bière n’est pas si bonne qu’on le dit pour les enfans des hommes. Plus un homme boit, moins il se connaît lui-même.
L’oiseau de l’oubli[1] plane sur l’ivresse, et ravit à l’homme son intelligence.
L’insensé croit qu’il vivra éternellement, s’il fuit le combat ; mais
- ↑ Le héron de l’oubli.