Point de vieux mâts et point de rames,
Et point de palmier qui verdit.
Celui qui le remplit sans peine,
C’est l’empereur de Sainte-Hélène.
— Un empereur ! avez-vous dit ?
Je veux le voir, et ce soir même,
Son empire et son diadème,
Son sceptre et son manteau de roi.
Pour m’amuser pendant l’orage,
Dans ma maison de coquillage,
Sur son trône montrez-le moi.
— Mon empereur n’a point d’empire,
Point d’or, point d’encens, point de myrrhe,
Point de sceptre ni de manteau.
Il n’a rien qu’un petit chapeau
Avec une capote grise,
Puis une courte épée encor
De fer, qui jamais ne se brise.
Sur son tranchant, en encre d’or,
Une N est écrite et gravée.
— S’il porte une N à son épée,
Je vais me cacher dans mon puits.
Ne lui dites pas où je suis,
Quelle est la source d’où j’arrive,
Ni mon nom, ni quelle est ma rive.
S’il me rencontrait par hasard,
Il me tarirait d’un regard.
Je me blottis dans mon abîme ;
Pendant mille ans j’y resterai,
Et de frayeur je me tairai.
Sous ses pas je courbe ma cime
Comme l’herbe sous le faucheur.
Courez, courez au bout du monde ;
Pour enfermer votre empereur,
La mer n’est pas assez profonde.
Sur sa frégate de haut-bord,
Un capitaine d’Angleterre,
Dans la tempête, loin du port,
Depuis dix ans cherche la terre.
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NAPOLÉON.