décidèrent : aussi était-il l’objet de beaucoup de soupçons, et sa conduite était surveillée de près par les autres chefs du parti.
Moctezuma est un homme d’environ cinquante ans, d’une taille élevée ; sa figure est douce et peu expressive. Quoique parvenu au rang de général, en passant lentement par tous les grades inférieurs de l’armée, il n’est connu cependant par aucun exploit militaire. Courageux de sa personne, il saura exécuter les ordres d’un chef, mais il n’est point fait pour briller au premier rang. Quoique doué d’un sens droit, il a l’esprit faible : les circonstances ont pu l’élever, mais il est incapable de les maîtriser ou de les faire naître. Tel est l’homme que le hasard porta à la tête du mouvement révolutionnaire de Tampico. Autour de lui on ne distinguait aucun personnage remarquable ; aussi nulle entreprise ne fut tentée de ce côté, et c’est à la fortune seule qu’on doit attribuer tous ses succès.
À la première nouvelle de la révolte de Tampico, le gouvernement fit partir douze cents hommes de troupes, sous les ordres du général Teran, espérant que celui-ci s’emparerait de la ville sans coup férir. Mais Moctezuma s’était hâté de pousser avec vigueur les fortifications déjà commencées ; il avait fait couper les bois qui avoisinent Tampico ; lui-même présidait aux travaux de ses soldats, et déjà plusieurs forts et bastions s’élevaient pour protéger la ville et ses alentours. Teran se vit donc obligé de s’arrêter quelque temps à Altamira, pour essayer les moyens de corruption sur un ennemi qu’il trouvait bien fort pour une attaque.
Ce fut au milieu de ces circonstances qu’arrivèrent les naufragés du brick de guerre français le Faune. Les Français domiciliés à Tampico les reçurent avec joie ; chaque jour on craignait un assaut de la part de Teran ; chaque jour quelque nouvelle proclamation de ce général jetait l’alarme parmi les étrangers ; lui aussi criait : « Haine et mort aux Espagnols !… » et ce cri était le ralliement du parti de Santa-Anna. Aussi les négocians français, qui craignaient que, dans le cas d’une réaction populaire, on ne les confondît sous cette dénomination, suppliaient-ils le consul de retenir nos marins dans la ville, persuadés que leur présence seule imposerait au peuple. Moctezuma lui-même n’était pas fâché qu’ils restassent ; il offrit même de les armer, dans l’espérance vague